LA SUISSE, LA FIN D’UN PARADIS FISCAL ?

 


 

Article publié dans la Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » N° 152

 (Année 2007)


 

La santé fiscale helvète a récemment suscité l’ire des prescripteurs français[1] qui se rappelaient sans doute la formule de Chateaubriand : « Neutres dans les grandes révolutions des Etats qui les environnaient, les Suisses s’enrichirent des malheurs d’autrui et fondèrent une banque sur les calamités humaines. » 

La question de l’existence d’un paradis fiscal helvète est pourtant loin d’être établie. Il est vrai la notion même de paradis fiscal demeure discutée : est généralement considéré comme tel un territoire doté d’une souveraineté fiscale et caractérisé par une législation fiscale laxiste destinée à accueillir de façon illimitée et anonyme des capitaux étrangers. 

Une approche téléologique conduit à identifier comme tels les pays qui commercialisent leur souveraineté en offrant un régime législatif et fiscal favorable aux détenteurs de capitaux, quelle que soit leur origine[2].

Une approche plus matérielle et objective s’intéresse au contenu même de la législation fiscale, en dehors de toute considération politique : absence ou faible imposition des bénéfices ou des revenus issus d’une activité professionnelle, absence d’un mécanisme d’imposition du revenu (comme dans les pays des Caraïbes), absence d’imposition des revenus de source étrangère ou pour certaines catégories spécifiques d’opération ou de commerces (holdings, compagnies de navigation, sociétés financières internationales), non taxation des résidents de nationalité étrangère. Toutefois, cette approche ne prend son sens qu’en comparaison avec d’autres pays à fiscalité plus élevée (un pays donné est toujours le paradis fiscal d’un autre pays, au moins dans certains domaines ou pour certaines activités), ce qui faisait écrire à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dès 1987 « qu’il n’existe pas de critère unique, clair et objectif permettant d’identifier un pays comme étant un paradis fiscal ». On l’a compris, l’ambivalence de la notion rendrait péremptoire toute qualification.

L’approche moderne des centres financiers offshore, corroborée par les travaux du Forum de stabilité financière et du Groupe d’action financière (GAFI), tente néanmoins d’associer les deux précédentes. Un paradis fiscal est ainsi une juridiction qui attire d’importantes activités non résidentes (le critère téléologique est très atténué) et qui présente certains traits communs : un régime fiscal très favorable (absence de retenue à la source), un contrôle insuffisant des activités financières, un secret bancaire très large, des pratiques restrictives de coopération internationale, un droit commercial autorisant la création de structure masquant l’identité des bénéficiaires des opérations.

Si la Suisse est souvent présentée comme l’un des plus vieux paradis fiscaux au monde, sa législation fiscale de droit commun ne présente aucune caractéristique d’un paradis fiscal : le niveau d’imposition global en Suisse demeure relativement élevé, bien que disparate. Contrairement aux idées reçues, le niveau moyen des prélèvements obligatoires en Suisse est important (34 % en moyenne contre 27,6 % aux Etats-Unis)[3]. Chacun des vingt-six cantons applique des taux variables. Les cantons montagnards du centre du massif alpin, dénués de tout centre économique notable et paralysés par leur isolement géographique, sont les plus compétitifs[4].

Au-delà des querelles picrocholines sur la réalité du modérantisme fiscal helvète, c’est l’organisation même de la contribution aux ressources publiques qui est trop souvent ignorée. La Constitution fédérale fixe de manière limitative les impôts que la Confédération peut prélever[5] (compétence d’attribution), alors que les cantons bénéficient d’une compétence de principe, à moins que la Constitution ne leur interdise expressément de percevoir certains impôts (TVA[6]) ou ne les réserve à la Confédération (droits de douane[7]). Les communes peuvent se voir déléguer par les cantons la faculté de percevoir l’impôt.

Au niveau de la confédération, les deux principales sources de recettes sont la taxe sur la valeur ajoutée et l’impôt fédéral direct. Les finances publiques fédérales sont gouvernées par des objectifs ambitieux : efficacité conjoncturelle, substitution progressive de l’imposition directe par l’imposition indirecte, maintien ou renforcement de l’attractivité économique par une pression fiscale modérée sur le travail et sur le capital. L’impôt prélevé au niveau de la confédération représente environ un gros tiers de la pression fiscale helvète[8].

La Loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID) du 14 décembre 1990 a toutefois limité la souveraineté fiscale des cantons. Cette harmonisation, purement formelle, intéresse l’assujettissement à l’impôt, l’objet des impôts, la procédure et le droit pénal en matière fiscale, mais ne concerne pas la fixation des barèmes, des taux et des exonérations. La disparité en la matière est la règle, et l’harmonie l’exception. Notons cependant l’existence d’une cotisation de péréquation inter-cantonale, qui n’est pas sans rappeler, en France, la cotisation de péréquation en matière de taxe professionnelle. Ensemble, Cantons et Communes perçoivent deux tiers de la charge fiscale.

Au plan strictement fiscal et financier, les clés du succès helvétique s’articulent autour de trois axes majeurs : un régime fiscal favorable pour les sociétés domiciliées, les holdings et un secret bancaire hermétique. D’autres considérations attirent cependant les investisseurs en mal d’optimisation fiscale : au cœur de l’Europe, la Suisse bénéficie d’une excellente situation géographique, d’une exemplaire stabilité politique et monétaire, d’infrastructures parfaites et d’un réseau bancaire mondialement reconnu pour sa compétence, le tout dans un cadre de vie fort agréable. Dans  la liste établie par le Forum de stabilité financière, rendue publique le 25 mai 2000, la Suisse apparaît dans le premier groupe, le plus recommandable, celui des places financières classiques, dans lequel figurent Singapour, le Luxembourg ou Hong Kong[9].

La place financière helvète vit une période charnière. D’un côté, les spécialistes s’accordent sur les efforts tangibles corroborés par la législation helvète : la normalisation serait en marche, le secret bancaire valétudinaire et les dispositifs anti-évasion fiscale rendraient acinétiques les transferts de bénéfices depuis la France.  Dans le même temps, l’opinion publique semble redécouvrir les douceurs du territoire helvète, qui, depuis la disparition de l’ « exit tax », sanctionnée par la Cour de Justice des Communautés Européennes[10], attirerait un nombre croissant de personnes physiques qui souhaitent échapper à l’Impôt de Solidarité sur la Fortune.

La situation du territoire helvète sera analysée au travers de ses deux dimensions, financières et fiscales, sans perdre de vue que la Confédération helvétique est multiple, chacun de ses cantons jouissant d’une importante autonomie normative et fiscale. En premier lieu, c’est l’avenir du paradis bancaire et financier qui sera analysé : face à des mesures visant à éradiquer tout centre off shore, les gouvernements Suisses, entre coopération de façade et mobilisation de principes fondamentaux, tentent de résister (I). Sur un plan exclusivement fiscal, nous tenterons de distinguer les phénomènes « d’importations » de bénéfices et de patrimoines, tant les perspectives diffèrent (II). 

SUR LA FIN DE LA PLACE FINANCIERE HELVETIQUE 

La finance helvétique et ses pratiques bancaires n’ont jamais été aussi étroitement surveillées (1), mais la résistance entreprise par les autorités fédérales invite à la pusillanimité (2). 

1. Les mesures déstabilisatrices visant à éradiquer le centre off shore 

Le secret bancaire a depuis une dizaine d’années subi les assauts répétés des Etats tiers lésés et des organisations internationales. Tancé comme un vecteur de blanchiment et de fructification d’argent sale, il a péniblement survécu aux scandales de la finance helvète intervenus ces dernières années, avec les affaires mettant en exergue Sani Abacha (Nigeria), Mobotu (Kabila) ou encore Marcos (Philippines). 

Ainsi, le GAFI a très vite fait de la Suisse une de ses principales cibles dans ses recommandations visant à lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme : surveillance des intermédiaires financiers, blocage des fonds d’origine criminelle, coopération internationale. 

Si les établissements financiers suisses gèrent environ 20% de la richesse privée mondiale, les pressions émanant de l’OCDE ont bouleversé le paradis financier. 

Dans son rapport sur la concurrence fiscale dommageable publié en 1998, l’OCDE a formulé 4 recommandations incitant les Etats au dialogue : 

–  Etablissement de principes directeurs sur les régimes fiscaux préférentiels dommageables ; 

– Création d’un forum sur les pratiques fiscales dommageables; 

– Formulation de recommandations d’action au niveau de la législation nationale et des conventions fiscales; 

– Etablissement d’une liste des paradis fiscaux. 

La Suisse, expressément visée, a été invitée à discuter avec les autres pays membres de l’OCDE de ses pratiques fiscales. Le rapport de 1998 a ainsi posé les jalons de la directive arrêtée le 3 Juin 2003 par le conseil européen des ministres des finances en matière de fiscalité de l’épargne[11]

L’objectif n’était guère novateur : il s’agissait de permettre que les revenus d’épargne, sous forme de paiement d’intérêts effectué dans un Etat membre en faveur d’un bénéficiaire, personne physique, résident dans un autre Etat membre soient effectivement imposés dans cet autre Etat membre conformément aux dispositions nationales. 

A défaut de coordination dans les législations nationales, cet objectif est atteint par l’échange automatique d’informations entre les autorités fiscales des différents Etats, comme le recommandait l’OCDE. Dès lors qu’un Etat membre de l’Union Européenne verse des intérêts à un bénéficiaire domicilié fiscalement hors de son territoire, il doit en informer l’Etat de sa résidence afin que ces revenus soient aussi imposés dans cet Etat. 

L’application de cette mesure nécessite la levée du secret bancaire, à laquelle le Luxembourg, la Belgique et l’Autriche se sont opposés et sont parvenus à substituer de façon transitoire une retenue à la source. La Directive ne pouvant viser que les paiements d’intérêts  effectués par un agent payeur établi dans un Etat membre de l’Union Européenne en faveur de bénéficiaires résidents dans un autre Etat membre, la Suisse n’était pas concernée. 

Toutefois, afin de conserver de bonnes relations avec la communauté européenne et internationale, elle a  dû se montrer coopérative[12]

2. La résistance des gouvernements suisses 

Les gouvernements Suisses ont mobilisé les principes fondamentaux du droit helvétique afin d’essayer d’enrayer les pressions et ingérences poussant à plus de transparence et de coopération. 

Une lutte entravée par les principes fondamentaux du droit national suisse 

Outre la souveraineté nationale qui réduit la portée normative des textes émanant des organismes internationaux (soft law), un autre principe fondamental s’oppose à une normalisation de la législation financière helvète. Le secret bancaire suisse, ancré dans la Constitution fédérale[13] et défini pour le banquier par la loi fédérale de 1934 sur les banques et les caisses d’épargne[14], s’analyse comme un droit fondamental de la personne humaine. La violation du secret professionnel du banquier, par négligence ou par intention, est punie d’une peine de prison (six mois) ou d’une amende (CHF 50 000). 

Cette obligation de discrétion envers la clientèle n’est certes pas absolue : le client lui-même peut lever le secret et il existe des dérogations en matière de procédures de droit civil (succession ou divorce), de droit des faillites, de droit pénal (blanchiment d’argent, participation à une organisation criminelle, vol, fraude fiscale, chantage…) et de procédures d’entraide judiciaire internationale (pour les non résidents). 

La principale difficulté résulte du fait que le droit helvétique ne considère pas l’évasion fiscale comme un délit pénal, mais comme un délit administratif passible d’une seule amende.  Ainsi, aucune base légale n’existe aujourd’hui pour intervenir sans porter atteinte à ces droits fondamentaux. 

2.2. Une coopération de façade 

Deux types de dispositifs ont été mis en place par les autorités suisses. 

2.2.1. La nécessaire adoption d’un dispositif anti-criminalité 

Force est de constater que la législation Suisse a largement progressé en terme de lutte contre la délinquance financière. 

La loi fédérale de lutte contre le blanchiment d’argent dans le secteur financier de 1998 considère la manipulation des profits tirés d’actes illicites comme un crime et impose à tous les intermédiaires financiers le respect de 4 obligations qui vont largement au-delà de celles formulées jusqu’alors dans la convention de diligence des banques de 1977. Les banquiers suisses doivent désormais : 

– Vérifier l’identité des cocontractants. 

– Vérifier la finalité des opérations effectuées. 

– S’affilier à des organismes d’autorégulation à des fins de surveillance. 

– Informer le Bureau de communication de blanchiment d’argent en cas de doutes sur l’origine des fonds. 

Ainsi, tant en matière de blanchiment[15] que de vigilance[16] ou de corruption[17], des progrès législatifs significatifs sont intervenus ces dernières années, ce que le GAFI n’a pas manqué de souligner, considérant la Suisse comme un des meilleurs élèves en la matière. Il n’en va pas de même en matière d’évasion fiscale. 

2.2.2. La fausse transparence du dispositif anti-évasion 

Les conventions internationales d’entraide judiciaires souffrent de leur portée relative. 

La Loi fédérale relative à l’entraide pénale internationale est fondée sur les principes de double incrimination, de spécialité et de proportionnalité. Ainsi, en vertu du principe de double incrimination, les tribunaux suisses n’appliquent des mesures de contraintes – comme la levée du secret bancaire – que lorsque l’acte poursuivi est punissable tant au regard du droit de l’Etat requérant que du droit suisse. L’évasion fiscale ne constituant pas un délit pénal en Suisse, l’entraide pénale se heurte à une aporie. 

S’agissant de l’entraide administrative, la Commission fédérale des banques (CFB) peut transmettre à des autorités de surveillance étrangères des informations secrètes, sous réserve de la réunion de trois conditions : 

– Les informations transmises ne peuvent être utilisées qu’à des fins de surveillance directe de banques ou d’autres intermédiaires financiers soumis à autorisation. Toute transmission d’informations aux autorités fiscales est donc exclue.  

– L’autorité étrangère qui formule la demande doit être soumise au secret de fonction ou au secret professionnel, et être la destinataire des informations.  

– L’autorité requérante ne peut transmettre des informations à d’autres autorités ou à d’autres organes publics de surveillance sans l’accord préalable de la CFB ou sans autorisation générale contenue dans un traité international. La transmission d’informations à des autorités pénales étrangères n’est pas autorisée dès lors qu’aucune entraide judiciaire en matière pénale n’est prévue entre les Etats concernés. Le point d’achoppement issu des règles relatives à l’entraide judiciaire ne peut donc être contourné au moyen de l’entraide administrative. 

En matière fiscale, les hypothèses de levée du secret bancaire suisse sont finalement assez réduites. Et ce principe est sorti quasi-indemne des négociations brillamment menées par la Suisse avec l’Europe. 

2.3. Le compromis européen 

Le misonéisme helvète s’agissant du secret bancaire est largement alimenté par les milieux d’affaires suisses et les autorités fédérales, lesquels arguent qu’environ 140 000 emplois, dans les banques et les sociétés financières helvétiques, sont directement liés à sa pérennité[18]

La Suisse a néanmoins entrepris des négociations afin d’aboutir à un accord prévoyant des mesures analogues à celles résultant, pour les Etats membres, de la Directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts. 

L’accord du 26 juin 2004[19] n’a finalement abouti qu’à une retenue à la source pratiquée par les agents payeurs suisses sur les intérêts versés aux ressortissants communautaires non-résidents.  Le secret bancaire est levé uniquement en cas de fraude fiscale avérée. 

Les agents payeurs suisses prélèvent une retenue à la source de 15 % durant les trois premières années à compter de la date d’application de l’accord, de 20 % durant les trois années suivantes et de 35 % par la suite. La Suisse conserve 25 % de ces recettes et reverse 75 % à l’État membre de résidence du bénéficiaire des intérêts payés. 

Il s’agit d’une mesure pérenne et il est peu probable que la Suisse concède à terme un échange automatique d’informations avec les Etats membres de l’UE. Cette perspective influera certainement sur l’action des trois Etats membres qui ont mis en place des mesures transitoires quant à l’application de la directive. 

L’accord prévoit toutefois un échange de renseignements sur les comportements constitutifs de fraude fiscale « au regard de la législation de l’État requis ». Or, seule l’escroquerie fiscale constitue un délit pénal au regard du droit helvétique, qui la définit comme la situation dans laquelle le contribuable utilise intentionnellement des titres faux ou falsifiés afin de tromper les autorités fiscales et obtenir des avantages fiscaux indus. La simple dissimulation d’une somme sujette à l’impôt échappe donc à cette notion. 

En dépit de cette retenue à la source, la place financière helvétique demeure relativement attractive pour les épargnants, d’autant que les titulaires étrangers de comptes en Suisse peuvent éviter les types d’investissements visés par la Directive ou transférer leurs comptes personne physique à une personne morale (société off shore, trust, société d’investissement privée…). La procrastination helvète semble déterminée à faire du secret bancaire un symbole, celui-ci n’étant « pas négociable », selon le Ministre des Finances Kaspar Villiger. 

SUR LA FIN DU DUMPING FISCAL HELVETE 

Si la Suisse demeure une terre d’asile pour les grandes fortunes (II), le fait est qu’elle peine de plus en plus à séduire les entreprises, que les pressions internationales et les dispositifs anti-évasion fiscale dissuadent (I). 

I. La fin des délocalisations de bénéfices en Suisse ? 

La souveraineté fiscale helvétique est partagée entre la Confédération, les cantons et les communes. Ce découpage reflète la structure fédérale suisse et provoque la compétition entre les échelons suisses, chacun instituant des avantages fiscaux pour attirer un maximum d’investisseurs. C’est ainsi qu’est apparu un régime privilégié pour les holdings, lesquelles sont exonérées d’impôt sur les plus-values, sur les dividendes et sur les intérêts. Afin de lutter contre les délocalisations de bénéfices en Suisse, la France dispose d’un mécanisme quasi-comminatoire avec l’article 209B du CGI (1). Elle a toutefois tempéré son dispositif, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives aux investisseurs (2). 

1. Sur la compatibilité de l’article 209B avec la convention franco-suisse 

1.1. La conception française 

L’article 209 B du CGI a pour objet de dissuader les personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés de localiser une partie de leurs bénéfices dans des sociétés établies dans un Etat ou territoire situé hors de France où elles sont soumises à un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238 A du CGI. 

La question de la compatibilité de l’article 209B avec les dispositions de la convention franco-suisse a donné lieu dès 1995 à de nombreux contentieux administratifs[20]. En dépit de solutions divergentes, l’administration française prît alors les devants : 

d’une part, elle maintenait sa doctrine et excluait toute incompatibilité de l’article 209 B avec les conventions internationales[21] ; 

– d’autre part, elle insérait dans tous les nouveaux avenants ou conventions signés par la France une clause prévoyant expressément l’application de l’article 209B, nonobstant toute disposition contraire. 

Faute de parvenir à imposer aux négociateurs suisses une telle clause, l’administration française a mis en œuvre un mécanisme subtil lui permettant d’appliquer l’article 209B dans le cadre conventionnel franco-suisse.

L’avenant du 22 juillet 1997 à la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 ne présente en effet aucune référence expresse à l’article 209 B. Son article 16 a néanmoins modifié les méthodes d’élimination des doubles impositions. Ainsi, le nouvel article 25 A de la convention dispose : « Nonobstant toute autre disposition de la présente convention, les revenus qui sont imposables ou ne sont imposables qu’en Suisse conformément aux dispositions de la convention et qui constituent des revenus imposables d’un résident de France, sont pris en compte pour le calcul de l’impôt français lorsqu’ils ne sont pas exemptés de l’impôt français sur les sociétés ».

Ainsi, les bénéfices réalisés par un établissement stable suisse d’une société française, s’ils bénéficient d’un régime fiscal privilégié, devront ainsi être pris en compte pour le calcul de l’impôt français, alors même que la convention attribue à la Suisse le droit d’imposer ces revenus.

La même conséquence semblerait s’imposer lorsqu’une entreprise française est soumise aux dispositions de l’article 209 B du CGI à raison de la détention d’une filiale suisse bénéficiant d’un régime fiscal privilégié, au motif que le résultat bénéficiaire de cette filiale est, dans ce cas, réputé constituer un résultat de l’entreprise française, en proportion de ses droits financiers.

Cette double imposition est généralement éliminée par l’octroi d’un crédit d’impôt égal à l’impôt français, ce qui conduit à l’application d’une sorte de taux effectif.

Or, l’avenant prévoit que la double imposition afférente à des « revenus soumis à l’impôt français sur les sociétés visés à l’article 7 » de la convention de 1966 est éliminée par l’octroi d’un crédit d’impôt égal à l’impôt suisse effectivement payé. 

Ainsi, comme cela a été précisé dans le cadre des rapports présentés respectivement par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et par la commission des finances du Sénat lors de la procédure d’approbation de cet avenant, la combinaison de ces deux nouvelles règles rend les dispositions de l’article 209 B du CGI compatibles avec la convention franco-suisse. Nos voisins helvètes ne partagent pas cette analyse. 

1.2. La conception suisse 

La Suisse considère que l’article 25 A ne vise que certaines situations dans lesquelles le droit d’imposer est attribué exclusivement à la Suisse. Ce sont les cas prévus aux articles 8, 15-3, 21 et 24-3 de la convention, selon lesquels les revenus de source suisse d’un résident français sont attribués exclusivement à la Suisse, Etat de la source. Ceux-ci pourront être imposés par l’Etat français moyennant un crédit d’impôt en application de la nouvelle disposition. 

Selon les autorités helvétiques la disposition de l’article 25 A « ne sont imposables qu’en Suisse » ne vise que l’hypothèse où le droit d’imposer est attribué à la Suisse en tant qu’Etat de la source. 

Le but de l’article 25 A est de régler des conflits entre l’Etat de résidence, dans lequel le contribuable est assujetti à l’impôt de manière illimitée, et l’Etat de la source, dans lequel le contribuable est assujetti à l’impôt de manière limitée, ou encore entre deux Etats de source. Un conflit d’assujettissement illimité n’entrerait pas dans le champ d’application de l’article 25 A. 

Ainsi, lorsque la Convention attribue l’imposition exclusive à la Suisse en tant qu’Etat de résidence, ces revenus ne peuvent pas être imposés dans un autre Etat, sauf à ce qu’un établissement stable s’y trouve. Dans le cas d’une personne morale française détenant une filiale en Suisse, nous sommes en présence de deux personnes juridiquement distinctes et non d’un contribuable assujetti de manière illimitée dans son Etat de résidence et d’un éventuel rattachement à l’Etat de la source. 

L’imposition en France des bénéfices d’une filiale suisse, sans que celle-ci dispose d’un établissement stable en France, est prohibée par l’article 7-1 de la convention. 

L’avenant n’a pas modifié les dispositions de l’article 7-1 et la Suisse n’y voit nullement un moyen détourné d’appliquer le dispositif de 209 B aux filiales. La mise en œuvre de l’article 209 B par application de l’article 25 A doit être limitée aux établissements stables suisses détenus par des sociétés françaises. 

Au demeurant, et en dépit de la controverse sur l’interprétation de l’article 25A de la convention franco-suisse, le dispositif de l’article 209B a été profondément modifié suite à la décision Schneider Electric[22], de façon à ce qu’il soit conforme aux droits conventionnel et communautaire. 

2. Les assouplissements du nouveau dispositif 209B 

L’article 104 de la Loi de finances 2005 a modifié les articles 209 B et 238 A du CGI dans le but de mettre le dispositif en conformité avec les conventions fiscales internationales et le droit communautaire. L’administration a publié récemment son instruction commentant les nouvelles dispositions[23]

2.1. Un champ d’application étendu 

La taxation prévue à l’article 209 B I concerne les personnes morales établies en France, passibles de l’impôt sur les sociétés, qui exploitent une entreprise hors de France ou détiennent directement ou indirectement plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique établie ou constituée hors de France, si celle-ci est soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238 A. 

2.1.1. Champ personnel 

Entités françaises 

Alors que l’ancien article 209 B s’appliquait aux « personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés », le texte vise aujourd’hui « les personnes morales établies en France et passibles de l’impôt sur les sociétés ». Sont désormais ainsi visés les établissements et succursales situés en France d’une personne morale dont le siège est situé hors de France lorsque les droits représentatifs de la participation dans la structure établie hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié sont inscrits à l’actif du bilan fiscal de cet établissement. 

Le seuil de détention a été largement revu à la hausse, puisque est désormais exigée la détention, directement ou indirectement, de plus de 50 % des actions, parts, droits de vote ou droits financiers dans une entité juridique étrangère, contre 10% auparavant. 

Une clause anti-abus ramène le seuil à 5 % lorsque plus de 50 % des titres sont détenus : 

– soit par des entreprises établies en France ; 

– soit par des entreprises placées directement ou indirectement dans une situation de contrôle ou de dépendance au sens de l’article 57 du CGI à l’égard de la personne morale établie en France. 

Le décret d’application de l’article 209 B[24] apporte deux précisions :

– Pour déterminer le pourcentage de détention il faut additionner les droits détenus directement par la personne morale et ceux détenus indirectement, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’une chaîne de participations ou d’une communauté d’intérêts[25].

– Le seuil de participation de 50 % est apprécié au jour de la clôture de l’exercice de l’entité juridique établie hors de France ou, si elle est plus élevée, c’est la participation détenue pendant au moins 183 jours au cours de cet exercice qui est retenue. 

Ainsi, la délocalisation de bénéfices en Suisse pour une entité française demeure envisageable dès lors que cette dernière veille à ce que sa participation demeure inférieure à 50%, ce qui ouvre des perspectives plus attrayantes qu’auparavant, d’autant que les mesures anti-fractionnement devraient être interprétées strictement. 

Entités étrangères 

Les dispositions de l’article 209 B, I du CGI sont susceptibles de s’appliquer si la structure établie hors de France est une entreprise ou une entité juridique soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238 A du CGI. 

Sont ainsi visés les bénéfices réalisés par une entreprise étrangère (établissement stable, représentants, cycle commercial complet) ou réputés distribués par une entité juridique (sociétés de capitaux, de personnes, organismes, fiducies ou institutions comparables). 

Jadis définie par la jurisprudence et la doctrine administrative, la notion de régime fiscal privilégié est désormais caractérisée par l’article 238 A du CGI dès lors que le montant des impôts sur les bénéfices ou sur les revenus auxquels est soumise la structure est inférieur de plus de la moitié (contre plus de 2/3 auparavant) à celui dont elle aurait été redevable en France dans les conditions de droit commun. Cette modification tend à élargir le champ des pays à fiscalité privilégiée, mais les relations franco-suisses ne devraient pas être bouleversées, tant l’optimisation fiscale s’organise souvent autour de holdings totalement exonérées ou de « société de domicile » au régime très favorable.  Il est à noter que la comparaison des taux doit être effectuée année par année, et de façon objective, en tenant compte des régimes de faveur dont aurait pu bénéficier la structure en France. 

2.1.2. Champ d’application personnel 

Revenus réalisés par une entité juridique étrangère 

Les revenus dégagés par une entité juridique étrangère détenue par une personne morale établie en France sont réputés constituer des revenus de capitaux mobiliers imposables par cette dernière. 

Cette qualification permet de contourner la jurisprudence Schneider qui avait jugé le dispositif de 209 B incompatible avec les dispositions conventionnelles de l’article 7-1. 

Réputés constituer des revenus de capitaux mobiliers, les bénéfices réalisés par la structure étrangère n’entrent pas dans le champ de l’article 7 « bénéfices de l’entreprise » réservant l’imposition à l’Etat dans lequel est située l’entreprise. Il n’y a plus identité de nature entre les revenus. Ceux-ci n’entrent pas plus dans le champ de l’article 10 « revenus de capitaux mobiliers » car ils ne font pas l’objet d’un paiement effectif. Dès lors, leur imposition relève de la catégorie « autres revenus » insérée à l’article 23 de la convention,et ils sont imposables dans l’Etat de résidence de la personne bénéficiaire. En outre, les revenus de capitaux mobiliers ne bénéficient pas du régime des sociétés mères dès lors qu’ils ne sont pas effectivement versés à cette dernière. 

Revenus réalisés par un établissement stable étranger 

Les revenus dégagés par un établissement stable étranger détenu par une personne morale établie en France constituent des bénéfices imposables par cette dernière. Ils sont donc taxables dans la catégorie « bénéfices de l’entreprise » à l’article 7-1 de la convention. Le droit d’imposer est en principe attribué à l’Etat dans lequel se situe cet établissement. Cependant, l’article 25 A de la convention franco-suisse permet à l’Etat de résidence de la société mère française d’imposer les revenus réalisés par un établissement situé en Suisse dès lors qu’elle accorde un crédit d’impôt. 

2.1.3. Liquidation 

« Les bénéfices ou revenus positifs » d’une entité étrangère soumise à un régime fiscal privilégié qui entre dans le champ d’application de 209 B sont imposables à l’impôt sur les sociétés françaises à hauteur des droits détenus dans cette entité par la société française. 

L’imposition est désormais globale : la société française peut imputer sur ses propres déficits les bénéfices de sa filiale soumise à un régime fiscal privilégié. La réciproque est bien entendu prohibée : les déficits de la filiale ne sont pas imputables sur les bénéfices de la société mère. 

2.2. La nouvelle clause de sauvegarde 

La clause de sauvegarde[26] permet d’échapper à l’application de l’article 209 B et de voir les revenus de ses établissements étrangers être rapatriés en France. Elle est instituée au profit des entreprises ou entités juridiques exploitées ou détenues dans un Etat situé en dehors de la Communauté européenne qui tirent leurs bénéfices de l’exercice d’une activité industrielle ou commerciale effective et exercée sur le territoire de l’Etat de son établissement ou de son siège. 

Pour bénéficier de cette clause il n’est plus nécessaire d’exercer son activité de façon prépondérante sur le marché et de vendre plus de 50% de ses produits ou services dans l’Etat de localisation de l’entité. La seule mise en œuvre par l’entité étrangère de moyens matériels et humains pour exercer son activité permet d’échapper à l’application de l’article 209 B, sous réserve du respect par l’entité française de certaines obligations déclaratives[27]

Sont néanmoins exclues du bénéfice de la clause d’exonération les entreprises ou entités qui n’ont aucune implantation réelle dans le pays où elles sont situées et qui n’y réalisent pas d’opérations formant un cycle commercial complet. 

La clause d’exonération automatique ne s’applique pas, même si l’entité étrangère exerce une activité industrielle et commerciale, si une certaine proportion de ses revenus provient d’opérations financières ou de prestations intra-groupe. 

En premier lieu, la société française reste dans le champ d’application de l’article 209B lorsque les revenus de l’entité juridique étrangère proviennent pour plus de 20 % d’opérations sur actifs financiers[28] ou incorporels[29]

En second lieu, la société française reste dans le champ d’application de l’article 209 B lorsque les revenus de l’entité juridique étrangère proviennent pour plus de 50 % d’opérations sur actifs financiers ou incorporels citées supra et de la fourniture de prestations de services internes à un groupe d’entreprises avec lequel la personne morale entretient des relations de contrôle ou de dépendance. 

Dans l’hypothèse où l’administration fiscale parvient à démontrer que les revenus passifs ou les services internes de l’entité étrangère représentent selon les cas plus de 20% ou 50% de son bénéfice total, l’article 209 B retrouve sa plénitude. L’administration précise que c’est alors la totalité des revenus de l’entité étrangère qui est imposée en France à hauteur du taux de détention par la société française. Les seuils servent à déclencher l’application de l’article 209B, ils ne fixent pas l’assiette imposable en France. 

Il convient enfin de noter une précision bienvenue de l’instruction du 16 janvier 2007 : si la personne morale française établit que les opérations de la société étrangère ont principalement un effet autre que de permettre la localisation de bénéfices dans un Etat ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié, l’article 209B ne s’applique pas. Ainsi, peut-on imaginer, s’agissant par exemple d’un établissement bancaire français exerçant une activité financière via une succursale suisse, que celui-ci puisse démontrer l’effet autre que principalement fiscal, en expliquant que cette succursale est établie sur une place financière reconnue au niveau international et qu’elle dispose des moyens humains et matériels nécessaires à la conduite des opérations concernées. 

Les délocalisations de bénéfices vers le paradis helvète se poursuivent. Toutefois, les pressions conjuguées d’organismes supranationaux conduisent à légitimement  s’interroger sur leur pérennité. Et les entreprises candidates ne s’en privent pas, à l’instar d’Amgen, leader mondial des biotechnologies, qui a préféré l’Irlande à la Suisse. La Suisse demeure néanmoins un refuge de choix pour les contribuables fortunés du monde entier. 

II. Un essor des délocalisations de patrimoines ? 

1. La difficulté à quantifier l’exil fiscal 

Cette question, d’une rebutante technicité statistique, sera simplement abordée tant son traitement exhaustif ne trouverait pas la place dans le cadre forcément restreint du présent article. 

Lorsque, en 1999, la direction générale des impôts (DGI) au sujet des « délocalisés de l’ISF », a révélé que 350 redevables de l’ISF partaient chaque année à l’étranger, un observatoire des délocalisations chargé d’analyser les flux de départs de contribuables assujettis à l’ISF a été créé : dès lors qu’un centre des impôts a connaissance du transfert hors de France du domicile d’un redevable à l’ISF, il en informe cet observatoire. Environ 33.600 contribuables se seraient ainsi délocalisés en 2002 mais ces départs sont a priori motivés par des considérations d’ordre professionnel ou privé, sans que la part de la contrainte fiscale dans ce choix puisse être évaluée. 

Au demeurant, la tendance est à l’accélération du phénomène d’expatriation fiscale puisque les dernières estimations font état du départ de 2 contribuables chaque jour (649 « délocalisations » en 2005, selon la DGI). Cette évaluation demeure largement contestable. Les chiffres avancés par Bercy font sourire de nombreux professionnels du secteur, tel Edouard Chambost, qui parle d’une sous-évaluation de l’ordre de 1 pour 10. 

Les contribuables résignés à l’exil fiscal ont en moyenne seulement 53 ans contre 66 ans pour l’ensemble des redevables de l’ISF[30]. En outre, selon le cabinet d’avocats CMS-Bureau Francis Lefebvre, le seuil de richesse à partir duquel les patrons français envisagent de partir a été divisé par 5 entre 2002 et 2007. 

On constate donc une accélération des départs très préoccupante, puisqu’elle ne concerne plus exclusivement les fortunes « oisives » : l’expatrié fiscal en 2007 est  beaucoup plus jeune qu’il y a 10 ans et beaucoup moins fortuné. La perte pour l’Etat français ne se résume pas à la disparition immédiate de bases imposables à la TVA, l’IRPP ou l’IS, elle se chiffre en emplois (et donc en cotisations sociales) que les entrepreneurs exilés vont créer sous des cieux plus cléments. 

La difficulté à quantifier l’exil fiscal rend toute évaluation de son coût hasardeuse. Si l’on s’en tient aux chiffres publiés par la DGI (et donc à une évaluation optimiste), avec un patrimoine moyen de 9,29 millions d’euros, l’exil de 20 000 foyers en Suisse du fait de l’ISF correspond à un exode fiscal de près de 190 milliards d’euros de capitaux. Il va sans dire que les recettes de l’ISF ne compensent pas le cinquième du manque à gagner fiscal de cet exode[31]. 

2. Les critères de rattachement 

Les critères de rattachement des personnes physiques à la souveraineté d’un Etat sont de nature à générer des conflits d’allégeance fiscale. Schématiquement, on peut isoler trois grands types d’allégeances fiscales. 

– L’allégeance politique est celle fondée sur la nationalité. Ainsi quel que soit son lieu de résidence, le citoyen américain est pour partie imposable aux Etats-Unis. L’application de ce type de principe d’allégeance nécessite pour l’Etat qui y recourt de disposer de moyens techniques et stratégiques de nature à le légitimer aux yeux des nationaux. 

– L’allégeance économique réside dans le lien qu’entretient un contribuable au plan économique avec un Etat ou un pays. La personne participant à l’activité économique en retire des fruits en contrepartie desquels elle doit payer l’impôt quelle que soit sa nationalité ou son lieu d’établissement. Ainsi, une entreprise étrangère devra payer l’impôt sur les bénéfices de l’activité déployée dans le pays même par une implantation secondaire. Une personne physique résident à l’étranger mais ayant le centre de ses intérêts économiques en France, y sera imposable. 

– L’allégeance sociale se fonde sur un lien entre la personne et la Sté : séjour, présence dans le corps social. La célèbre règle des 183 jours en est l’illustration. 

2.1. Le rattachement à la Suisse 

Aux trois grands types d’allégeances fiscales (politique, économique et sociale), la Suisse préfère des critères suis generis. Les personnes assujetties à l’impôt en Suisse de façon illimitée sont en premier lieu celles qui ont leur domicile fiscal en Suisse, c’est-à-dire celles qui résident en Suisse avec l’intention de s’y établir durablement ou celles qui y ont un domicile légal spécial en vertu du droit fédéral. 

Le séjour en Suisse peut également fonder l’assujettissement si la personne concernée, sans interruption notable, réside en Suisse pendant 30 jours au moins et y exerce une activité lucrative, réside en Suisse pendant 90 jours au moins sans y exercer d’activité lucrative. 

2.2. Le dispositif conventionnel 

La convention fiscale franco-suisse se distingue du modèle de convention OCDE par les critères successifs retenus pour trancher un éventuel conflit de résidence. Ces critères sont les suivants : 

– lorsqu’une personne est considérée comme résident de chacun des Etats, elle est réputée résident de celui des deux Etats sur le territoire duquel elle dispose d’un foyer d’habitation permanent, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c’est-à-dire le lieu où ses relations personnelles sont les plus étroites[32] ;

si elle ne dispose d’un tel foyer dans aucun des deux Etats signataires ou si le centre de ses intérêts vitaux ne peut être déterminé, elle est considérée comme résident de l’Etat où elle séjourne de façon habituelle ;

– si elle séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun des Etats, elle est considérée comme résident de l’Etat  dont elle a la nationalité et en cas de conflit persistant, il est fait recours aux autorités compétentes. 

Le premier critère du foyer d’habitation permanent au sens du centre des intérêts vitaux est étranger au modèle OCDE, qui distingue ces deux notions. De plus, alors que le critère du centre des intérêts vitaux se réfère, dans le modèle OCDE, au centre des intérêts personnels et économiques, il ne se réfère qu’aux seuls intérêts personnels dans la convention. Ainsi, même si dans la plupart des cas les deux centres sont au même endroit, la volonté des signataires a été de déterminer le domicile en fonction de critères liés à la personne du contribuable et non à son patrimoine. Au demeurant, le critère du « centre des intérêts vitaux » demeure fortement subjectif, en l’absence de critères uniformes, déterminés à l’avance et applicables à l’ensemble des litiges. 

En agrégeant les différents critères précités, l’appréciation du domicile fiscal d’un particulier peut être synthétisée dans le tableau suivant : 

Critères du domicile en France (CGI, art. 4 B) Critères du domicile en Suisse Critères du domicile selon la convention conclue entre la France et la Suisse[33]
1 – Foyer (habitation permanente, où réside la famille); OU 1 – Domicile (avec intention de s’établir durablement)[34] 1 – Foyer d’habitation permanent (centre des intérêts affectifs, Etat avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites). Ce critère s’attache à la personne du contribuable et non à son patrimoine; OU, à défaut,
2 – Lieu de séjour principal[35] (séjour supérieur à 6 mois); OU 2 – Séjour dans le canton (pendant 30 ou 90 jours sans interruption notable, selon que le contribuable y exerce ou non une activité lucrative)[36] 2 – Lieu de séjour habituel; OU, à défaut,
3 – Exercice de la profession principale en France (profession à laquelle le contribuable consacre le plus de temps, ou profession générant les revenus les plus importants); OU   3 – Etat dont le contribuable possède la nationalité; OU, à défaut,
4 – Centre des intérêts économiques (lieu de réalisation des principaux placements, d’administration des biens etc.) 4 – Accord entre les Etats pour éviter la double imposition

 

3. La difficulté à combattre l’exil fiscal des patrimoines  

3.1. Les régimes d’impositions offerts par la Suisse 

Avec une fiscalité des revenus et de la fortune des personnes et des entreprises de compétence cantonale, la Suisse connaît une grande disparité de ses régimes fiscaux. C’est bien l’imposition forfaitaire qui séduit les contribuables étrangers. 

Le régime ordinaire, appliqué aux nationaux suisses tout comme aux résidents permanents n’ayant pas opté pour l’imposition forfaitaire, frappe à la fois les revenus et la fortune du contribuable. S’agissant de l’impôt sur le revenu, il convient de distinguer l’impôt fédéral direct (IFD), prélevé au profit de la confédération, et les impôts prélevés pour les cantons et les communes (ICC). Le taux d’imposition variera d’un canton à l’autre et même d’une commune à l’autre.

L’impôt sur la fortune est prélevé en même temps que l’impôt sur le revenu mais il bénéficie uniquement aux cantons et communes. Ces deux impôts ont des barèmes progressifs. 

Si l’on compare l’imposition en Suisse et en France d’un couple marié sans enfant ayant 2  000 000 CHF (1 273 885 Euros) de revenus nets par an et 10 000 000 CHF (6 369 427 Euros) de patrimoine imposable à l’ISF :

– En France, 612 322 Euros seront dus au titre de l’impôt sur le revenu et 59 973 Euros au titre de l’ISF, soit un total de 672 295 Euros.

– A Genève et dans son canton, 737 885 CHF seront dus au  titre de l’ICC et 230 000 CHF au titre de l’IFD, soit un total de 967 885 CHF (616 487 Euros).

Une économie d’impôt de 56 000 Euros est donc réalisée, ce qui, au regard des revenus retenus pour les besoins de l’exemple, n’est pas loin d’être négligeable…

L’imposition forfaitaire concerne l’impôt fédéral direct et l’impôt cantonal et communal, tant en ce qui concerne l’impôt sur le revenu que sur la fortune. Il peut uniquement s’appliquer aux étrangers domiciliés en Suisse et n’y exerçant aucune activité lucrative. Le contribuable étranger résidant en Suisse et remplissant les trois conditions susmentionnées peut alors, dans certains cantons, être imposé d’une manière forfaitaire. 

L’originalité de ce régime d’imposition consiste dans le fait que sa base ne sera plus constituée par les revenus et la fortune mais par les dépenses du contribuable. 

Les barèmes d’impôts sont les mêmes que ceux des impôts ordinaires, mais ils seront appliqués sur une évaluation du train de vie du contribuable. 

Le forfait se négocie directement avec l’administration compétente. Le canton de Genève ne prend en compte que la valeur du loyer ou, en cas d’acquisition, sa valeur théorique qu’établit l’administration de façon forfaitaire. Dans les cantons du Valais et de Vaud, la valeur locative annuelle est établie à 3% de la valeur du bien acquis. Le forfait se négocie ainsi sur la base de cinq fois le loyer annuel, avec des minimas pour chaque canton[37].  Ainsi, l’impôt sera appliqué à ce montant, sensé correspondre aux dépenses annuelles du contribuable, et non sur ses revenus ou son patrimoine. Il est à noter qu’une personne à l’impôt à forfait en Suisse n’a pas la qualité de résident de Suisse au sens de l’article 4 de la convention, sauf à ce que soient réunies les conditions suivantes[38]:

– La base d’imposition fédérale, cantonale et communale, est supérieure à cinq fois la valeur locative de l’habitation du contribuable ou à une fois et demi le prix de pension qu’il paie,  

– La base d’imposition cantonale et communale ne s’écarte pas notablement de celle qui est déterminante pour l’IFD (Impôt fédéral direct), ladite base cantonale et communale devant, en tout état de cause, être égale ou supérieure aux éléments du revenu du contribuable qui proviennent de Suisse et de France, pour les revenus de source française, lorsqu’ils sont privilégiés par la convention, notamment dividendes, intérêts, redevances de licences. 

En pratique, afin d’éviter d’être repris par l’administration française, il est fait application d’une majoration de 30% sur le forfait obtenu. 

3.2 Les mesures visant à diminuer l’expatriation fiscale 

En 1998, le gouvernement socialiste, confronté à la fuite des capitaux provoquée par le rétablissement de l’ISF, avait  instauré un mécanisme qu’il croyait radical : si un contribuable changeait de domicile fiscal pour aller s’installer à l’étranger, il devait acquitter un impôt de 16% (soit 27%, CSG et CRDS incluses) sur les plus-values latentes sur les titres de sociétés françaises qu’il possédait au moment de son départ. Cette mesure, fortement dissuasive puisque s’appliquant à des plus-values qui n’avaient pas été réalisées, constituait une entorse grave à l’article 12 du Code Général des Impôts qui dispose que « l’impôt est dû chaque année sur les bénéfices réalisés au cours de la même année ». 

La Cour de Justice des Communautés Européennes a rendu une décision relative à la compatibilité du dispositif français avec le droit communautaire[39]. Selon les juges européens, « le principe de liberté d’établissement posé par l’article 43 du traité instituant la Communauté Européenne doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un Etat membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values non encore réalisées, tel que celui prévu à l‘article 167 bis du Code Général des Impôts français, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet Etat. » 

Est-il en effet nécessaire de rappeler que l’un des objectifs du Traité de Rome était de parvenir à l’abolition, entre les Etats membres, des obstacles à la libre circulation des personnes, des services et des capitaux [40]

Le gouvernement français s’est pour une fois empressé de tirer toutes les conséquences de cet arrêt en abrogeant le dispositif condamné[41]. Cette abrogation dépasse même le cadre de la condamnation de Bruxelles  puisque, dorénavant, tout résident et contribuable français est libre de partir s’installer n’importe où dans le monde (et pas seulement au sein de l’Union Européenne) sans avoir à acquitter auparavant l’impôt sur les plus values latentes. On comprend dès lors que la disparition « extensive » de ce dispositif contribue à encourager à l’exil vers la Suisse, pays non membre de l’Union Européenne ou de l’Espace Economique Européen… 

Toutefois, si la loi de finances pour 2005 a abrogé les articles 167, 1 bis et 167 bis du CGI, au profit des contribuables qui partent de France à compter du 1er janvier 2005, quel que soit le pays de destination, les personnes qui avaient quitté la France entre le 9 septembre 1998 et le 1er janvier 2005 restaient assujetties à l’exit tax. En pratique, l’administration fiscale a accepté de dégrever l’impôt et de restituer les garanties en présence de plus-values latentes, appliquant donc d’office la jurisprudence Lasteyrie du Saillant. Pour les plus-values de report, un dispositif de dégrèvement a été institué par loi de finances pour 2005, mais son champ d’application géographique (l’Espace Economique Européen) exclut la Suisse [42]

A l’égard de la Suisse, l’exit tax est donc morte à ce jour, mais les conséquences de sa disparition n’ont pas été pleinement prises en compte pour le passé. Au demeurant, l’abrogation de ce dispositif ne s’imposait pas vis-à-vis de nos voisins helvétiques : l’histoire ne dit pas si le législateur en avait pleinement conscience, de sorte que l’abrogation pure et simple du l’exit tax peut s’interpréter comme une politique économique assumée ou comme une décision fondée sur une fausse interprétation juridique. 

Lors de la dernière campagne présidentielle, le non-évènement de l’exil d’un chanteur populaire a ému nombre de candidats, et la proposition d’un impôt citoyen, fondé sur une allégeance quasi-politique a été formulée par Dominique Strauss-Kahn, Didier Migaud et François Marcs. Cette piste abandonnée, la réflexion sur la licéité au regard du principe de libre circulation des personnes et des biens d’un tel système demeure entière : les expatriés fiscaux américains, au-delà d’un certain niveau de revenus (82400 euros pour 2006) doivent en effet s’acquitter d’une contribution outre atlantique bien qu’ils soient résidents d’un autre Etat. 

La loi TEPA43 a entériné le principe d’un bouclier fiscal à 50% pour lutter positivement contre les délocalisations de patrimoines. Cauteleuse par expérience, la majorité des français exilés en Suisse souhaiterait voir sa contribution aux dépenses publiques mise quelque peu à l’écart de l’appétit et de la contingence des politiques publiques, peut être par le truchement d’une constitutionnalisation.

La Suisse a progressivement perdu cette dévotion profondément libérale pour la discrétion et la liberté: elle demeure paradis bancaire, mais refuge pour gens de bonne compagnie. Rançon de son succès disent certains, préalable à un destin funeste regrettent d’autres, cette mutation du centre off shore suisse dépendra certainement de l’évolution de la construction européenne, vis-à-vis de laquelle nos voisins helvètes font preuve d’une grande attention. 

Assurément, la fin du paradis fiscal helvète est d’ores et déjà intervenue : avec une coopération internationale avérée, une croissance même modérée du poids de ses prélèvements fiscaux et un développement indéniable d’instruments de contrôle des activités financières, le Suisse est rentrée dans le rang. Certes, la Suisse est multiple et des cantons comme Zoug (sociétés holdings) ou Vaud (imposition au forfait des personnes physiques) conservent leurs best sellers fiscaux, ce qui rend hâtives toutes conclusions définitives. Mais l’exception fiscale helvète n’est plus. Demeurent néanmoins ces autres atouts : expertise bancaire et financière, stabilité politique et situation géographique. 

En quête d’un refuge fiscal, nombre d’entreprises et de particuliers franchissent les Alpes. Ils constatent bien souvent que le territoire helvète n’est paradisiaque dans des secteurs isolés. Au terme de cette randonnée dans le système bancaire et fiscal helvète, un constat s’impose : lorsque la fiscalité n’a pour seule idéologie que l’efficacité économique, elle (r)apporte beaucoup sans atteindre des sommets. 

 

Bertrand Lacombe

Elève-Avocat

ESSEC MBA

Master 2 Droit des affaires et fiscalité

Université Paris II Panthéon-Assas

IEP Toulouse

Chargé d’enseignement à l’Université Paris II Panthéon-Assas

 

[1] Arnaud Montebourg, Libération, lundi 15 janvier 2007.

[2] C’est le cas notamment d’Attac : Attac, Les paradis fiscaux, Paris : Mille et une nuits, 2001, pp. 5-6.

[3] L’appréciation de l’importance de la pression fiscale d’un pays est par essence synonyme de contingence. Au demeurant, sur les 86 pays passés en revue par le cabinet d’audit KPMG, la Suisse se situe au 13e rang pour l’imposition des entreprises, étant précisé que les paradis fiscaux notoires comme les Iles Cayman ou les Bermudes, à la fiscalité quasi-nulle, n’ont pas été pris en compte. La société d’audit précise dans son étude qu’avec son taux moyen d’imposition des profits des sociétés à 21,3% (28% en 1993), la Suisse se situe à «un niveau intermédiaire». Mis à part Chypre et l’Irlande, les 10 premiers rangs du classement sont trustés par les pays de l’Europe de l’Est.

[4] Hors régimes particuliers (forfait..), les taux de prélèvements « sur les traitements et salaires  des particuliers varient entre 28 et 45 %, selon le montant imposé et le canton de résidence. Les successions sont réglées avec un prélèvement de 6 %. Les revenus et les plus-values financières ne sont pas imposés. L’impôt sur la fortune est d’environ trois pour mille. Les taxes locales sont intégrées dans les prélèvements sur le revenu. ». In Duhamel Grégoire, Les paradis fiscaux, éd. Grancher, 2006, p. 303.

[5] Article 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse : «Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Constitution fédérale, et, comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués à la Confédération.»

[6] Article 133 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse.

[7] Article 134 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse.

[8] Chiffres de l’administration fédérale des contributions.

[9] Par ailleurs, la littérature consacrée à l’expatriation fiscale ne considère pas la Suisse comme un paradis fiscal, mais « un pays en général d’imposition moyenne, voire basse dans certains cantons et d’incitation dans celui de Vaud » (Chambost Edouard, « Guide des paradis fiscaux », éd. Favre, 8e éd.). Pour Grégoire Duhamel, « si le secret bancaire est une spécificité rattachant la Suisse à ce que le grand public nomme « paradis fiscal », sa fiscalité domestique est, elle, tout à fait comparable, hélas, aux taux européens » (Duhamel Grégoire, Les paradis fiscaux, éd. Grancher, p. 292). De même, dans le mémento  paradis fiscaux et opérations internationales » des éditions Francis Lefebvre, la Suisse n’apparaît pas sous le titre « paradis fiscaux », mais sous celui de « régimes privilégiés », aux cotés des zones franches urbaines notamment.

[10] CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02, Hughes de LASTEYRIE DU SAILLANT c/ Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Voir également : L’exit tax à l’épreuve de la jurisprudence CJCE, Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » N° 136 (Année 2004) .

[11] Directive 2003/48/CE du Conseil, du 3 juin 2003, en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts.

[12] Sur cette coopération, voir : LANZ Kathrin, Fiscalité de l’épargne : introduction de « mesures équivalentes » en Suisse, Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires », année 2002.

[13] Article 13.

[14] Article 47 : « celui qui agit en sa qualité de membre d’un organe, d’employé, de mandataire, de liquidateur ou de commissaire de banque, d’observateur de la Commission fédérale des banques, ou encore de membre d’un organe ou d’employé d’une institution de révision agréée, n’a pas le droit de révéler un secret qui lui a été confié ou dont il a eu connaissance en raison de sa fonction (…) ».

[15] Art.305.bis du code pénal (blanchiment).  « Celui qui aura commis un acte propre à entraver l’identification de l’origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales dont il savait ou devait présumer qu’elles provenaient d’un crime, sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. »

[16] Art.305 ter du code pénal (défaut de vigilance) « Celui qui, dans l’exercice de sa profession, aura accepté, gardé en dépôt ou aidé à placer ou à transférer des valeurs patrimoniales appartenant à un tiers et qui aura omis de vérifier l’identité de l’ayant droit économique avec la vigilance que requièrent les circonstances, sera puni d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire.

Les personnes visées par l’al. 1 ont le droit de communiquer aux autorités suisses de poursuite pénale et aux autorités fédérales désignées par la loi les indices fondant le soupçon que des valeurs patrimoniales proviennent d’un crime. »

[17] Art. 322 septies du Code pénal (Corruption d’un fonctionnaire) : « Celui qui aura offert, promis ou octroyé un avantage indu à une personne agissant pour un Etat étranger ou une organisation internationale en tant que membre d’une autorité judiciaire ou autre, en tant que fonctionnaire, en tant qu’expert, traducteur ou interprète commis par une autorité, ou en tant qu’arbitre ou militaire, en faveur de cette personne ou d’un tiers, pour l’exécution ou l’omission d’un acte en relation avec son activité officielle et qui soit contraire à ses devoirs ou dépende de son pouvoir d’appréciation.

Celui qui, agissant pour un Etat étranger ou une organisation internationale en tant que membre d’une autorité judiciaire ou autre, en tant que fonctionnaire, en tant qu’expert, traducteur ou interprète commis par une autorité, en tant qu’arbitre ou militaire, aura sollicité, se sera fait promettre ou aura accepté, en sa faveur ou en faveur d’un tiers, un avantage indu pour l’exécution ou l’omission d’un acte en relation avec son activité officielle et qui soit contraire à ses devoirs ou dépende de son pouvoir d’appréciation, sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. »

[18] Tout savoir sur la Place financière de Genève, Genève, Fondation Genève place financière, 1998, pp 6 et 14-15.

[19] Accord intégré dans les Bilatérales II.

[20] TA Paris 21 novembre 1995 n° 92-7093, 1e sect., 1e ch., Sté Schneider : RJF 2/97 n° 123 ; TA Strasbourg 12 décembre 1996 n° 91-58, 5e ch., Sté Strafor Facom : RJF 2/97 n° 124 ; TA Poitiers 25 février 1999 n° 96-684, 2e ch., SA Rémy Cointreau : RJF 7/99 n° 847.

[21] Inst. 6 mars 1992, 4 H-9-92 reprise par Inst. 17 avril 1998, 4 H-3-98 n° 11. 

[22] Voir Gutmann Daniel, « L’attribution du revenu en droit fiscal international, point de vue franco-suisse sur l’arrêt société Schneider Electric du 28 juin 2002 », revue de droit des affaires internationales, 2002, n°8, p911 à 921.

[23] Inst. 16-1-2007, 4 H-1-07. Cette instruction est globalement conforme au projet mis en ligne en mai 2006, à l’exception notable du §130 relatif aux plus-values réalisées par l’entité étrangère.

[24] Article 1er du décret 2006-1309 du 25 octobre 2006, codifié à l’article 102 SA, II de l’annexe II au CGI.

[25] Article 102 SA de l’annexe II au CGI.

[26] Article 209B III du CGI.

[27] Articles 102 Z à 102 ZB de l’annexe II au CGI.

[28] Les Opérations sur actifs financiers sont des opérations de gestion, de maintien ou d’accroissement de titres, participations, créances ou actifs analogues procurant des revenus de capitaux mobiliers (dividendes, intérêts) et des plus-values financières.

[29] Les Opérations sur actifs incorporels correspondent aux revenus issus de la cession ou de la concession de droits incorporels relatifs à la propriété industrielle, littéraire ou artistique telles que les redevances rémunérant la concession de l’usage d’un brevet, d’une marque, d’un dessin… les plus-values tirées de la cession d’actifs incorporels. 

[30] Rapport de l’assemblée nationale n°3246.

[31] Patrick Artus, Directeur de la recherche et des études d’IXIS-CIB, affirme que « l’ISF coûte en seule TVA non perçue deux fois ce qu’il rapporte ».  Les 200 milliards d’euros épargnés par des français à l’étranger seraient à l’origine d’un différentiel de croissance avec nos voisins allemands ou britanniques de l’ordre de 0,2% du PIB.

[32] La détermination de l’Etat de résidence par application du centre des intérêts vitaux au sens de l’article 4, 2 de la convention franco-suisse a fait l’objet très récemment d’un arrêt remarqué : CE , 12 janvier 2005, Latecoère.  Voir notamment : DONNAT Francis, Que recouvre la notion de « foyer d’habitation permanent » utilisée par la convention franco-suisse pour définir le pays de résidence fiscale du contribuable ?, Bulletin des Conclusions Fiscales 4/05.

[33] Convention conclue le 9 septembre 1966 en vue d’éviter les doubles impositions. Il y a lieu d’appliquer cette convention lorsque le contribuable est résident de chacun des deux Etats en application de leurs droits internes respectifs. En d’autres termes, la convention s’applique lorsqu’il existe une situation de double résidence au sens des droits internes des deux pays, et vise alors à éviter une situation de double imposition en octroyant à l’un des deux Etats le droit d’imposer.

[34] L’administration cantonale peut utiliser un faisceau d’indices, tels la situation administrative du contribuable, le paiement des factures …

[35] Ce critère ne joue que lorsque le foyer du contribuable n’a pu être déterminé. Ainsi, s’il est établi que le contribuable dispose d’un foyer en Suisse, le critère du lieu de séjour principal ne peut être appliqué, et il faut passer à l’examen du critère n°3.

[36] Le retour en France les week-end n’est pas une interruption notable.

[37] 350 000 CHF à Genève, 250 000 CHF dans le canton de Vaud et  150 00 CHF dans le canton du Valais.

[38] D. adm. 14 B-2211 n° 7, 10 décembre 1972.

[39] CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02, Hughes de LASTEYRIE DU SAILLANT c/ Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Voir également : L’exit tax à l’épreuve de la jurisprudence CJCE, Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » N° 136 (Année 2004).

[40] L’article 43 du traité instituant la Communauté Européenne dispose que « les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un Etat membre dans le territoire d’un autre Etat membre sont interdites » et que « la liberté d’établissement comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises ».

[41] L’article 19 de la loi de finances 2005 abroge l’article 167.1.bis du CGI et l’article 167.bis à compter du 1 janvier 2005.

[42] Voir notamment : Hervé LE HERISSEL, Bulletin Général de Fiscalité des Entreprises 1/05 : « Exit tax : un épilogue soigneusement circonscrit ».

43 Loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat

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