MAJ Premier Semestre 2004

 

THEME I – Entrée en vigueur de la directive fiscalite de l’epargne

 

Pour rappel, l’application de la directive suppose que tous les États membres fournissent des informations à d’autres États membres concernant les paiements d’intérêts à des non résidents. Cette approche reflète la tendance constatée au niveau international vers une intensification de la coopération administrative et de l’échange d’informations entre les administrations fiscales.

C’est bien en fait l’objectif ultime de cette directive. Il ne s’agit pas d’une harmonisation de la fiscalité européenne de l’épargne, mais bien de la mise en place d’un système d’échange de renseignements. Le seul objectif de cette directive est d’assurer que les États membres disposent des informations suffisantes leur permettant d’appliquer à leurs propres résidents le taux d’imposition qu’ils jugent approprié.

Comme on le sait, la Belgique, le Luxembourg et l’Autriche ne mettront en oeuvre un échange d’informations que si la Communauté européenne conclut un accord, à l’unanimité au sein du Conseil, avec la Suisse, le Liechtenstein, Saint-Marin, Monaco et Andorre, accord visant à échanger des informations exclusivement sur demande. Ils devront également continuer à appliquer en même temps la retenue à la source.

Les négociations avec les pays tiers ont-elles suffisamment avancé, notamment sur la question de l’échange de renseignements, pour permettre l’entrée en vigueur de la directive.

 

Reprenons ci-après les dernières évolutions annoncées par la Commission.

L’Union européenne et la Suisse ont négocié un accord de coopération. Cet accord prévoit le paiement de la retenue à la source dans les mêmes proportions que pour la Belgique, l’Autriche et le Luxembourg. Le taux de cette retenue d’impôt est de 15 % au cours des trois premières années à compter de la date d’application du présent accord, de 20 % au cours des trois années suivantes et de 35 % ensuite.

En ce qui concerne l’échange de renseignements, les autorités compétentes de la Suisse et de tout État membre échangent des renseignements sur les comportements constitutifs de fraude fiscale au regard de la législation de l’État requis, ou d’une infraction équivalente concernant des revenus couverts par l’accord.

Par « infraction équivalente », on entend uniquement une infraction du même degré de gravité que dans le cas de la fraude fiscale au regard de la législation de l’État requis. En réponse à une requête dûment justifiée, l’État requis communique des renseignements sur les matières faisant l’objet ou susceptibles de faire l’objet d’enquêtes civiles ou pénales dans l’État requérant. Les renseignements sont échangés conformément aux procédures établies dans les conventions de double imposition entre la Suisse et les Etats membres et seront tenus secrets de la manière prévue dans ces conventions.

La Suisse conditionne l’issue positive de ce compromis à d’autres négociations, notamment son intégration à l’Espace Schengen et la lutte contre la fraude. Les pourparlers portent, en effet sur la question de l’entraide judiciaire en matière fiscale, donc de secret bancaire.

En ce qui concerne les autres pays, c’est à dire le Lichtenstein, Monaco, Andorre et Saint-Marin, ils ont finalement tous accepté, comme la Suisse, de prélever une retenue à la source de 15, 20, puis 35 % et de transmettre sur demande des informations relatives à des cas de « fraude fiscale » ou d’une infraction équivalente.

Cependant, chacun désire d’autres engagements de la part de l’Union européenne.

Andorre a obtenu, de l’Union européenne, d’être liée par un accord monétaire, qui permettra à la principauté de battre monnaie en Euro.

Monaco, veut introduire le concept d’escroquerie fiscale, dans sa législation, calqué sur la définition très restrictive de la Suisse. D’autre part la Principauté voudrait accéder au marché unique des services financiers et que soit supprimée l’étiquette de paradis fiscal qui lui est toujours appliquée.

Saint-Marin souhaite également accéder au marché unique des services financiers, participer aux programmes européens de recherche et d’éducation et que soit simplifié les procédures douanières.

Le Liechtenstein, quant à lui, veut pouvoir avoir la possibilité de répondre à une demande d’information sur une affaire de fraude fiscale, dans un délai indéterminé.

Enfin les quatre pays veulent obtenir, pour chacun d’eux que soient étendus à leur territoires les bénéfices des directives sur la fiscalité des entreprises, sociétés mères et filiales et intérêts et redevances, qui permettent que ne soient pas imposés les paiements des dividendes, d’intérêts et de redevances, intragroupe.

Les vingt cinq Etats membres de l’Union ont, pour l’instant, refusé d’accéder à cette dernière demande.

Quoiqu’il en soit le consensus semble bien avoir été obtenu à ce jour, puisque les autres petits états acceptent de s’aligner sur l’accord conclu avec la Suisse.

En revanche le calendrier du 1er janvier 2005 semble largement compromis et les 25 Etats membres de l’Union européenne devrait définitivement décider de repousser l’échéance au 1er juillet 2005.

Le texte de l’accord avec la Suisse est repris « in extenso » ci-après :

 

Proposition de DÉCISION DU CONSEIL relative à la conclusion de l’accord entre la Communauté européenne et la
Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la
directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de
l’épargne sous forme de paiements d’intérêts et du protocole d’accord qui
l’accompagne
(présentée par la Commission)

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

Par sa décision du 16 octobre 2001, le Conseil a autorisé la Commission à négocier avec la Suisse et cinq autres pays (États-Unis, Andorre, Liechtenstein, Monaco et Saint-Marin) des accords permettant de garantir l’adoption, par ces pays, de mesures équivalentes à celles qui doivent être appliquées au sein de la Communauté en vue de garantir une imposition effective des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts. La Commission a été chargée de mener ces négociations en étroite collaboration avec la présidence du Conseil et en consultation étroite et régulière avec le groupe de travail de haut niveau créé à la suite de la décision du Coreper du 13 juin 2001 et chargé par le Conseil d’assister la Commission dans sa tâche, en tant que comité spécial.

A la suite de la décision du 16 octobre 2001, la Commission a écrit aux pays tiers susmentionnés pour leur demander l’ouverture de négociations. Cependant, ce n’est qu’après l’approbation du projet de directive, par le Conseil ECOFIN, le 13 décembre 2001, que ces négociations ont réellement pu commencer. Bien qu’elle ait adopté son mandat de négociation sur la fiscalité de l’épargne le 30 janvier 2002, la Suisse a, dans un premier temps, refusé d’engager les négociations sur cette question tant que le Conseil n’avait pas adopté une série de mandats de négociation dans d’autres domaines. Après l’adoption de ces autres mandats, par le Conseil, le 17 juin 2002, des négociations officielles relatives à la fiscalité de l’épargne ont commencé avec laSuisse, le 18 juin 2002. De nombreuses réunions ont eu lieu depuis, au niveau tant politique que technique. Conformément à la décision du Conseil du 16 octobre 2001, la Commission a mené ces négociations en liaison étroite avec les présidences successives du Conseil. La Commission a régulièrement rendu compte, oralement, de l’état d’avancement de celles-ci au Conseil et au Parlement et a présenté une communication sur les négociations avec des pays tiers sur la fiscalité de l’épargne au Conseil ECOFIN du 3 décembre 2002.

A la demande du Conseil ECOFIN, les négociations avec la Suisse sur la fiscalité de l’épargne se sont poursuivies en 2003. De janvier à mai 2003, la Commission a présenté au Conseil différents projets d’accord, qui ont été examinés par le groupe de travail de haut niveau. Au cours des négociations, la partie suisse a demandé que la Suisse puisse bénéficier des régimes prévus par la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents et la directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d’intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d’États membres différents. La Commission a présenté la demande de la Suisse au Conseil.

Le 3 juin 2003, le Conseil a précisé que le projet d’accord avec la Suisse, tel qu’il avait été soumis par la Commission le 28 mai 2003, constituait la dernière offre d’accord entre l’UE et ce pays. Le projet approuvé par le Conseil tient compte de la demande suisse susmentionnée (article 15 du projet d’accord). Toutefois, en ce qui concerne l’Espagne, le projet prévoit que l’article 15 ne s’appliquera qu’à partir de l’entrée en vigueur, entre ce pays et la Suisse, d’un accord bilatéral relatif à l’échange d’informations à la demande en cas de fraude fiscale ou de délits assimilés s’agissant de sources de revenu non assujetties à cet accord mais couvertes par une convention bilatérale ou un accord bilatéral entre les deux pays.

Tout en approuvant l’accord, le Conseil a estimé que la Communauté ne possède pas de compétence exclusive pour conclure un accord avec la Suisse sur le traitement fiscal des paiements de dividendes, d’intérêts et de redevances, conformément à l’article 15 du projet d’accord. Les délégations sont cependant convenues que, à titre exceptionnel et sans que cela ne crée de précédent, les États membres n’exerceront pas leur compétence dans ce cas précis.

Le Conseil et la Commission ont également déclaré que le recours à l’article 15 de l’accord par la Commission n’a aucune incidence sur des accords bilatéraux en vigueur avec d’autres pays tiers et que les États membres conservent la compétence de conclure des accords bilatéraux avec d’autres pays tiers sur le traitement fiscal des paiements de dividendes, d’intérêts et de redevances entre sociétés.

L’accord est actuellement devant le Conseil pour être conclu. Il s’accompagne d’un protocole d’accord auxiliaire entre la Suisse, la Communauté européenne et ses États membres, également approuvé sous forme de projet. Ce protocole d’accord constitue notamment un engagement, pour la Suisse et les États membres, d’ouvrir des négociations bilatérales, en vue d’inclure, dans leurs conventions respectives concernant la double imposition, des dispositions relatives à l’échange d’informations à la demande en cas de «fraude fiscale ou délits assimilés» s’agissant de sources de revenu non assujetties à l’accord, mais couvertes par les conventions respectives, et de définir les différentes catégories de « délits assimilés » en fonction des procédures de taxation appliquées par ces pays. Conformément aux conclusions du conseil ECOFIN du 21 janvier 2003, le protocole d’accord confirme, par ailleurs, qu’au cours de la période de transition prévue par la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003, la Communauté européenne engagera des discussions avec d’autres centres financiers importants afin de promouvoir l’adoption, par ces juridictions, de mesures équivalentes à celles qui sont appliquées par la Communauté. Enfin, le protocole d’accord prévoit que les mesures convenues seront mises en œuvre de bonne foi et que les parties

s’abstiendront de toute action unilatérale de nature à porter préjudice à cet accord sans motif légitime. Si une différence importante devait être constatée entre le domaine d’application de la directive 2003/48/CE du Conseil et celui de l’accord, les parties contractantes procéderont immédiatement à des consultations afin de veiller à ce que la nature équivalente des mesures prévues par l’accord soit maintenue.

La Commission considère que le texte est conforme aux directives de négociation adoptées par le Conseil le 16 octobre 2001.

En vue de permettre la conclusion de l’accord prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts et du protocole d’accord qui l’accompagne, la Commission invite le Conseil à approuver la proposition de décision ci-jointe relative à la conclusion de l’accord. L’article 300, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne dispose que le Conseil statue à la majorité qualifiée lorsque l’accord porte sur un domaine pour lequel l’unanimité est requise pour l’adoption de règles internes. Étant donné que les règles internes dans le domaine sur lequel porte cet accord ont été adoptées sur la base de l’article 94 du Traité, la Commission considère que le Conseil devrait statuer à l’unanimité en ce qui concerne l’approbation de la proposition de décision. Il ressort des conclusions du Conseil ECOFIN du 21 janvier 2003 que le Conseil estime également que l’accord avec la Suisse devrait être adopté à l’unanimité.

 

Proposition de DÉCISION DU CONSEIL sur la conclusion de l’accord entre la Communauté européenne et la Suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts et du protocole d’accord qui l’accompagne

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 94 en conjonction avec le sous paragraphe 1 du paragraphe 2 de l’article 300,

vu la proposition de la Commission,

vu l’avis du Parlement européen,

considérant ce qui suit :

(1) Le 16 octobre 2001, le Conseil a autorisé la Commission à négocier avec la Confédération suisse un accord permettant de garantir l’adoption, par ce pays, de mesures équivalentes à celles qui doivent être appliquées au sein de la Communauté en vue de garantir une imposition effective des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts.

(2) L’application des dispositions de la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts dépend de l’application, par la Confédération suisse, de mesures équivalentes à celles prévues par cette directive, conformément à un accord conclu par ce pays avec la Communauté européenne.

(3) En reconnaissance de sa coopération dans le domaine de la fiscalité de l’épargne, la Communauté a décidé d’accéder à la demande de la Confédération d’inclure dans l’accord des mesures équivalentes aux régimes prévus par la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents et dans la directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d’intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d’États membres différents.

(4) Il est nécessaire d’approuver l’accord entre la Communauté et la Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts et le protocole d’accord qui l’accompagne,

DÉCIDE :

 

Article premier

L’accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 sur l’imposition des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts et le protocole d’accord qui l’accompagne sont approuvés au nom de la Communauté européenne.

Le texte de l’accord et du protocole qui l’accompagne est joint à la présente décision.

Article 2

Le président du Conseil est autorisé à désigner les personnes habilitées à signer l’accord et le protocole d’accord qui l’accompagne en vue d’exprimer le consentement de la Communauté européenne.

Article 3

Le Président du Conseil procède, au nom de la Communauté européenne, à la notification prévue à l’article 17, paragraphe 2, de l’accord.

Article 4

La présente décision est publiée au Journal officiel de l’Union européenne.

Fait à Bruxelles,

Par le Conseil

Le Président

Annexe

Accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive du Conseil 2003/48/CE du 3 juin 2003 en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts.

 

Accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive du Conseil 2003/48/CE du 3 juin 2003 en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts.

La Communauté européenne, dénommée ci-après « la Communauté »,

et

La Confédération suisse, dénommée ci-après « la Suisse » ou « partie contractante » ou « parties contractantes » en fonction du contexte, sont convenues de conclure l’accord suivant:

 

Article premier

Retenue par les agents payeurs suisses

1. Les paiements d’intérêts faits à des bénéficiaires effectifs au sens de l’article 4 qui sont résidents d’un État membre de l’Union européenne, dénommés ci-après « les Etats membres » ou « l’Etat membre » en fonction du contexte, par un agent payeur établi sur le territoire de la Suisse font l’objet, sous réserve du paragraphe 2 et de l’article 2 ci-après, d’une retenue d’impôt sur le montant du paiement d’intérêt. Le taux de cette retenue d’impôt est de 15 % au cours des trois premières années à compter de la date d’application du présent accord, de 20 % au cours des trois années suivantes et de 35 % ensuite.

2. Les paiements d’intérêts sur les créances émises par des débiteurs qui sont résidents de la Suisse ou se rattachant à des établissements stables de non-résidents situés en Suisse sont exclus de la retenue d’impôt. Aux fins du présent accord, l’expression « établissement stable » a le sens que lui confère la convention préventive de la double imposition applicable entre la Suisse et l’Etat de résidence du débiteur. En l’absence d’une telle convention, l’expression «établissement stable» désigne une installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle le débiteur exerce tout ou partie de son activité.

3. Toutefois, au cas où la Suisse réduit à moins de 35 % le taux de l’impôt anticipé sur les paiements d’intérêts de source suisse aux personnes physiques résidentes d’un État membre, elle prélève une retenue d’impôt sur ces paiements d’intérêts. Le taux de cette retenue d’impôt est égal à la différence entre le taux de la retenue d’impôt prévue au paragraphe 1 et le nouveau taux de l’impôt anticipé. Toutefois, il ne peut être supérieur au taux prévu au paragraphe 1.

Si la Suisse limite le champ d’application de la loi sur l’impôt anticipé sur les paiements d’intérêts aux personnes physiques résidentes d’un État membre, tout paiement d’intérêts ainsi exclu de l’impôt anticipé fait l’objet d’une retenue d’impôt aux taux prévus au paragraphe 1.

4. Le paragraphe 2 n’est pas applicable aux intérêts payés par les fonds de placement suisses qui, à la date d’entrée en vigueur du présent accord ou à une date ultérieure, sont exonérés de l’impôt anticipé suisse sur leurs paiements à des personnes physiques résidentes d’un État membre.

5. La Suisse prend les mesures nécessaires afin de s’assurer de l’exécution des tâches requises pour la mise en œuvre du présent accord par les agents payeurs établis sur le territoire de la Suisse et prévoit en particulier les dispositions relatives aux procédures et aux sanctions.

 

Article 2

Divulgation volontaire

1. La Suisse prévoit une procédure qui permet au bénéficiaire effectif au sens de la définition de l’article 4 d’éviter la retenue d’impôt prévue à l’article 1er en autorisant expressément son agent payeur établi en Suisse à déclarer les paiements d’intérêts à l’autorité compétente de ce pays. Cette autorisation couvre tous les paiements d’intérêts faits à ce bénéficiaire effectif par cet agent payeur.

2. Le contenu minimal des informations que l’agent payeur est tenu de communiquer en cas d’autorisation expresse du bénéficiaire effectif est le suivant:

(a) l’identité et la résidence du bénéficiaire effectif établies conformément à l’article 5 du présent accord;

(b) le nom ou la dénomination et l’adresse de l’agent payeur;

(c) le numéro de compte du bénéficiaire effectif ou, à défaut, l’identification de la créance génératrice des intérêts, et

(d) le montant des intérêts payés calculé conformément à l’article 3 du présent accord.

3. L’autorité compétente de la Suisse communique les informations visées au paragraphe 2 à l’autorité compétente de l’État membre de résidence du bénéficiaire effectif. Ces communications ont un caractère automatique et doivent avoir lieu au moins une fois par an, dans les six mois qui suivent la fin de l’année fiscal de la Suisse, pour tous les paiements d’intérêts effectués au cours de cette année.

4. Lorsque le bénéficiaire effectif opte pour cette procédure de divulgation volontaire ou déclare d’une autre manière ses revenus d’intérêt reçus d’un agent payeur suisse aux autorités fiscales de son État membre de résidence, les revenus d’intérêt concernés sont imposés dans cet État membre aux mêmes taux que ceux appliqués aux revenus similaires provenant de cet État.

 

Article 3

Assiette de la retenue d’impôt

1. L’agent payeur prélève la retenue d’impôt prévue à l’article 1er, paragraphe 1, du présent accord comme suit:

a) dans le cas de paiement d’intérêts au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre a, du présent accord: sur le montant brut des intérêts payés ou crédités;

b) dans le cas de paiement d’intérêts au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre b) ou d) du présent accord, sur le montant des intérêts ou des revenus visés à ces lettres ;

c) dans le cas de paiement d’intérêts au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre c) du présent accord: sur le montant des intérêts visés à cette lettre.

2. Aux fins du paragraphe 1, lettres a), b) et c), la retenue d’impôt est prélevée au prorata de la période de détention de la créance par le bénéficiaire effectif.

Si l’agent payeur n’est pas en mesure de déterminer la période de détention sur la base des informations dont il dispose, il considère que le bénéficiaire effectif a détenu la créance pendant toute la période d’existence de celle-ci, sauf si le bénéficiaire effectif fournit une preuve de la date d’acquisition.

3. Les impôts et retenues autres que la retenue d’impôt prévue par le présent accord grevant le même paiement d’intérêts sont déduits du montant de la retenue d’impôt calculé conformément au présent article.

4. Les paragraphes 1, 2 et 3 n’affectent pas l’article 1er, paragraphe 2.

 

Article 4

Définition du bénéficiaire effectif

1. Aux fins du présent accord, on entend par « bénéficiaire effectif » toute personne physique qui reçoit un paiement d’intérêts ou toute personne physique à laquelle un paiement d’intérêts est attribué, sauf si elle peut fournir la preuve que ce paiement n’a pas été effectué ou qu’il ne lui a pas été attribué pour son propre compte. Une personne physique n’est pas considérée comme le bénéficiaire effectif:

a) si elle agit en tant qu’agent payeur au sens de l’article 6 du présent accord, ou

b) si elle agit pour le compte d’une personne morale, d’un fonds d’investissement ou d’un organisme de placement collectif en valeurs mobilières comparable ou équivalent, ou

c) si elle agit pour le compte d’une autre personne physique qui est le bénéficiaire effectif et qui communique à l’agent payeur son identité et son État de résidence.

2. Lorsqu’un agent payeur dispose d’informations suggérant que la personne physique qui reçoit un paiement d’intérêts, ou à laquelle un paiement d’intérêts est attribué, peut ne pas être le bénéficiaire effectif, il doit prendre des mesures raisonnables pour établir l’identité du bénéficiaire effectif. Si l’agent payeur n’est pas en mesure d’identifier le bénéficiaire effectif, il considère la personne physique en question comme le bénéficiaire effectif.

 

Article 5

Identité et résidence des bénéficiaires effectifs

Pour établir l’identité du bénéficiaire effectif au sens de l’article 4 et déterminer son lieu de résidence, l’agent payeur enregistre son nom, son prénom, son adresse et son lieu de résidence conformément à la législation suisse sur la lutte contre le blanchiment d’argent. Dans le cas de relations contractuelles établies, ou de transaction effectuée en l’absence de relations contractuelles, à compter du 1er janvier 2004, pour les personnes physiques présentant un passeport ou une carte d’identité officielle délivré par un État membre et qui déclarent être résidentes d’un pays autre qu’un État membre ou que la Suisse, la résidence est établie sur la base d’un certificat de résidence fiscale délivré par l’autorité compétente du pays dans lequel la personne physique déclare être résidente. A défaut de production de ce certificat, il est considéré que la résidence est située dans l’Etat membre qui a délivré le passeport ou tout autre document d’identité officiel.

 

Article 6

Définition de l’agent payeur

Aux fins du présent accord, on entend par « agent payeur » en Suisse les banques au sens de la législation suisse sur les banques, les négociants en valeurs mobilières au sens de la loi fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières, les personnes physiques et morales résidant ou établies en Suisse, les sociétés de personnes et les établissements stables de sociétés étrangères qui, même à titre occasionnel, acceptent, détiennent, investissent ou transfèrent des actifs de tiers, ou simplement payent ou attribuent des intérêts, dans le cadre de leur activité.

 

Article 7

Définition du paiement d’intérêts

1. Aux fins du présent accord, on entend par « paiement d’intérêts »:

a) les intérêts payés, ou inscrits en compte, qui se rapportent à des créances de toute nature à l’inclusion des intérêts payés sur des dépôts fiduciaires par des agents payeurs suisses au profit de bénéficiaires effectifs au sens de l’article 4, assorties ou non de garanties hypothécaires ou d’une clause de participation aux bénéfices du débiteur, et notamment les revenus des fonds publics et des obligations d’emprunts, y compris les primes et lots attachés à ceux-ci, mais à l’exclusion des intérêts provenant d’emprunts entre personnes physiques privées n’agissant pas dans le cadre de leur activité professionnelle. Les pénalisations pour paiement tardif ne sont pas considérées comme des paiements d’intérêts;

b) les intérêts courus ou capitalisés obtenus lors de la cession, du remboursement ou du rachat des créances mentionnées à la lettre a);

c) les revenus provenant de paiements d’intérêts, soit directement soit par l’intermédiaire d’une entité visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive, distribués par

(i) des organismes de placement collectif domiciliés dans un État membre ;

(ii) des entités domiciliées dans un État membre qui ont recours à l’option prévue à l’article 4, paragraphe 3, de la directive, et qui en informent leur agent payeur;

(iii) des organismes de placement collectif établis en dehors du territoire des parties contractantes;

(iv) des fonds de placement suisses qui, à la date de l’entrée en vigueur du présent accord ou à une date ultérieure, sont exonérés de l’impôt anticipé suisse sur leurs paiements à des personnes physiques qui sont résidentes d’un État membre ;

d) les revenus réalisés lors de la cession, du remboursement ou du rachat de parts ou d’unités dans les organismes et entités suivants, lorsque ceux-ci investissent directement ou indirectement par l’intermédiaire d’autres organismes de placement collectif ou entités mentionnés ci-après plus de 40 % de leurs actifs dans les créances visées à la lettre a):

(i) des organismes de placement collectif domiciliés dans un État membre ;

(ii) des entités domiciliées dans un État membre qui ont recours à l’option prévue à l’article 4, paragraphe 3, de la directive et qui en informent leur agent payeur;

(iii) des organismes de placement collectif établis en dehors du territoire des parties contractantes;

(iv) les fonds de placement suisses qui, à la date de l’entrée en vigueur du présent accord ou à une date ultérieure, sont exonérés de l’impôt anticipé suisse sur leurs paiements à des personnes physiques qui sont résidentes d’un État membre .

2. En ce qui concerne le paragraphe 1, lettre c), lorsqu’un agent payeur ne dispose d’aucun élément concernant la part des revenus provenant de paiements d’intérêts, le montant global des revenus est considéré comme paiement d’intérêts.

3. En ce qui concerne le paragraphe 1, lettre d), lorsqu’un agent payeur ne dispose d’aucun élément concernant le pourcentage d’actifs investi dans des créances ou dans des parts ou des unités telles que définies dans ladite lettre d), ce pourcentage est considéré comme supérieur à 40 %. Lorsqu’il ne peut déterminer le montant de revenu réalisé par le bénéficiaire effectif, le revenu est considéré comme étant le produit de la cession, du remboursement ou du rachat des parts ou unités.

4. Les revenus provenant d’organismes ou d’entités qui ont investi jusqu’à 15 % de leurs actifs dans des créances au sens du paragraphe 1, lettre a), ne sont pas considérés comme un paiement d’intérêts au sens du paragraphe 1, lettre c) et d).

5. Le pourcentage mentionné au paragraphe 1, lettre d), et au paragraphe 3 sera de 25 % à partir du 1er janvier 2011.

6. Les pourcentages mentionnés au paragraphe 1, lettre d), et au paragraphe 4 sont fixés en fonction de la politique en matière d’investissement telle qu’elle est définie dans le règlement ou dans les documents constitutifs des organismes ou entités concernés et, à défaut, en fonction de la composition réelle de l’actif de ces organismes ou entités.

 

Article 8

Partage des recettes

1. La Suisse conserve 25 % de la recette générée par la retenue d’impôt au titre du présent accord et en transfère 75 % à l’État membre de résidence du bénéficiaire effectif.

2. Ces transferts ont lieu pour chaque exercice en une seule opération par État membre au plus tard dans les six mois qui suivent la fin de l’année fiscale de la Suisse.

 

Article 9

Elimination de la double imposition

1. Lorsque les intérêts reçus par un bénéficiaire effectif ont été grevés d’une retenue d’impôt par un agent payeur établi en Suisse, l’État membre de résidence fiscale du bénéficiaire effectif lui accorde un crédit d’impôt égal au montant de cette retenue d’impôt. Lorsque ce montant est supérieur au montant de l’impôt dû, en vertu de sa législation nationale, sur le montant total des intérêts grevés de cette retenue d’impôt, l’État membre de résidence fiscale rembourse la différence prélevée en excès au bénéficiaire effectif.

2. Lorsque les intérêts reçus par un bénéficiaire effectif ont été grevés d’impôts et de retenues autres que celle prévue dans le présent accord et que l’État membre de résidence fiscale accorde un crédit d’impôt pour ces impôts et retenues en vertu de sa législation nationale ou de conventions de double imposition, ces impôts et retenues sont crédités avant l’application de la procédure prévue au paragraphe 1. L’État membre de résidence fiscale accepte les attestations émises par des agents payeurs suisses comme preuve suffisante de l’impôt ou de la retenue, étant entendu que l’autorité compétente de l’État membre de résidence fiscale peut obtenir des autorités compétentes suisses la vérification des informations contenues dans les attestations émises par des agents payeurs suisses.

3. L’État membre de résidence fiscale du bénéficiaire effectif peut remplacer le mécanisme de crédit prévu aux paragraphes 1 et 2 par un remboursement de la retenue d’impôt prévue à l’article 1er.

 

Article 10

Echange de renseignements

1. Les autorités compétentes de la Suisse et de tout État membre échangent des renseignements sur les comportements constitutifs de fraude fiscale au regard de la législation de l’État requis, ou d’une infraction équivalente concernant des revenus couverts par l’accord. Par « infraction équivalente », on entend uniquement une infraction du même degré de gravité que dans le cas de la fraude fiscale au regard de la législation de l’État requis. En réponse à une requête dûment justifiée, l’État requis communique des renseignements sur les matières faisant l’objet ou susceptibles de faire l’objet d’enquêtes civiles ou pénales dans l’État requérant . dans le cadre du champ d’application de l’échange de renseignements tel qu’il est défini dans le présent paragraphe, les renseignements sont échangés conformément aux procédures établies dans les conventions de double imposition entre la Suisse et les Etats membres et seront tenus secrets de la manière prévue dans ces conventions.

2. Pour déterminer si des renseignements peuvent ou non être communiquées en réponse à une requête, l’État requis applique les règles de prescription applicables en vertu de la législation de l’État requérant et non pas celles de l’État requis.

3. L’État requis communique des renseignements lorsque l’État requérant a de bonnes raisons de soupçonner que le comportement en cause pourrait constituer une fraude fiscale ou une infraction équivalente. Ce soupçon de l’État requérant peut être fondé sur:

a) des documents, authentifiés ou non, comprenant notamment des documents d’affaires, des livres de comptes, et des informations sur des comptes bancaires;

b) un témoignage du contribuable;

c) des renseignements obtenus d’un informateur ou d’un autre tiers qui ont été corroborées de façon indépendantes ou qui par ailleurs semblent crédibles pour d’autres raisons; ou

d) des preuves indirectes.

4. La Suisse engage des négociations bilatérales avec chacun des États membres afin de définir les types de cas pouvant être considérés comme des « infractions équivalentes » au regard de la procédure d’imposition appliquée par ces pays.

 

Article 11

Autorités compétentes

Aux fins du présent accord, on entend par « autorités compétentes » les instances publiques dont la liste figure à l’annexe 1.

 

Article 12

Consultations

En cas de désaccord entre l’autorité compétente de la Suisse et une ou plusieurs des autres autorités compétentes visées à l’article 11 du présent accord sur l’interprétation ou l’application du présent accord, ces autorités s’efforcent de résoudre le cas par voie d’accord amiable. Elles informent immédiatement la Commission européenne et les autorités compétentes des autres États membres des résultats de leurs consultations.

En ce qui concerne les questions d’interprétation, la Commission européenne peut participer aux consultations à la demande de toute autorité compétente.

 

Article 13

Réexamen

1. Les parties contractantes se consultent mutuellement au moins tous les trois ans ou à la demande d’une d’entre elles en vue d’examiner et – si elles l’estiment nécessaire – d’améliorer le fonctionnement technique de l’accord et d’évaluer les développements internationaux. Les consultations ont lieu dans le mois qui suit la requête ou aussi tôt que possible dans les cas urgents.

2. Sur la base de cette évaluation, les parties contractantes peuvent se consulter mutuellement en vue d’examiner s’il y a lieu de modifier l’accord en fonction des développements internationaux.

3. Dès qu’elles ont acquis une expérience suffisante de la mise en œuvre intégrale de l’article 1er, paragraphe 1, de l’accord, les parties contractantes se consultent mutuellement afin d’examiner s’il y a lieu de modifier l’accord en fonction des développements internationaux.

4. Aux fins des consultations visées ci-dessus, chaque partie contractante informe l’autre des développements éventuellement susceptibles d’affecter le bon fonctionnement du présent accord, et notamment de tout accord pertinent éventuel entre l’une des parties contractantes et un pays tiers.

 

Article 14

Relations avec les conventions bilatérales de double imposition

Les dispositions des conventions de double imposition entre la Suisse et les États membres n’empêchent pas le prélèvement de la retenue d’impôt prévue par le présent accord.

 

Article 15

Paiements de dividendes, d’intérêts et de redevances entre sociétés

1. Sans préjudice de l’application des dispositions de la législation nationale ou de conventions visant à prévenir la fraude et les abus, en Suisse et dans les États membres, les dividendes payés par des sociétés filiales à leurs sociétés mères ne sont pas imposés dans l’État de la source lorsque:

– la société mère détient directement au moins 25 % du capital de la filiale pendant au moins deux ans, et que

– une société a sa résidence fiscale dans un État membre et l’autre a sa résidence fiscale en Suisse, et que

– aucune de ces sociétés n’a sa résidence fiscale, aux termes d’une convention de double imposition conclue avec un État tiers, dans cet État tiers, et que

– les deux sociétés sont assujetties à l’impôt sur les sociétés sans bénéficier d’une exonération et toutes deux revêtent la forme d’une société de capitaux.

2. Sans préjudice de l’application des dispositions de la législation nationale ou de conventions visant à prévenir la fraude ou les abus, en Suisse et dans les États membres, les paiements d’intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées ou leurs établissements stables ne sont pas imposés dans l’État de la source lorsque:

– ces sociétés sont liées par une participation directe d’au moins 25 % pendant au moins deux ans ou sont toutes deux détenues par une société tierce qui détient directement une participation d’au moins 25 % dans le capital de la première société et dans le capital de la seconde société pendant au moins deux ans, et que

– une société a sa résidence fiscale, ou un établissement stable est situé, dans un État membre et que l’autre société a sa résidence fiscale, ou un autre établissement stable est situé, en Suisse, et que

– aucune de ces sociétés n’a sa résidence fiscale ni aucun de ces établissements stables ou n’est situé, aux termes d’une convention de double imposition conclue avec un État tiers, dans cet État tiers, et que

– toutes les sociétés sont assujetties à l’impôt sur les sociétés sans bénéficier d’une exonération, en particulier sur des paiements d’intérêts et de redevances, et chacune revêt la forme d’une société de capitaux10.

Toutefois, lorsque la directive du Conseil concernant le régime fiscal commun applicable aux paiements d’intérêts et de redevances effectués entre les sociétés associées d’États membres différents prévoit une période transitoire pour un État membre donné, cet État ne prend les arrangements susmentionnés concernant les paiements d’intérêts et de redevances qu’à l’expiration de cette période.

3. Les conventions de double imposition existant entre la Suisse et les États membres qui, à la date d’adoption du présentaccord, prévoient un traitement plus favorable des paiements de dividendes, d’intérêts et de redevances ne sont pas affectées.

 

Article 16

Dispositions transitoires pour les titres de créance négociables

1. À compter de la date d’application du présent accord et aussi longtemps qu’au moins l’un des États membres applique également des dispositions similaires, et jusqu’au 31 décembre 2010 au plus tard, les obligations domestiques et internationales et autres titres de créance négociables dont l’émission d’origine est antérieure au 1er mars 2001 ou pour lesquels les prospectus d’émission d’origine ont été visés avant cette date par les autorités compétentes de l’État d’émission ne sont pas considérés comme des créances au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre a) du présent accord, à condition qu’aucune nouvelle émission de ces titres de créance négociables ne soit réalisée à compter du 1er mars 2002.

Toutefois, aussi longtemps qu’au moins l’un des États membres applique également des dispositions similaires, les dispositions du présent article continuent à s’appliquer au-delà du 31 décembre 2010 vis-à-vis des titres de créance négociables:

– qui contiennent des clauses de montant brut et de remboursement anticipé, et

– lorsque l’agent payeur, tel qu’il est défini à l’article 6, est établi en Suisse, et

– que cet agent payeur paie des intérêts directement à un, ou attribue le paiement d’intérêts au profit immédiat d’un, bénéficiaire effectif résidant dans un État membre.

Si et lorsque tous les États membres cessent d’appliquer des dispositions similaires, les dispositions du présent article continuent à s’appliquer uniquement vis-à-vis des titres de créance négociables:

– qui contiennent des clauses de montant brut et de remboursement anticipé, et

– lorsque l’agent payeur de l’émetteur est établi en Suisse, et

– que cet agent payeur paie des intérêts directement à un, ou attribue le paiement d’intérêts au profit immédiat d’un, bénéficiaire effectif résidant dans un État membre.

Si une nouvelle émission d’un des titres de créance négociables susmentionnés émis par un gouvernement ou une entité assimilée agissant en qualité d’autorité publique ou dont le rôle est reconnu par une convention internationale (dont la liste figure dans l’annexe 2 du présent accord) est réalisée à compter du 1er mars 2002, l’ensemble de l’émission de ce titre, à savoir l’émission d’origine et toute émission ultérieure, est considéré comme une émission au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre a).

Si une nouvelle émission d’un des titres des créances négociables susmentionnés émis par tout autre émetteur non couvert par la phrase précédente est réalisée à compter du 1er mars 2002, cette nouvelle émission est considérée comme l’émission d’un titre de créance au sens de l’article 7, paragraphe 1, lettre a).

2. Le présent article n’a toutefois pas pour effet d’empêcher la Suisse et les États membres de continuer d’imposer les revenus des titres de créance négociables visés au paragraphe 1 en application de leur législation nationale.

 

Article 17

Signature, entrée en vigueur et durée de validité

1. Le présent accord est ratifié ou approuvé par les parties contractantes conformément à leurs propres procédures. Les Parties contractantes se notifient mutuellement l’accomplissement de ces procédures. Le présent accord entre en vigueur [le premier jour du deuxième mois] suivant la dernière notification.

2. Sous réserve de la satisfaction de leurs exigences constitutionnelles concernant la conclusion d’accords internationaux et sans préjudice de l’article 18, la Suisse et, le cas échéant la Communauté, mettent en œuvre et appliquent effectivement le présent accord le 1er janvier 2005 et en informent l’autre partie contractante.

3. Le présent accord demeure en vigueur tant qu’il n’a pas été dénoncé par une partie contractante.

4. Chaque partie contractante peut dénoncer l’accord par notification à l’autre partie. Dans ce cas, l’accord cessera d’être applicable douze mois après le dépôt de la notification.

 

Article 18

Application et suspension de l’application

1. L’application du présent accord est conditionnée par l’adoption et par la mise en œuvre par les territoires dépendants ou associés des États membres mentionnés dans la décision du Conseil européen de Feira des 19 et 20 juin 2000, ainsi que par les États-Unis d’Amérique, Andorre, le Liechtenstein, Monaco et Saint-Marin, respectivement, de mesures identiques ou équivalentes à celles contenues dans la directive ou dans le présent accord, à l’exception de l’article 15, et prévoyant les mêmes dates de mise en œuvre.

2. Les parties contractantes décident, d’un commun accord, au moins six mois avant la date visée à l’article 17, paragraphe 2, si la condition énoncée au paragraphe 1 est remplie en ce qui concerne les dates d’entrée en vigueur des mesures pertinentes dans les pays tiers et les territoires dépendants ou associés concernés. Si les parties contractantes ne décident pas que la condition est remplie, elles fixent d’un commun accord une nouvelle date aux fins de l’article 17, paragraphe 2.

3. Nonobstant les paragraphes 1 et 2 du présent article, l’article 15 prend effet en ce qui concerne l’Espagne à la date d’entrée en vigueur d’un accord bilatéral entre l’Espagne et la Suisse relatif à l’échange de renseignements sur demande dans les cas pénaux ou civils de fraude fiscale tels que définis par la législation de l’Etat requis, ou d’une infraction équivalente, portant sur des éléments de revenu ne relevant pas du présent Accord mais couverts par une convention ou un accord en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune entre l’Espagne et la Suisse.

4. L’application du présent accord ou de parties de celui-ci peut être suspendue par l’une des parties contractantes avec effet immédiat par notification à l’autre au cas où la directive ou une partie de celle-ci cesse d’être applicable soit temporairement soit définitivement conformément au droit de la Communauté européenne ou au cas où un État membre suspend l’application de sa législation de transposition.

5. Chaque partie contractante peut suspendre l’application du présent accord par notification à l’autre au cas où l’un des pays tiers ou territoires visés au paragraphe 1 cesse d’appliquer les mesures visées dans ce paragraphe. La suspension de l’application a lieu au plus tôt douze mois après la notification.

L’application de l’Accord recommence dès que les mesures sont réintégrées.

 

Article 19

Droits et règlement final

1. Au cas où le présent accord serait dénoncé ou son application suspendue en tout ou en partie, les droits des personnes physiques au titre de l’article 9 ne sont pas affectés.

2. Dans un cas semblable, la Suisse établit un décompte final à la date de fin d’applicabilité de l’accord et effectue un paiement pour solde de tout compte aux États membres.

 

Article 20

Champ d’application territorial

Le présent accord est applicable à la Suisse et au territoire auquel le traité instituant la Communauté européenne s’applique.

 

Article 21

Annexes

Les annexes font partie intégrante du présent accord. Elles peuvent être modifiées d’un commun accord.

Signé à …………………… le …………………… en deux exemplaires en langue allemande, anglaise, danoise, espagnole, finnoise, française, grecque, italienne, néerlandaise, portugaise, et suédoise, chacun de ces textes faisant également foi.

 

Annexe I

Liste des autorités compétentes

Aux fins du présent accord, on entend par « autorités compétentes »:

a) en Suisse, le Directeur de l’Administration fédérale des contributions/Direcktor der Eidgenössischen Steuerverwaltung/ il direttore dell’Amninistrazione federale delle contribuzioniou son suppléant ou agent,

b) dans le Royaume de Belgique: De Minister van Financiën/Le Ministre des Finances ou un représentant agréé,

c) dans le Royaume du Danemark: Skatteministeren ou un représentant agréé,

d) dans la République fédérale d’Allemagne: Der Bundesminister der Finanzen ou un représentant agréé,

e) dans la République hellénique: Ο Υπουργός των Οικονοµικών ou un représentant agréé,

f) dans le Royaume d’Espagne: El Ministro de Hacienda ou un représentant agréé,

g) dans la République française: Le Ministre chargé du budget ou un représentant agréé,

h) en Irlande: The Revenue Commissioners ou un représentant agréé,

i) dans la République italienne: Il Capo del Dipartimento per le Politiche Fiscali ou un représentant agréé,

j) au Grand-Duché de Luxembourg: Le Ministre des Finances ou un représentant agréé; cependant, pour l’application de l’article 10, l’autorité compétente est le Procureur Général d’Etat luxembourgeois,

k) dans le Royaume des Pays-Bas: De Minister van Financiën ou un représentant agréé,

l) dans la République d’Autriche: Der Bundesminister für Finanzen ou un représentant agréé,

m) dans la République portugaise: O Ministro das Finanças ou un représentant agréé,

n) dans la République de Finlande: Valtiovarainministeriö/Finansministeriet ou un représentant agréé,

o) dans le Royaume de Suède: Finansdepartementet ou un représentant agréé,

p) dans le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et dans les territoires européens dont le Royaume-Uni assume les relations extérieures:

the Commissioners of Inland Revenue ou leur représentant agréé ainsi que l’autorité compétente de Gibraltar que le Royaume-Uni désignera conformément aux arrangements conclus à propos des autorités compétentes de Gibraltar dans le contexte des instruments de l’UE et de la CE et des

Traités y relatifs, notifiés le 19 avril 2000 aux Etats membres et aux institutions de l’Union européenne et dont une copie sera notifiée à la Suisse par le Secrétariat Général du Conseil de l’Union européenne, et qui s’appliquent au présent Accord.

 

Annexe 2

Liste des entités assimilées

Aux fins de l’article 16 du présent accord, les entités suivantes sont considérées comme des « entités assimilées agissant en qualité d’autorité publique ou dont le rôle est reconnu par un traité international »:

 

ENTITES DANS L’UNION EUROPEENNE:

 

Belgique

– Vlaams Gewest (région flamande)

– Région wallonne

– Région de Bruxelles –capitale /Brussels Hoofdstedelijk Gewest)

– Communauté française

– Vlaamse Gemeenschap (communauté flamande)

– Deutschsprachige Gemeinschaft (communauté germanophone)

 

Espagne

– Xunta de Galicia (gouvernement de la communauté autonome de Galice)

– Junta de Andalucía (gouvernement de la communauté autonome d’Andalousie)

– Junta de Extremadura (gouvernement de la communauté autonome d’Estrémadure)

– Junta de Castilla-La Mancha (gouvernement de la communauté autonome de Castille-La-Manche)

– Junta de Castilla-León (gouvernement de la communauté autonome de Castille-León)

– Gobierno Foral de Navarra (gouvernement de la communauté autonome de Navarre)

– Govern de les Illes Balears (gouvernement de la communauté autonome des îles Baléares)

– Generalitat de Catalunya (gouvernement de la communauté autonome de Catalogne)

– Generalitat de Valencia (gouvernement de la communauté autonome de Valence)

– Diputación General de Aragón (gouvernement de la communauté autonome d’Aragon)

– Gobierno de las Islas Canarias (gouvernement de la communauté autonome des îles Canaries)

– Gobierno de Murcia (gouvernement de la communauté autonome de Murcie)

– Gobierno de Madrid (gouvernement de la communauté autonome de Madrid)

– Gobierno de la Comunidad Autónoma del País Vasco/Euzkadi (gouvernement de la communauté autonome du Pays basque)

– Diputación Foral de Guipúzcoa (conseil provincial de Guipúzcoa)

– Diputación Foral de Vizcaya/Bizkaia (conseil provincial de Biscaye)

– Diputación Foral de Alava (conseil provincial d’Alava)

– Ayuntamiento de Madrid (commune de Madrid)

– Ayuntamiento de Barcelona (commune de Barcelone)

– Cabildo Insular de Gran Canaria (conseil de l’île de Grande Canarie)

– Cabildo Insular de Tenerife (conseil de l’île de Ténériffe)

– Instituto de Crédito Oficial (office de crédit de l’Etat)

– Instituto Catalán de Finanzas (institution financière publique de Catalogne)

– Instituto Valenciano de Finanzas (institution financière publique de Valence)

 

Grèce

– Oργανισµός Tηλεπικοινωνιών Ελλάδος (organisme de télécommunications de Grèce)

– Oργανισµός Σιδηροδρόµων Ελλάδος (chemins de fer de Grèce)

– Δηµόσια Επιχείρηση Ηλεκτρισµού (entreprise publique d’électricité)

France

– La Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

– Agence française de développement (AFD)

– Réseau ferré de France (RFF)

– Caisse nationale des autoroutes (CNA)

– Assistance publique hôpitaux de Paris (APHP)

– Charbonnages de France (CDF)

– Entreprise minière et chimique (EMC)

 

Italie

– Régions

– Provinces

– Communes

– Cassa Depositi e Prestiti (caisse de dépôts et de prêts)

 

Portugal

– Região Autonoma de Madeira (région autonome de Madère)

– Região Autonoma dos Açores (région autonome des Açores)

– Communes

 

ENTITES INTERNATIONALES:

– Banque européenne pour la reconstruction et le développement

– Banque européenne d’investissement

– Banque asiatique de développement

– Banque africaine de développement

– Banque mondiale / BIRD / FMI

– Société financière internationale

– Banque interaméricaine de développement

– Fonds de développement social du Conseil de l’Europe

– EURATOM

– Communauté européenne

– Société andine de développement

– Eurofima

– Communauté européenne du charbon et de l’acier

– Banque nordique d’investissement

– Banque de développement des Caraïbes

 

Les dispositions de l’article 16 ne portent pas préjudice aux obligations internationales que les parties contractantes peuvent avoir contractées vis-à-vis des entités internationales susmentionnées.

ENTITES DANS LES PAYS TIERS:

 

Les entités qui remplissent les critères suivants:

1. l’entité est manifestement considérée comme une entité publique selon les critères nationaux.

2. Cette entité publique est un producteur non marchand qui administre et finance une série d’activités, consistant principalement dans la fourniture de produits et de services non marchands au bénéfice de la communauté, et qui sont effectivement contrôlées par l’administrationpublique.

3. Cette entité publique est un émetteur important et régulier de titres de créance.

4. L’État concerné est en mesure de garantir que cette entité publique ne procédera pas à un remboursement anticipé en cas de clause de montant brut.

 

Protocole d’accord entre la Communauté européenne, le Royaume de Belgique, le Royaume du Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, l’Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, et la Confédération suisse, la Communauté européenne, le Royaume de Belgique, le Royaume du Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, l’Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, et la Confédération suisse ont conclu le présent protocole d’accord

 

1. INTRODUCTION

La Suisse et la Communauté européenne concluent un accord prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues par la directive du Conseil 2003/48/CE du 3 juin 2003 en

matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous la forme de paiements d’intérêts (dénommée ci-après la directive). Le présent protocole d’accord complète cet accord.

 

2. ASSISTANCE ADMINISTRATIVE DANS LES CAS DE FRAUDE FISCALE ET D’INFRACTIONS EQUIVALENTES

Dès que l’accord est signé, la Suisse et chaque État membre de l’Union européenne engagent des négociations bilatérales en vue:

– d’inclure dans leurs conventions respectives de double imposition concernant le revenu et la fortune des dispositions sur l’assistance administrative sous la forme d’un échange de renseignements sur demande concernant tous les cas pénaux ou civils de fraude fiscale au regard de la législation de l’État requis, ou les infractions équivalentes portant sur des éléments de revenu ne relevant pas de l’accord mais couverts par leurs conventions respectives;

– de définir les catégories de cas constituant des « infractions équivalentes » au regard de la procédure d’imposition appliquée par ces pays.

 

3. NEGOCIATIONS AVEC D’AUTRES PAYS TIERS EN VUE DE L’ADOPTION DE MESURES EQUIVALENTES

Pendant la période transitoire prévue par la directive, la Communauté européenne engagera des négociations avec d’autres centres financiers importants en vue de favoriser l’adoption par ces pays de mesures équivalentes à celles appliquées par la Communauté.

 

4. DECLARATION D’INTENTION

Les signataires du présent protocole d’accord déclarent qu’ils considèrent que l’accord visé au point 1 et le présent protocole constituent un arrangement acceptable et équilibré qui peut être considéré comme sauvegardant les intérêts des parties. Ils mettront donc les mesures convenues en œuvre de bonne foi et s’abstiendront de toute action unilatérale de nature à porter préjudice au présent arrangement sans motif légitime.

Si une différence significative était découverte entre le champ d’application de la directive, telle qu’adoptée le 3 juin 2003, et celui de l’Accord, en particulier en ce qui concerne l’article 1 (2) et l’article 6 de l’Accord, les Parties contractantes se consultent sans délai conformément à l’article 13 (1) de l’Accord en vue de s’assurer que le caractère équivalent des mesures prévues par l’Accord est maintenu.

 

Signé à …………………… le …………………… en double exemplaire en langue allemande,

anglaise, danoise, espagnole, finnoise, française, grecque, italienne, néerlandaise,

portugaise, et suédoise, chacun de ces textes faisant également foi.

 

THEME II– Le droit communautaire et les « exit tax »


Paragraphe 1 – La Cour de justice a rendu son jugement en matière d’« exit tax »

Pour rappel, l’article 24 de la loi de finances pour 1999 a institué l’imposition immédiate des plus-values de cession ou d’échanges de titres en report d’imposition, ainsi que, sous certaines conditions, l’imposition des plus-values latentes constatées sur des participations substantielles (participations supérieures à 25%), lorsque à compter du 9 septembre 1998, le contribuable transfère son domicile fiscal hors de France.

Contrairement à ce qui est la règle en matière de fiscalité directe des particuliers, ce texte a pour effet de rendre imposable des plus-values latentes ou non-réalisées. La spécificité de ce dispositif est que le contribuable est taxé sur un revenu dont il ne dispose pas. L’imposition des revenus latents constitue alors, indirectement, une sanction. En effet, selon l’article 12 du Code général des impôts, « l’impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ». Le revenu imposable est donc le revenu disponible, et l’Administration entend par revenu disponible le revenu dont la perception ne dépend que de la seule volonté du bénéficiaire. On peut donc penser que le dispositif de l’article 167 bis du Code général des impôts, en taxant des plus-values non encore réalisées et non disponibles pour le contribuable, est contraire au principe selon lequel ne sont imposés que les revenus disponibles.

 

Le contribuable peut, toutefois, demander à bénéficier d’un sursis de paiement correspondant à des plus-values en vertu de l’article 167 bis II du Code général des impôts. Mais ce mécanisme est subordonné à certaines conditions. D’une part, le contribuable doit demander expressément à bénéficier du sursis et doit déclarer le montant de la plus-value constatée. D’autre part, le contribuable doit désigner un représentant établi en France et autorisé à recevoir les communications relatives à l’assiette, au recouvrement et au contentieux de l’impôt. Enfin, préalablement à son départ, le contribuable doit constituer, auprès du comptable chargé du recouvrement, des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor. Cette procédure est alignée sur celle qui s’applique, en vertu de l’article L 277 du Livre des Procédures fiscales, lorsque le contribuable a contesté le bien fondé des impositions mises à sa charge. Comme dans cette hypothèse, les garanties prennent la forme d’un dépôt en espèces, d’une créance sur le trésor, d’une caution bancaire de valeurs mobilières, d’une hypothèque ou d’un nantissement de fond de commerce. L’expatriation aura donc un coût élevé, et si la caution de banque ne peut être obtenue, le départ de France devient impossible, sauf à payer l’impôt.

Le dispositif précédemment exposé a suscité de vives réactions si bien qu’une question s’est posée au Conseil d’Etat dans l’affaire Lasteyrie de saillant. Le requérant s’était établi en Belgique le 12 décembre 1998 pour y exercer ses activités professionnelles. Disposant de participations substantielles dans différentes sociétés françaises, il était donc susceptible de se voir appliquer l’imposition prévue à l’article 167 bis du Code général des impôts. Estimant que cette obligation était contraire à son droit de s’établir dans un autre état de la Communauté, le requérant a formé devant le Conseil d’Etat un recours en annulation du décret n°99-590 du 6 juillet 1999 pris pour l’application des dispositions légales précitées.

 

En premier lieu, le Conseil d’Etat a statué sur le principe de la liberté d’aller et de venir en considérant que cette liberté n’était pas ici en cause dès lors que le fait générateur de la taxation prévue à l’article 167 bis n’était pas la sortie du territoire, mais le transfert du domicile fiscal.

En second lieu, le Conseil d’Etat a examiné le moyen selon lequel ce dispositif était contraire à la liberté d’établissement dans la mesure où une législation nationale peut être contraire à l’article 52 du Traité, devenu l’article 43 CE, si elle a pour effet d’entraver l’exercice de la liberté d’établissement par les ressortissants de l’Etat membre concerné, même de façon indirecte. Le conseil d’Etat, eu égard aux incertitudes, au niveau communautaire, que suscite la question posée, a décidé qu’il serait « sursis à statuer sur la requête de M. de Lasteyrie du Saillant jusqu’à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur la question préjudicielle énoncée dans les motifs de la présente décision ».

la Cour de justice n’a jamais eu à connaître d’un mécanisme d’imposition spécial des contribuables transférant leur domicile à l’étranger, et n’a pas non plus eu à traiter d’un cas similaire.

De plus, il existe des dispositifs analogues dans d’autres états et l’Administration fiscale française soutient que le même dispositif se retrouve dans la législation de plusieurs états membres.

Enfin, se pose la question du dilemme entre l’évasion fiscale et l’harmonisation fiscale. Peut-on limiter la souveraineté fiscale d’un Etat si on en arrive trop hâtivement à la constatation qu’un Etat membre de la Communauté ne peut empêcher ses ressortissants de profiter de la fiscalité plus avantageuse que leur offre un autre Etat. La question posée dépassait le cadre national.

La Cour de justice des Communautés européennes a donc pris position sur la compatibilité du dispositif français avec le droit communautaire. Elle a décidé que : « Le principe de liberté d’établissement posé par l’article 52 du Traité CE, devenu article 43 CE, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un Etat membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values non encore réalisées, tel que celui prévu à l’article 167 bis du Code général des Impôts français, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet Etat ». Elle semble respecter la position de l’Avocat général, M. Jean Mischo, qui avait conclu et proposé la réponse suivante : « L’article 52 du Traité, devenu article 43 CE, s’oppose à une législation nationale telle que celle en cause au principal qui prévoit, à la charge de tous les contribuables qui transfèrent leur domicile fiscal dans un autre Etat membre, un mécanisme d’imposition immédiat des plus-values non encore réalisées ».

La Cour rappelle, dans un considérant de principe souvent repris, « si la fiscalité directe relève de la compétence des Etats membres, il n’en reste pas moins que ces derniers doivent l’exercer dans le respect du droit communautaire ». Faisant application de ces principes, la Cour a affirmé avec beaucoup de clarté que ces dispositions « s’opposent également à ce que l’Etat d’origine entrave l’établissement dans un autre Etat membre d’un de ses ressortissants » même si cette restriction est de faible portée ou d’importance mineure.

 

Nous reprenons ci-après le texte « in extenso » de cet arrêt particulièrement important :

 

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

11 mars 2004

«Liberté d’établissement – Article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) – Législation fiscale – Transfert du domicile fiscal dans un autre État membre – Modalités d’imposition des plus-values de valeurs mobilières»

 

Dans l’affaire C-9/02,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’article 234 CE, par le Conseil d’État (France) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre Hughes de Lasteyrie du Saillant et Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, une décision à titre préjudiciel sur l’interprétation de l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE),

LA COUR (cinquième chambre), composée de M. C. W. A. Timmermans (rapporteur), faisant fonction de président de la cinquième chambre, A. La Pergola et S. von Bahr, juges, avocat général: M. J. Mischo, greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal, considérant les observations écrites présentées:

– pour M. de Lasteyrie du Saillant, par Me E. Ginter, avocat,

– pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues, F. Alabrune et P. Boussaroque, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement danois, par M. J. Bering Liisberg, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing et M. Lumma, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mme H. G. Sevenster, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement portugais, par MM. L. Fernandes et A. Seiça Neves, en qualité d’agents,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. R. Lyal et C. Giolito, en qualité d’agents, vu le rapport d’audience, ayant entendu les observations orales de M. de Lasteyrie du Saillant, représenté par Mes E. Ginter et B. Michaud, avocat, du gouvernement français, représenté par MM. P. Boussaroque et J.-L. Gautier, en qualité d’agent, du gouvernement néerlandais, représenté par Mme S. Terstal, en qualité d’agent, et de la Commission, représentée par MM. R. Lyal et C. Giolito, à l’audience du 13 février 2003, ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 mars 2003, rend le présent

 

Arrêt

  1. Par décision du 14 décembre 2001, parvenue à la Cour le 14 janvier 2002, le Conseil d’État a posé, en vertu de l’article 234 CE, une question préjudicielle relative à l’interprétation de l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE).
  2. Cette question a été soulevée dans le cadre d’un litige opposant M. de Lasteyrie du Saillant (ci-après M. «de Lasteyrie») au ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie au sujet d’une imposition assise sur des plus-values mobilières non encore réalisées, laquelle est due en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de France.

Le cadre juridique

  1. L’article 24 de la loi n° 98-1266, du 30 décembre 1998, portant loi de finances pour 1999 (JORF du 31 décembre 1998, p. 20050), dans sa rédaction en vigueur à la date du décret n° 99-590, du 6 juillet 1999, portant application de l’article 24 de la loi de finances pour 1999 relatif aux modalités d’imposition de certaines plus-values de valeurs mobilières en cas de transfert du domicile fiscal hors de France (JORF du 13 juillet 1999, p. 10407), dispose:

«I. […]

II. Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 167 bis ainsi rédigé:

‘Art. 167 bis.

I. – 1. Les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années sont imposables, à la date du transfert de leur domicile hors de France, au titre des plus-values constatées sur les droits sociaux mentionnés à l’article 160.

2. La plus-value constatée est déterminée par différence entre la valeur des droits sociaux à la date du transfert du domicile hors de France, déterminée suivant les règles prévues aux articles 758 et 885 T bis, et leur prix d’acquisition par le contribuable ou, en cas d’acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation.

Les pertes constatées ne sont pas imputables sur les plus-values de même nature effectivement réalisées par ailleurs.

3. La plus-value constatée est déclarée dans les conditions prévues au 2 de l’article 167.

 

II. – 1. Le paiement de l’impôt afférent à la plus-value constatée peut être différé jusqu’au moment où s’opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l’annulation des droits sociaux concernés.

Le sursis de paiement est subordonné à la condition que le contribuable déclare le montant de la plus-value constatée dans les conditions du I, demande à bénéficier du sursis, désigne un représentant établi en France autorisé à recevoir les communications relatives à l’assiette, au recouvrement et au contentieux de l’impôt et constitue auprès du comptable chargé du recouvrement, préalablement à son départ, des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor.

Le sursis de paiement prévu au présent article a pour effet de suspendre la prescription de l’action en recouvrement jusqu’à la date de l’événement entraînant son expiration. Il est assimilé au sursis de paiement prévu à l’article L. 277 du livre des procédures fiscales pour l’application des articles L. 208, L. 255 et L. 279 du même livre.

Pour l’imputation ou la restitution de l’avoir fiscal, des crédits d’impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires, il est fait abstraction de l’impôt pour lequel un sursis de paiement est demandé en application du présent article.

2. Les contribuables qui bénéficient du sursis de paiement en application du présent article sont assujettis à la déclaration prévue au 1 de l’article 170. Le montant cumulé des impôts en sursis de paiement est indiqué sur cette déclaration à laquelle est joint un état établi sur une formule délivrée par l’administration faisant apparaître le montant de l’impôt afférent aux titres concernés pour lequel le sursis de paiement n’est pas expiré ainsi que, le cas échéant, la nature et la date de l’événement entraînant l’expiration du sursis.

3. Sous réserve du 4, lorsque le contribuable bénéficie du sursis de paiement, l’impôt dû en application du présent article est acquitté avant le 1er mars de l’année suivant celle de l’expiration du sursis.

Toutefois, l’impôt dont le paiement a été différé n’est exigible que dans la limite de son montant assis sur la différence entre le prix en cas de cession ou de rachat, ou la valeur dans les autres cas, des titres concernés à la date de l’événement entraînant l’expiration du sursis, d’une part, et leur prix ou valeur d’acquisition retenu pour l’application du 2 du I, d’autre part. Le surplus est dégrevé d’office. Dans ce cas, le contribuable fournit, à l’appui de la déclaration mentionnée au 2, les éléments de calcul retenus.

L’impôt acquitté localement par le contribuable et afférent à la plus-value effectivement réalisée hors de France est imputable sur l’impôt sur le revenu établi en France à condition d’être comparable à cet impôt.

4. Le défaut de production de la déclaration et de l’état mentionnés au 2 ou l’omission de tout ou partie des renseignements qui doivent y figurer entraînent l’exigibilité immédiate de l’impôt en sursis de paiement.

 

III. À l’expiration d’un délai de cinq ans suivant la date du départ ou à la date à laquelle le contribuable transfère de nouveau son domicile en France si cet événement est antérieur, l’impôt établi en application du I est dégrevé d’office en tant qu’il se rapporte à des plus-values afférentes aux droits sociaux qui, à cette date, demeurent dans le patrimoine du contribuable.

IV. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, et notamment les modalités permettant d’éviter la double imposition des plus-values constatées ainsi que les obligations déclaratives des contribuables et les modalités du sursis de paiement.’

V. Les dispositions du présent article sont applicables aux contribuables qui transfèrent leur domicile hors de France à compter du 9 septembre 1998.»

 

4.L’article 160, I, du code général des impôts français (ci-après le «CGI»), dans sa rédaction en vigueur à la date du décret n° 99-590, est libellé comme suit:

«Lorsqu’un associé, actionnaire, commanditaire ou porteur de parts bénéficiaires cède, pendant la durée de la société, tout ou partie de ses droits sociaux, l’excédent du prix de cession sur le prix d’acquisition – ou la valeur au 1er janvier 1949, si elle est supérieure – de ces droits est taxé exclusivement à l’impôt sur le revenu au taux de 16 %. En cas de cession d’un ou plusieurs titres appartenant à une série de titres de même nature acquis pour des prix différents, le prix d’acquisition à retenir est la valeur moyenne pondérée d’acquisition de ces titres. En cas de cession de titres après la clôture d’un plan d’épargne en actions défini à l’article 163 quinquies D ou leur retrait au-delà de la huitième année, le prix d’acquisition est réputé égal à leur valeur à la date où le cédant a cessé de bénéficier, pour ces titres, des avantages prévus aux 5° bis et 5° ter de l’article 157 et au IV de l’article 163 quinquies D.

L’imposition de la plus-value ainsi réalisée est subordonnée à la seule condition que les droits détenus directement ou indirectement dans les bénéfices sociaux par le cédant ou son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants, aient dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années. Toutefois, lorsque la cession est consentie au profit de l’une des personnes visées au présent alinéa, la plus-value est exonérée si tout ou partie de ces droits sociaux n’est pas revendu à un tiers dans un délai de cinq ans. À défaut, la plus-value est imposée au nom du premier cédant au titre de l’année de la revente de droits au tiers.

[…]

Les moins-values subies au cours d’une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des cinq années suivantes.

[…]

Les plus-values imposables en application du présent article ainsi que les moins-values doivent être déclarées dans les conditions prévues au 1 de l’article 170 selon les modalités qui sont précisées par décret.»

 

5. Aux termes de l’article 3, premier alinéa, du décret n° 99-590:

«Les contribuables qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France entre le 9 septembre 1998 et le 31 décembre 1998 souscrivent avant le 30 septembre 1999 la déclaration rectificative prévue au 2 de l’article 167 du code général des impôts au titre des plus-values imposables en application du 1 bis de l’article 167 et du I de l’article 167 bis du même code, ainsi que le formulaire spécial prévu à l’article 91 undecies de l’annexe II au code général des impôts.»

6. L’article R. 280-1 du livre des procédures fiscales (ci-après le «LPF»), qui a été inséré dans celui-ci par l’article 2 du décret n° 99-590, est libellé comme suit:

«Les contribuables qui entendent bénéficier du sursis de paiement prévu au II de l’article 167 bis du code général des impôts doivent faire parvenir au comptable du Trésor des non-résidents une proposition de garanties dans les formes prévues au deuxième alinéa de l’article R. 277-1 au plus tard huit jours avant la date du transfert du domicile hors de France. Il en est délivré récépissé.

Les dispositions du troisième alinéa de l’article R. 277-1, des articles R. 277-2 à R. 277-4 et de l’article R. 277-6 sont applicables.»

7. L’article R. 277-1 du LPF prévoit :

«Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l’article L. 277. Le contribuable dispose d’un délai de quinze jours à compter de la réception de l’invitation formulée par le comptable pour faire connaître les garanties qu’il s’engage à constituer.

Ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces qui sera effectué à un compte d’attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d’une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans des magasins agréés par l’État et faisant l’objet d’un warrant endossé à l’ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires, par des nantissements de fonds de commerce.

Si le comptable estime ne pas pouvoir accepter les garanties offertes par le contribuable parce qu’elles ne répondent pas aux conditions prévues au deuxième alinéa, il lui notifie sa décision par lettre recommandée.»

8. Aux termes de l’article R. 277-2 du LPF:

«En cas de dépréciation ou d’insuffisance révélée des garanties constituées, l’administration peut à tout moment, dans les mêmes conditions que celles prévues par les articles L. 277 et L. 279, demander au redevable, par lettre recommandée avec avis de réception, un complément de garantie pour assurer le recouvrement de la somme contestée. Les poursuites sont reprises si le redevable ne satisfait pas, dans le délai d’un mois, à cette demande.»

9. L’article R. 277-3 du LPF est libellé comme suit:

«Lorsque des garanties autres que celles qui sont prévues à l’article R. 277-1 sont offertes, elles ne peuvent être acceptées, sur la proposition du comptable chargé du recouvrement, que par le trésorier-payeur général ou par le receveur général des finances, trésorier-payeur général de la région parisienne s’il s’agit d’impôts directs perçus par voie de rôle, et par le directeur des services fiscaux ou le directeur régional des douanes et droits indirects, selon le cas, s’il s’agit d’autres impôts, droits ou taxes.»

10. L’article R. 277-4 du LPF dispose:

«Le contribuable peut être admis par le comptable chargé du recouvrement, à toute époque, à remplacer la garantie qu’il a constituée par l’une des autres garanties prévues à l’article R. 277-3, d’une valeur au moins égale.»

11. Aux termes de l’article R. 277-6 du LPF:

«Un arrêté du ministre chargé des finances détermine les conditions dans lesquelles les valeurs mobilières peuvent être constituées en garantie et notamment la nature de ces valeurs, ainsi que le montant pour lequel elles sont admises, ce montant étant calculé d’après le dernier cours coté au jour du dépôt.»

Le litige au principal et la question préjudicielle

  1. M. de Lasteyrie a quitté la France le 12 septembre 1998 pour s’installer en Belgique. Il détenait à cette date ou avait détenu à un moment quelconque au cours des cinq dernières années avant son départ de France, directement ou indirectement avec les membres de sa famille, des titres donnant droit à plus de 25 % des bénéfices sociaux d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés et ayant son siège social en France. La valeur vénale de ces titres étant alors supérieure à leur prix d’acquisition, M. de Lasteyrie a été soumis à l’impôt sur les plus-values conformément à l’article 167 bis du CGI et aux dispositions d’application de cet article.
  2. M. de Lasteyrie a demandé au Conseil d’État d’annuler le décret n° 99-590 pour excès de pouvoir en excipant de l’illégalité de l’article 167 bis du CGI au motif qu’il est contraire au droit communautaire.
  3. Le Conseil d’État a tout d’abord considéré, en premier lieu, que lesdites dispositions n’ont, contrairement à ce que soutient M. de Lasteyrie, ni pour objet ni pour effet de soumettre à de quelconques restrictions ou conditions l’exercice effectif, par les personnes qu’elles visent, de la liberté d’aller et de venir. En second lieu, il a rappelé que l’article 52 du traité s’oppose à l’institution par un État membre de règles qui auraient pour effet d’entraver l’établissement de certains de ses ressortissants sur le territoire d’un autre État membre.
  4. Ensuite, le Conseil d’État a considéré que l’article 167 bis du CGI prévoit l’assujettissement immédiat, dans les conditions qu’il définit, des contribuables qui se disposent à transférer hors de France leur domicile fiscal à une imposition assise sur des plus-values non encore réalisées (ci-après les «plus-values latentes») et qui, de ce fait, ne seraient pas taxées si lesdits contribuables maintenaient leur domicile en France.
  5. Toutefois, le Conseil d’État a également relevé que l’article 167 bis du CGI comporte des dispositions qui permettent d’éviter, en cas de sursis de paiement, que ces contribuables n’aient, en définitive, à supporter une charge fiscale à laquelle ils n’auraient pas été soumis, ou plus lourde que celle à laquelle ils auraient été soumis s’ils avaient conservé leur domicile en France et qui, en outre, leur accordent, au terme d’un délai de cinq ans, le bénéfice d’un dégrèvement, dans la mesure où les droits sociaux porteurs des plus-values continuent, alors, de figurer dans leur patrimoine, les intéressés ayant la faculté de solliciter le sursis au paiement de l’imposition jusqu’à ce terme.
  6. Le Conseil d’État a enfin souligné que l’obtention de ce sursis est subordonnée à la condition que les contribuables constituent des garanties propres à assurer le recouvrement de l’imposition. Toutefois, eu égard aux sujétions que peut comporter la constitution de telles garanties, le Conseil d’État se demande si le droit communautaire s’oppose à une réglementation telle que celle en cause dans le litige pendant devant lui.
  7. Dans ces conditions, estimant que le litige dont il est saisi présente une difficulté sérieuse au regard de la portée des règles communautaires applicables, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Le principe de la liberté d’établissement posé par l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) s’oppose[-t-il] à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values en cas de transfert du domicile fiscal, tel que celui décrit ci-dessus [?] »

 

Sur la question préjudicielle

Observations soumises à la Cour

  1. Les gouvernements allemand et néerlandais ont souligné que l’ordonnance de renvoi ne contenait pas d’éléments propres à établir que M. de Lasteyrie aurait fait usage de la liberté d’établissement garantie par l’article 52 du traité, ni, dès lors, qu’il relèverait du champ d’application de cette disposition.
  2. Pour sa part, dans les observations qu’il a déposées devant la Cour, M. de Lasteyrie a indiqué qu’il avait transféré son domicile fiscal en Belgique aux fins d’y exercer son activité professionnelle.
  3. Les gouvernements danois et allemand font valoir que l’article 167 bis du CGI ne comporte pas une entrave à la liberté d’établissement. Ils soulignent que ladite disposition n’est pas discriminatoire. En outre, elle n’empêcherait pas, directement ou indirectement, les ressortissants français de s’établir dans un autre État membre. Selon le gouvernement danois, il n’existerait aucun indice permettant d’affirmer que

l’imposition des plus-values en cause au principal limite la possibilité pour les ressortissants français de s’établir dans un autre État membre. En outre, le fait que l’octroi du sursis au paiement de l’impôt est subordonné à la constitution de garanties ne pourrait pas être considéré comme constituant une exigence susceptible d’exercer par elle-même une influence importante sur la possibilité des contribuables français de s’établir dans un autre État membre.

  1. M. de Lasteyrie, le gouvernement portugais et la Commission estiment que les effets restrictifs de l’article 167 bis du CGI comportent des entraves à l’exercice de la liberté d’établissement. À la différence des contribuables qui demeurent en France et qui sont taxés sur les plus-values seulement après la réalisation effective de celles-ci, ceux qui transfèrent leur résidence à l’étranger seraient imposés sur des plus-values latentes. À l’égard de ces derniers, le fait générateur de l’impôt serait déterminé par le transfert de leur domicile fiscal hors de France et non par la cession des titres concernés. En l’espèce, il s’agirait donc d’une restriction typique «à la sortie du territoire». Un tel régime pénaliserait les contribuables qui quittent la France par rapport à ceux qui y restent et introduirait de la sorte une différence de traitement discriminatoire. Le caractère provisoire de la taxation et la possibilité d’obtenir un sursis de paiement ne seraient pas de nature à exclure un tel effet restrictif, car l’octroi dudit sursis ne serait pas automatique et serait soumis à la condition de désigner un représentant fiscal établi en France. En outre, l’obligation de constituer des garanties impliquerait non seulement des coûts financiers, mais surtout l’indisponibilité du patrimoine donné en garantie. D’après M. de Lasteyrie une telle obligation constituerait à elle seule une entrave à la liberté d’établissement.
  2. Le gouvernement néerlandais considère que l’entrave à la liberté d’établissement que comporte l’article 167 bis du CGI est très limitée et, en tout état de cause, trop aléatoire et indirecte pour être regardée comme étant de nature à entraver effectivement une telle liberté.
  3. Pour sa part, le gouvernement français a concentré son analyse sur les justifications possibles d’une telle entrave. À cet égard, il fait tout d’abord valoir que l’article 167 bis du CGI n’est pas contraire à l’article 52 du traité eu égard à l’objectif poursuivi par le dispositif mis en place par cette disposition nationale, à savoir prévenir un risque d’évasion fiscale. Il résulterait du point 26 de l’arrêt du 16 juillet 1998, ICI (C-264/96, Rec. p. I-4695), que pourrait répondre à une raison impérieuse d’intérêt général une législation qui aurait pour objet spécifique d’exclure d’un avantage fiscal les montages purement artificiels dont le but serait de contourner la loi fiscale. Dès lors, une restriction à la liberté d’établissement résultant d’une disposition destinée à faire échec à une véritable fraude à la loi fiscale pourrait être envisagée dans le respect de cette liberté. En effet, dans un tel cas, il s’agirait d’une application dans le domaine fiscal de ce que la Cour a considéré comme l’«exercice abusif» d’un droit conféré par le droit communautaire (arrêt du 7 juillet 1992, Singh, C 370/90, Rec. p. I-4265).
  4. Ce gouvernement précise également que l’adoption de l’article 167 bis du CGI a été inspirée par le comportement de certains contribuables consistant à transférer temporairement leur domicile fiscal avant de céder des titres mobiliers dans le seul but d’éluder le paiement de l’impôt sur les plus-values dû en France. En outre, étant donné que l’effectivité des contrôles fiscaux constitue une raison impérieuse d’intérêt général (arrêt du 15 mai 1997, Futura Participations et Singer, C-250/95, Rec. p. I-2471, point 31), ledit gouvernement estime que l’efficacité du recouvrement d’un impôt exigible, qui constitue une phase ultérieure par rapport aux contrôles effectués dans le cadre de la procédure fiscale, devrait également être regardée comme une raison impérieuse.
  5. En outre, le gouvernement français soutient que l’absence d’instruments internationaux bilatéraux ou multilatéraux efficaces et permettant de conduire une action en recouvrement identique à celle pratiquée sur le territoire national contribue, selon lui, à rendre problématique le recouvrement de l’impôt lorsque le contribuable réside dans un autre État membre et justifie l’adoption de l’article 167 bis du CGI. Pour les mêmes raisons, la subordination de l’octroi du sursis de paiement à la constitution de garanties serait nécessaire.
  6. Ensuite, le gouvernement français souligne que l’application de l’article 167 bis du CGI est proportionnée au but poursuivi, car les sujétions imposées au contribuable sont limitées dans le temps. En effet, l’imposition établie n’est susceptible de devenir effective qu’à l’intérieur d’un délai de cinq ans suivant la date de l’expatriation. Au terme de ce délai, si l’intéressé n’a pas cédé ses titres, il est libéré de toute obligation fiscale à l’égard des autorités françaises. La fixation d’un délai de cinq ans assurerait l’efficacité du système et ferait obstacle à une fraude au moyen d’un établissement de brève durée à l’étranger.
  7. En outre, la nature des modalités d’imposition ne montrerait aucune disproportion. Si le sursis est refusé, c’est en raison de la propre faute du contribuable parce que, par exemple, il n’a pas établi une déclaration appropriée. Si le sursis est octroyé, la sujétion imposée au contribuable naît de l’obligation de constituer des garanties de paiement. Le contribuable concerné bénéficierait dans la quasi-totalité des cas d’un sursis de paiement. En pratique, le contribuable n’aurait donc aucun impôt à payer au moment du transfert de son domicile fiscal hors de France.
  8. Le gouvernement français souligne enfin que, en cas de cession des titres, le montant de l’impôt exigible en France serait calculé de façon à éviter toute surtaxation. L’impôt sur les plus-values éventuellement acquitté par l’intéressé en vertu de la législation fiscale de l’État d’accueil serait déduit du montant de l’impôt sur les plus-values dû en France. Par ailleurs, les moins-values constatées après le départ du contribuable de France donneraient lieu à un dégrèvement de l’impôt à due concurrence de celles-ci. De la même manière, les plus-values réalisées après ce départ seraient exclues de l’assiette de l’impôt dû en France.
  9. Les gouvernements danois, allemand et néerlandais estiment également que l’article 167 bis du CGI est justifié par des raisons impérieuses d’intérêt général et qu’il est proportionné au but poursuivi.
  10. À cet égard, le gouvernement danois fait notamment référence à l’arrêt du 28 avril 1998, Safir (C-118/96, Rec. p. I-1897, points 25 et 33), dans lequel la Cour aurait reconnu comme une raison impérieuse justifiant une entrave à la libre prestation des services la protection contre l’érosion fiscale de la base d’imposition.
  11. Le gouvernement allemand fait valoir, en premier lieu, que l’article 167 bis du CGI est fondé sur la répartition du pouvoir fiscal entre l’«État de départ» et l’«État de destination». Le droit de l’«État de départ» d’imposer les plus-values de participations dans des sociétés de capitaux résulterait du fait qu’elles sont régulièrement nées de l’activité de la société dans ce dernier État. Dès lors, elles seraient comprises dans le patrimoine du contribuable qui, jusqu’à son départ, est imposable dans cet État. En second lieu, le gouvernement allemand se réfère au point 26 de l’arrêt ICI, précité, dans lequel la Cour aurait reconnu, de manière générale, la possibilité d’une justification fondée sur le risque d’évasion fiscale.
  12. Le gouvernement néerlandais relève que la limitation du pouvoir fiscal aux plus-values réalisées dans l’État de résidence du contribuable et la prise en compte corrélative des plus-values constituées dans cet État lorsque les titres mobiliers sont vendus ou lorsque le domicile est transféré, est conforme au principe de la territorialité fiscale. Il considère que l’effet combiné de l’imposition lors de l’émigration du contribuable et de l’exigence d’une garantie pour obtenir un sursis de paiement, afin d’assurer la perception effective de l’impôt, est nécessaire pour garantir la cohérence du régime fiscal national. Un tel motif pourrait justifier une disposition restreignant les libertés fondamentales (arrêt du 28 janvier 1992, Bachmann, C-204/90, Rec. p. I-249), car, en l’occurrence, il existerait un lien direct entre le report de l’imposition annuelle de l’accroissement de capital lié aux titres mobiliers, d’une part, et la perception effective de l’impôt lors du déplacement du domicile à l’étranger, d’autre part. En outre, le gouvernement néerlandais considère que l’article 167 bis du CGI s’inscrit dans le cadre de la lutte contre l’évasion fiscale, en visant à empêcher que les contribuables ne transfèrent temporairement leur domicile hors de France afin de réaliser leurs titres mobiliers sans imposition significative des plus-values.
  13. Cependant, M. de Lasteyrie, le gouvernement portugais et la Commission font valoir que la présomption généralisée et automatique d’évasion contenue dans l’article 167 bis du CGI, qui entraîne une imposition immédiate des plus-values latentes, comporte des effets qui vont bien au-delà de ce qui est nécessaire pour lutter efficacement contre la fraude ou l’évasion fiscale et constitue, de ce fait, une entrave disproportionnée à la liberté d’établissement.
  14. M. de Lasteyrie observe que les conventions destinées à éviter la double imposition conclues par la République française comportent normalement une clause dite d’«assistance au recouvrement» permettant aux autorités fiscales françaises de se fonder sur ces dispositions pour recouvrer un impôt dû par des contribuables qui auraient transféré leur résidence dans un autre État membre de l’Union européenne. Le gouvernement portugais estime que, lorsqu’un assujetti transfère son domicile fiscal dans un autre État membre, les autorités compétentes sont tenues de coopérer et de mettre en place des procédures d’échange d’informations qui garantissent qu’il sera satisfait aux créances fiscales telles que celles en cause au principal.
  15. Selon la Commission, l’article 167 bis du CGI, par son caractère général, ne permettrait pas de discerner, au cas par cas, si le transfert a été effectivement inspiré par un but d’évasion fiscale. En effet, cette disposition n’aurait nullement pour objet spécifique d’exclure d’un avantage fiscal les montages purement artificiels dont le but serait de contourner la loi fiscale, car elle vise, de manière générale, toute situation dans laquelle un contribuable détenant des participations substantielles dans une société soumise à l’impôt sur les sociétés transfère, «pour quelque raison que ce soit», son domicile fiscal hors de France. À cet égard, il ressortirait du point 38 de l’arrêt du 9 mars 1999, Centros (C-212/97, Rec. p. I-1459), qu’il incombe à l’administration compétente de prouver, au cas par cas, l’existence d’une fraude.
  16. En outre, M. de Lasteyrie ainsi que la Commission font valoir que le sursis de paiement n’est pas accordé de plein droit et que le contribuable devra, en tout état de cause, être capable de présenter des garanties propres à assurer le paiement de l’impôt. Ces mesures ne seraient manifestement pas proportionnées au but poursuivi. La législation des autres États membres, comme celle du Royaume Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et celle du royaume de Suède, démontrerait que des solutions moins restrictives de la liberté d’établissement seraient envisageables.

Quant au régime des garanties, la Commission fait également valoir que celui-ci est discriminatoire eu égard à l’impossibilité de déposer en garantie des titres non cotés à une bourse française en l’absence d’une caution bancaire garantissant le paiement intégral des impôts dus.

 

Réponse de la Cour

 

  1. L’article 167 bis du CGI instaure le principe d’une imposition, à la date du transfert du domicile d’un contribuable hors de France, des plus-values de droits sociaux, celles-ci étant déterminées par la différence entre la valeur de ces droits à la date dudit transfert et leur prix d’acquisition. Cette imposition ne s’applique qu’aux contribuables qui détiennent, directement ou indirectement avec les membres de leur famille, des droits dans les bénéfices sociaux d’une société dépassant 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années précédant la date susmentionnée. La particularité de ladite disposition réside dans le fait qu’elle concerne l’imposition de plus-values latentes.
  2. Il convient d’examiner, en premier lieu, si l’article 167 bis du CGI, qui institue donc une imposition sur les plus-values latentes du seul fait du transfert hors de France du domicile d’un contribuable, est susceptible de restreindre l’exercice de la liberté d’établissement au sens de l’article 52 du traité.
  3. À cet égard, il convient de souligner que l’article 52 du traité constitue l’une des dispositions fondamentales du droit communautaire et est directement applicable dans les États membres depuis la fin de la période transitoire. En vertu de cette disposition, la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises dans les conditions définies par la législation de l’État d’établissement pour ses propres ressortissants (arrêts du 28 janvier 1986, Commission/France, 270/83, Rec. p. 273, point 13; du 29 avril 1999, Royal Bank of Scotland, C-311/97, Rec. p. I-2651, point 22, et du 13 avril 2000, Baars, C-251/98, Rec. p. I-2787, point 27).
  4. En réponse aux doutes exprimés par certains gouvernements quant à l’applicabilité de cette disposition au litige au principal, et en l’absence de précisions suffisantes sur ce point dans le dossier soumis à la Cour, il y a lieu de rappeler que dans le cadre d’une procédure visée à l’article 234 CE, fondé sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, toute appréciation des faits de la cause relève de la compétence du juge national (voir, notamment, arrêt du 25 février 2003, IKA, C-326/00, Rec. p. I-1703, point 27, et jurisprudence citée), et de constater que, en l’occurrence, la juridiction de renvoi paraît avoir conclu à l’applicabilité de l’article 52 du traité au litige qui lui est soumis.
  5. Il importe de préciser que, même si, à l’instar des autres dispositions relatives à la liberté d’établissement, l’article 52 du traité vise notamment, selon son libellé, à assurer le bénéfice du traitement national dans l’État membre d’accueil, il s’oppose également à ce que l’État membre d’origine entrave l’établissement dans un autre État membre de l’un de ses ressortissants (voir arrêt Baars, précité, point 28, et jurisprudence citée).
  6. Par ailleurs, même une restriction à la liberté d’établissement de faible portée ou d’importance mineure est prohibée par l’article 52 du traité (voir, en ce sens, arrêts du 28 janvier 1986, Commission/France, précité, point 21, et du 15 février 2000, Commission/France, C-34/98, Rec. p. I-995, point 49).
  7. En outre, l’interdiction pour les États membres d’établir des restrictions à la liberté d’établissement s’applique également aux dispositions fiscales. En effet, selon une jurisprudence constante, si, en l’état actuel du droit communautaire, la matière des impôts directs ne relève pas en tant que telle du domaine de la compétence de la Communauté, il n’en reste pas moins que les États membres doivent exercer leurs compétences retenues dans le respect du droit communautaire (voir arrêts du 14 février 1995, Schumacker, C-279/93, Rec. p. I-225, point 21; ICI, précité, point 19, et du 21 novembre 2002, X et Y, C-436/00, Rec. p. I-10829, point 32).
  8. En l’occurrence, même si l’article 167 bis du CGI n’interdit pas à un contribuable français d’exercer son droit d’établissement, cette disposition est néanmoins de nature à restreindre l’exercice de ce droit en ayant, à tout le moins, un effet dissuasif à l’égard des contribuables qui souhaitent s’installer dans un autre État membre.
  9. En effet, le contribuable désireux de transférer son domicile en dehors du territoire français, dans le cadre de l’exercice du droit que lui garantit l’article 52 du traité, est soumis à un traitement désavantageux par rapport à une personne qui maintient sa résidence en France. Ce contribuable devient redevable, du seul fait d’un tel transfert, d’un impôt sur un revenu qui n’est pas encore réalisé et dont il ne dispose donc pas, alors que, s’il demeurait en France, les plus-values ne seraient imposables que lorsque et dans la mesure où elles ont été effectivement réalisées. Cette différence de traitement concernant l’imposition des plus-values, qui est susceptible d’avoir des répercussions considérables sur le patrimoine du contribuable désireux de transférer son domicile hors de France, est de nature à décourager un contribuable de procéder à un tel transfert.
  10. L’examen des modalités d’application de ladite mesure confirme cette conclusion. En effet, bien qu’il soit possible de bénéficier d’un sursis de paiement, celui-ci n’est pas automatique et il est soumis à des conditions strictes telles que décrites par M. l’avocat général aux points 36 et 37 de ses conclusions, au nombre desquelles figure notamment la constitution de garanties. Ces garanties comportent par elles-mêmes un effet restrictif, dans la mesure où elles privent le contribuable de la jouissance du patrimoine donné en garantie.
  11. Il résulte de ce qui précède que la mesure en cause au principal est susceptible d’entraver la liberté d’établissement.
  12. Il importe de rappeler, en second lieu, qu’une mesure qui est susceptible d’entraver la liberté d’établissement consacrée par l’article 52 du traité ne saurait être admise que si elle poursuit un objectif légitime compatible avec le traité et est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général. Mais encore faut-il, en pareil cas, que son application soit propre à garantir la réalisation de l’objectif ainsi poursuivi et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci (voir arrêts précités Futura Participations et Singer, point 26, et jurisprudence citée, ainsi que X et Y, point 49).
  13. Pour ce qui concerne la justification tirée de l’objectif de prévenir l’évasion fiscale, mentionnée par la juridiction de renvoi dans la question préjudicielle, il convient de relever que l’article 167 bis du CGI n’a pas pour objet spécifique d’exclure d’un avantage fiscal les montages purement artificiels dont le but serait de contourner la législation fiscale française, mais vise, de manière générale, toute situation dans laquelle un contribuable détenant des participations substantielles dans une société soumise à l’impôt sur les sociétés transfère, pour quelque raison que ce soit, son domicile hors de France (voir, en ce sens, arrêts précités ICI, point 26, ainsi que X et Y, point 61).
  14. Or, le transfert du domicile d’une personne physique en dehors du territoire d’un État membre n’implique pas, en soi, l’évasion fiscale. Une présomption générale d’évasion ou de fraude fiscale ne saurait être fondée sur la circonstance que le domicile d’une personne physique a été transféré dans un autre État membre et justifier une mesure fiscale portant atteinte à l’exercice d’une liberté fondamentale garantie par le traité (voir, en ce sens, arrêts du 26 septembre 2000, Commission/Belgique, C-478/98, Rec. p. I-7587, point 45, ainsi que X et Y, précité, point 62).
  15. Dès lors, l’article 167 bis du CGI ne saurait, sans excéder largement ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif qu’il poursuit, présumer l’intention de contourner la loi fiscale française de tout contribuable qui transfère son domicile hors de France.
  16. Ainsi, sera également redevable de l’impôt en vertu de l’article 167 bis du CGI le contribuable qui cède ses titres avant l’expiration de la période de cinq années suivant la date du départ de France, même s’il n’a nullement l’intention de revenir dans cet État membre et continue de résider à l’étranger après l’écoulement de cette période.
  17. Par ailleurs, l’objectif envisagé, à savoir empêcher qu’un redevable ne transfère temporairement son domicile fiscal avant de céder des titres mobiliers dans le seul but d’éluder le paiement de l’impôt sur les plus-values dû en France, peut être atteint par des mesures moins contraignantes ou moins restrictives de la liberté d’établissement, ayant trait spécifiquement au risque d’un tel transfert temporaire. Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 64 de ses conclusions, les autorités françaises pourraient notamment prévoir la taxation du contribuable qui, après un séjour relativement bref dans un autre État membre, reviendrait en France après avoir réalisé ses plus-values, ce qui éviterait d’affecter la situation des contribuables n’ayant pas d’autre objectif que d’exercer en toute bonne foi leur liberté d’établissement dans un autre État membre.
  18. Les modalités d’application de l’article 167 bis du CGI ne permettent pas d’aboutir à une conclusion différente.
  19. En effet, ainsi qu’il a été indiqué au point 47 du présent arrêt, le sursis de paiement n’est pas automatique, mais il est soumis à des conditions strictes telles que l’obligation d’effectuer une déclaration dans le délai requis, de désigner un représentant établi en France et de constituer des garanties propres à assurer le recouvrement des impositions.
  20. Dans la mesure où l’application de ces conditions engendre des restrictions à l’exercice du droit d’établissement, l’objectif de prévenir l’évasion fiscale, qui n’est pas de nature à justifier le régime d’imposition prévu à l’article 167 bis du CGI, ne saurait davantage être utilement invoqué au soutien desdites conditions, qui sont destinées à mettre en œuvre ce régime.
  21. Dès lors, l’article 52 du traité s’oppose à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values latentes, tel que celui prévu à l’article 167 bis du CGI, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet État.
  22. Cependant, le gouvernement danois fait valoir que l’objectif de l’article 167 bis du CGI serait d’empêcher l’érosion fiscale de la base d’imposition de l’État membre concerné, en évitant que des contribuables tirent un avantage des différences qui existent entre les régimes fiscaux des États membres.
  23. À cet égard, il suffit de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie, la réduction de recettes fiscales ne saurait être considérée comme une raison impérieuse d’intérêt général pouvant être invoquée pour justifier une mesure en principe contraire à une liberté fondamentale (arrêts ICI, précité, point 28, et du 8 mars 2001, Metallgesellschaft e.a., C-397/98 et C-410/98, Rec. p. I-1727, point 59). Dès lors, le simple manque à gagner subi par un État membre du fait du transfert du domicile fiscal d’un contribuable dans un autre État membre, dans lequel la réglementation fiscale est différente et, le cas échéant, plus avantageuse pour ce contribuable, ne saurait en soi justifier une restriction du droit d’établissement.
  24. Quant au gouvernement néerlandais, il soutient que l’effet combiné de l’imposition lors de l’émigration et de l’exigence de garanties auxquelles est subordonné l’octroi du sursis au paiement effectif de l’impôt est nécessaire pour garantir la cohérence du système fiscal français, car il existerait un lien direct entre le report de l’imposition annuelle de l’accroissement de capital correspondant aux titres mobiliers, d’une part, et la perception effective de l’impôt lors du déplacement du domicile à l’étranger, d’autre part.
  25. La Cour a certes admis, afin de maintenir le lien entre la déductibilité des cotisations et l’imposition des sommes dues par les assureurs en exécution des contrats d’assurance, que la déductibilité fiscale de cotisations soit subordonnée à la condition que celles-ci soient payées dans cet État (arrêts Bachmann, précité, points 21 à 23, et du 28 janvier 1992, Commission/Belgique, C-300/90, Rec. p. I-305, points 14 à 20).
  26. Cependant, il ne saurait être soutenu que l’article 167 bis du CGI est de la même manière justifié par la nécessité de préserver la cohérence du système fiscal français.
  27. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le régime fiscal prévu à l’article 167 bis du CGI vise, ainsi qu’il a été précisé par le gouvernement français dans ses observations écrites, à prévenir les transferts temporaires de domicile hors de France motivés exclusivement par des raisons fiscales. En effet, l’adoption dudit article a été inspirée par le comportement de certains contribuables consistant à transférer temporairement leur domicile fiscal avant de céder des titres mobiliers dans le seul but d’éluder le paiement de l’impôt sur la plus-value dont ils sont redevables en France.
  28. L’article 167 bis du CGI ne semble donc pas avoir pour objectif d’assurer de manière générale l’imposition des plus-values, en cas de transfert du domicile d’un contribuable hors de France, pour autant qu’il s’agit de plus-values acquises lors du séjour de ce dernier sur le territoire français.
  29. Cette constatation est confortée par le fait que le régime fiscal en cause au principal permet un dégrèvement de toute imposition dont les plus-values, en cas de réalisation de celles-ci, ont fait l’objet dans le pays dans lequel le contribuable a transféré son domicile. En effet, une telle imposition pourrait avoir pour conséquence que les plus-values réalisées, y compris la partie de celles-ci acquise lors du séjour du contribuable en France, seront entièrement taxées dans ledit pays.
  30. Dans ces conditions, la prémisse sur laquelle est fondé l’argument de la cohérence fiscale invoqué par le gouvernement néerlandais ne se vérifie pas eu égard à l’objectif poursuivi par le régime fiscal prévu à l’article 167 bis du CGI. Dès lors, la justification d’un tel régime tirée d’un objectif de cohérence fiscale, qui par ailleurs n’a pas été invoquée par le gouvernement français, ne saurait être retenue.
  31. Concernant l’argument du gouvernement allemand selon lequel il convient de tenir compte de la répartition du pouvoir fiscal entre l’État de départ et l’État d’accueil, il suffit de relever, ainsi que M. l’avocat général l’a fait au point 82 de ses conclusions, que le litige ne porte pas sur la répartition du pouvoir d’imposition entre États membres ni sur le droit des autorités françaises d’imposer des plus-values latentes en voulant réagir à des transferts de domicile artificiels, mais sur la question de savoir si les mesures adoptées dans ce but sont conformes aux exigences de la liberté d’établissement.
  32. En conséquence, il convient de répondre à la question posée que le principe de la liberté d’établissement posé par l’article 52 du traité doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values latentes, tel que celui prévu à l’article 167 bis du CGI, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet État.

Sur les dépens

 

  1. Les frais exposés par les gouvernements français, danois, allemand, néerlandais et portugais, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre), statuant sur la question à elle soumise par le Conseil d’État, par décision du 14 décembre 2001, dit pour droit:

Le principe de la liberté d’établissement posé par l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values non encore réalisées, tel que celui prévu à l’article 167 bis du code général des impôts français, en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet État.

Timmermans La Pergola von Bahr

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 mars 2004.

 

Le greffier Le président

R. Grass V. Skouris

 

Paragraphe 2 – la Commission demande à l’Allemagne de mettre fin aux règles d’«imposition à la sortie»

La Commission européenne, le 19 avril 2004, a officiellement demandé à l’Allemagne d’abolir ses dispositions en matière d’«imposition à la sortie». La Commission estime que le régime d’«imposition à la sortie» (article 6 de la loi sur les relations fiscales présentant des aspects internationaux) est incompatible avec les règles du traité CE relatives au droit des citoyens de résider, de travailler et de s’établir dans un autre État membre (articles 18, 39 et 43). La position de la Commission repose sur la jurisprudence de la Cour européenne de justice et, notamment, son arrêt du 11 mars 2004 dans l’affaire C-9/02 (de Lasteyrie du Saillant). La demande officielle se présente sous la forme d’un «avis motivé», conformément aux procédures d’infraction au traité CE (article 226). Si l’État membre ne répond pas de manière satisfaisante à l’avis motivé dans un délai de deux mois, la Commission peut saisir la Cour de justice.

Selon l’article 6 de la loi allemande relative aux relations fiscales avec des pays étrangers, les redevables assujettis sans limitation à l’impôt sur le revenu en Allemagne pendant au moins dix ans et qui ont détenu une participation directe ou indirecte d’au moins 1 % dans une société allemande par actions au cours des cinq dernières années voient leurs plus-values non réalisées être assujetties à l’impôt allemand sur le revenu s’ils quittent le pays. À l’inverse, les plus-values des résidents en Allemagne ne sont taxées que si elles sont réalisées.

La Commission estime qu’une telle imposition à la sortie est incompatible avec les règles du traité CE relatives au droit des citoyens de résider, de travailler et de s’établir dans un autre État membre (articles 18, 39 et 43), étant donné que le changement de résidence vers un autre État membre donne lieu à des impôts qui ne sont pas dus si un redevable transfère sa résidence en Allemagne. La Commission estime qu’il n’existe aucune raison valable justifiant une telle entrave manifeste à la libre circulation des personnes dans le marché intérieur.

La Commission reconnaît que l’Allemagne peut légitimement taxer les plus-values. La violation du droit de l’UE ne résulte donc pas de l’imposition des plus-values en tant que telle, mais plutôt du fait que la dette fiscale naît avant la réalisation des plus-values uniquement dans le cas où les redevables partent à l’étranger.

Dans son arrêt du 11 mars 2004 sur l’affaire «de Lasteyrie du Saillant» (C-9/02), la Court a statué que «le principe de la liberté d’établissement posé par l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre institue, à des fins de prévention d’un risque d’évasion fiscale, un mécanisme d’imposition des plus-values non encore réalisées, […], en cas de transfert du domicile fiscal d’un contribuable hors de cet État.»

La Commission examine également si les règles d’«imposition à la sortie» adoptées par d’autres États membres sont conformes au traité.

 

THEME III – UNE NOUVELLE directive pour intensifier l’echange de renseignements


Cette directive vise à accélérer le flux d’informations entre les autorités fiscales des États membres. Elle doit permettre aux États membres de coordonner leurs enquêtes en matière de fraude fiscale transfrontalière et de prendre en charge davantage de procédures pour le compte les uns des autres.

Cette directive, basée sur une proposition de la Commission de juillet 2003, actualise la directive 77/799/CEE sur l’assistance mutuelle.

Les technologies modernes et l’intensification des activités transfrontalières font qu’il est plus important que jamais d’améliorer les échanges d’informations et la coopération entre les administrations fiscales.

Un rapport du Conseil de juin 2000 sur la fraude fiscale a fait remarquer que les directives et règlements communautaires en vigueur étaient insuffisants pour combattre la fraude, qui prend notamment la forme d’une sous-facturation ou d’une surfacturation (prix de transfert) dans le domaine de la fiscalité directe. Cette directive vient compléter la législation récemment adoptée par l’Union européenne en matière d’échange d’informations, à savoir l’accord sur la fiscalité des revenus de l’épargne  et le règlement sur le renforcement de la coopération administrative dans le domaine de la TVA.

 

– La directive prévoit, pour les États membres, la possibilité de procéder à des contrôles simultanés des activités locales d’assujettis opérant dans plusieurs pays de l’Union et de s’échanger les informations ainsi obtenues;

– La directive permet à un État qui doit ouvrir une enquête en vue d’obtenir des informations demandées par l’administration fiscale d’un autre pays d’effectuer les recherches comme s’il agissait pour son propre compte (les enquêtes nationales étant généralement soumises à des procédures moins complexes, les informations pourraient être communiquées plus rapidement);

– La directive permet à un État membre qui a été invité à fournir des informations de procéder éventuellement, au nom de l’État membre requérant, à certains actes administratifs tels que la notification d’un avis de recouvrement rectificatif;

– La directive lève des ambiguïtés subsistant dans la directive 77/799/CEE, mettant fin à certaines différences d’interprétation entre les États membres.

 

Le texte de la directive est repris ci-après :

DIRECTIVE 2004/56/CE DU CONSEIL
du 21 avril 2004
modifiant la directive 77/799/CEE concernant l’assistance mutuelle
des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs,
de certains droits d’accises et des taxes sur les primes d’assurance

LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment ses articles 93 et 94,

vu la proposition de la Commission,

vu l’avis du Parlement européen,

vu l’avis du Comité économique et social européen, considérant ce qui suit:

 

(1) La directive 77/799/CEE du 19 décembre 1977 concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs, de certains droits d’accises et des taxes sur les primes d’assurance a fixé les principes de base pour la coopération administrative et l’échange d’informations entre États membres afin d’identifier et d’empêcher les différentes formes de fraude et d’évasion fiscales ainsi que pour permettre aux États membres d’établir correctement l’impôt. Il est donc capital d’améliorer, d’étoffer et de moderniser ces principes de base.

(2) Lorsqu’un État membre enquête pour obtenir les informations nécessaires dans le cadre d’une demande d’assistance, cet État doit être considéré comme agissant pour son propre compte; de cette manière, la collecte des informations ne sera régie que par un seul ensemble de dispositions et l’enquête ne sera pas compromise par la longueur des délais nécessaires à sa réalisation.

(3) Pour que la lutte contre la fraude fiscale soit pleinement efficace, il n’est pas approprié qu’un État membre ayant reçu des informations d’un autre État membre ait ensuite à demander l’autorisation de faire état de ces informations au cours d’audiences publiques ou dans des jugements.

(4) Il convient de stipuler clairement qu’un État membre n’est nullement tenu d’effectuer des enquêtes afin d’obtenir les informations nécessaires pour répondre à une demande d’assistance lorsque sa législation ou ses pratiques administratives n’autorisent pas son autorité compétente à les effectuer ou à recueillir ces informations.

(5) L’autorité compétente d’un État membre devrait pouvoir refuser de fournir des informations ou de prêter assistance si l’État membre requérant n’est pas en mesure de fournir des informations de même nature pour des raisons de fait ou de droit.

(6) Compte tenu de l’obligation légale existant dans certains États membres d’informer le contribuable des décisions et actes ayant trait à son assujettissement à l’impôt et des difficultés que cela pose pour les autorités fiscales, notamment lorsque ce contribuable est allé s’établir dans un autre État membre, il est souhaitable qu’en pareil cas les autorités fiscales puissent solliciter l’assistance des autorités compétentes de l’État membre où l’assujetti a transféré son domicile.

(7) Vu que la situation fiscale d’un ou plusieurs assujettis établis dans différents États membres présente souvent un intérêt commun ou complémentaire, il conviendrait de rendre possible la réalisation de contrôles simultanés de ces assujettis par plusieurs États membres, par le biais d’un accord mutuel et sur une base volontaire chaque fois que de tels contrôles apparaissent plus efficaces que des contrôles effectués par un seul État membre.

(8) La Commission a présenté sa proposition de directive sur la base de l’article 95 du traité. Estimant que la proposition de directive portait sur l’harmonisation des législations tant dans le domaine des impôts directs que dans celui des impôts indirects et que l’acte devait donc être adopté sur la base des articles 93 et 94 du traité, le Conseil, par lettre du 12 novembre 2003, a consulté le Parlement européen en l’informant de son intention de modifier la base juridique.

(9) La directive 77/799/CEE doit dès lors être modifiée en conséquence,

 

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:

 

Article premier


La directive 77/799/CEE est modifiée comme suit :

1) l’article 1er, paragraphe 5, est modifié comme suit :

a) le texte sous les termes «en Italie» est remplacé par le texte suivant:

«Il Capo del Dipartimento per le Politiche Fiscali ou ses représentants autorisés»

b) le texte sous les termes «en Suède» est remplacé par le texte suivant :

«Chefen för Finansdepartementet ou son représentant autorisé»

 

2) à l’article 2, paragraphe 2, l’alinéa suivant est ajouté :

«Pour se procurer les informations demandées, l’autorité requise, ou l’autorité administrative saisie par cette dernière, procède comme si elle agissait pour son propre compte ou à la demande d’une autre autorité de son propre État membre.»

 

3) l’article 7, paragraphe 1, est remplacé par le texte suivant :

«1. Toutes les informations dont un État membre a connaissance par application de la présente directive sont tenues secrètes, dans cet État, de la même manière que les informations recueillies en application de sa législation nationale. En tout état de cause, ces informations :

– ne sont accessibles qu’aux personnes directement concernées par l’établissement de l’impôt ou par le contrôle administratif de l’établissement de l’impôt,

– ne sont dévoilées qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire, d’une procédure pénale ou d’une procédure entraînant l’application de sanctions administratives, engagées en vue de ou en relation avec l’établissement ou le contrôle de l’établissement de l’impôt, et seulement aux personnes intervenant directement dans ces procédures; il peut toutefois être fait état de ces informations au cours d’audiences publiques ou dans des jugements, si l’autorité compétente de l’État membre qui fournit les informations ne s’y oppose pas lors de leur transmission initiale,

– ne sont, en aucun cas, utilisées autrement qu’à des fins fiscales ou aux fins d’une procédure judiciaire, d’une procédure pénale ou d’une procédure entraînant l’application de sanctions administratives, engagées en vue de ou en relation avec l’établissement ou le contrôle de l’établissement de l’impôt.

 

En outre, les États membres peuvent prévoir que les informations visées au premier alinéa soient utilisées pour établir d’autres prélèvements, droits et taxes relevant de l’article 2 de la directive 76/308/CEE.

 

4) l’article 8 est modifié comme suit:

a) le paragraphe 1 est remplacé par le texte suivant:

«1. La présente directive n’impose pas à un État membre auquel est transmise une demande d’information l’obligation de procéder à des enquêtes ou de transmettre des informations dès lors que la réalisation de telles enquêtes ou la collecte des informations en question par l’autorité compétente de cet État membre est contraire à sa législation ou à ses pratiques administratives.»

b) le paragraphe 3 est remplacé par le texte suivant:

«3. L’autorité compétente d’un État membre peut refuser la transmission d’informations lorsque l’État membre requérant n’est pas en mesure de fournir des informations de même nature pour des raisons de fait ou de droit.»

 

5) Les articles 8 bis et 8 ter suivants sont insérés:

 

«Article 8 bis

 

Notification

 

1. À la demande de l’autorité compétente d’un État membre, l’autorité compétente d’un autre État membre procède à la notification, selon les règles de droit en vigueur pour la notification des actes correspondants dans l’État membre requis, de tous actes et décisions émanant des autorités administratives de l’État membre requérant et concernant l’application sur son territoire de la législation relative aux impôts relevant du champ d’application de la présente directive.

2. Les demandes de notification mentionnent l’objet de l’acte ou de la décision à notifier et indiquent le nom, l’adresse et tout autre renseignement susceptible de faciliter l’identification du destinataire.

3. L’autorité requise informe sans tarder l’autorité requérante de la suite donnée à la demande de notification et lui notifie, en particulier, la date à laquelle la décision ou l’acte a été notifiée au destinataire.

 

Article 8 ter

Contrôles simultanés

1. Lorsque la situation d’un ou de plusieurs assujettis présente un intérêt commun ou complémentaire pour plusieurs États membres, ceux-ci peuvent convenir de procéder à des contrôles simultanés, chacun sur son propre territoire, en vue d’échanger les renseignements ainsi obtenus, chaque fois qu’ils apparaissent plus efficaces que des contrôles qui ne seraient effectués que dans un seul État membre.

2. L’autorité compétente de chaque État membre identifie de manière indépendante les assujettis pour lesquels elle a l’intention de proposer un contrôle simultané. Elle informe les autorités compétentes de chaque autre État membre concerné des dossiers qui, selon elle, devraient faire l’objet de contrôles simultanés. Elle motive son choix, dans toute la mesure du possible, en fournissant les renseignements qui ont mené à cette décision. Elle indique le délai dans lequel ces contrôles devraient être réalisés.

3. L’autorité compétente de chaque État membre concerné décide ensuite si elle souhaite participer aux contrôles simultanés. L’autorité compétente à laquelle un contrôle simultané a été proposé donne à l’autorité homologue confirmation de son acceptation ou lui fait part de son refus motivé d’effectuer ce contrôle.

4. Chaque autorité compétente des États membres concernés désigne un représentant chargé de diriger et de coordonner le contrôle.»

 

Article 2

Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive entrent en vigueur au plus tard le 1er janvier 2005. Ils les communiquent immédiatement à la Commission et lui transmettent un tableau de correspondance entre ces dispositions et la présente directive.

Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

 

Article 3

La présente directive entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

 

Article 4

Les États membres sont destinataires de la présente directive.

 

Fait à Luxembourg, le 21 avril 2004.

Par le Conseil

Le président

J. WALSH

 

THEME IV – Le dernier rapport de l’ocde sur la concurrence fiscale dommageable


L’OCDE annonce, le 22 mars 2004, de nouveaux progrès dans la lutte contre les pratiques fiscales dommageables

Les pays de l’OCDE ont fait de grands progrès dans les efforts qu’ils déploient pour éliminer les pratiques fiscales dommageables de leurs économies, avec la modification ou la suppression de plus de 30 des régimes fiscaux préférentiels identifiés en 2000 comme potentiellement dommageables.

Selon un rapport publié aujourd’hui par le Comité des affaires fiscales, sur un total de 47 régimes fiscaux préférentiels cités en 2000, 18 ont été abolis ou sont en passe de l’être, 14 ont été modifiés de manière à en supprimer toute disposition dommageable et à l’issue d’un examen plus approfondi, 13 ont été déclarés finalement non dommageables.

Deux régimes, la pratique dite 50/50 en Suisse (auparavant appelée régime des sociétés administratives) et le régime des sociétés holding de 1929 du Luxembourg, à propos duquel des propositions de modification ont été déposées devant le Parlement luxembourgeois, feront l’objet d’un nouvel examen cette année. La liste complète des régimes fiscaux préférentiels passés en revue par le Comité figure dans la publication intitulée « Projet de l’OCDE sur les pratiques fiscales dommageables : Rapport d’étape 2004 « , dont des extraits seront repris ci-après.

Le rapport fait le point sur les efforts mis en œuvre pour combattre des pratiques telles que le manque de transparence ou l’absence d’échange de renseignements à des fins fiscales qui sapent la capacité des pays de l’OCDE à faire appliquer leurs propres législations fiscales. De telles pratiques ont en outre pour effet d’éroder la confiance du public dans l’équité des systèmes fiscaux et font obstacle à la concrétisation des avantages potentiels d’une juste concurrence fiscale tels que l’abaissement des taux d’imposition par exemple.

Parallèlement, les pays de l’OCDE continuent à collaborer avec les pays et territoires non membres qui ont pris l’engagement d’améliorer la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale. Au total, 33 pays et territoires non membres sont partenaires participants au projet de l’OCDE sur les pratiques fiscales dommageables. Cinq juridictions (Andorre, le Libéria, le Liechtenstein, les Îles Marshall et Monaco) figurent toujours sur la liste des paradis fiscaux non coopératifs dressée par l’OCDE, mais l’Organisation n’a pas renoncé à obtenir leur coopération.

Extrait du rapport :

 

PARTIE II : TRAVAUX CONCERNANT LES PAYS MEMBRES

 

4. Les pays Membres de l’OCDE qui ont approuvé le Rapport de 1998 sont convenus d’agir collectivement et individuellement pour mettre fin aux pratiques fiscales dommageables résultant de régimes préférentiels en vigueur dans certains d’entre eux. A cette fin, le Comité a adopté en 1998 certains critères pour déterminer si un régime fiscal préférentiel était dommageable (les critères des régimes préférentiels), ainsi que des principes directeurs à appliquer aux régimes préférentiels dommageables dans les pays Membres. En vertu de ces principes, il a été demandé aux pays Membres :

 

  • De s’abstenir d’adopter de nouvelles mesures constituant des pratiques fiscales dommageables, d’élargir le champ d’application de mesures existantes ou de les renforcer ;
  • De réexaminer les mesures existantes afin d’identifier celles qui constituent des pratiques fiscales dommageables ; et
  • De mettre fin dans un délai de cinq ans aux aspects dommageables de tout régime préférentiel.

 

5. Pour mener à bien ses travaux d’identification des régimes préférentiels dommageables, le Forum a demandé à chaque pays Membre de procéder à une auto-évaluation de ses régimes fiscaux préférentiels par rapport aux critères des régimes préférentiels. Une fois les auto-évaluations achevées, une procédure d’évaluation mutuelle a été engagée pour chaque régime préférentiel recensé.

6. En 2000, le Comité a identifié 47 régimes fiscaux préférentiels regroupés en neuf catégories principales comme étant potentiellement dommageables. Ces neuf catégories étaient les assurances, le financement et le crédit-bail, la gestion de fonds, la banque, les régimes des sièges sociaux, les régimes des centres de distribution, les régimes des centres de services, les régimes des transports maritimes et les activités diverses. Pour être aussi complet que possible, un régime fiscal préférentiel a été considéré comme potentiellement

dommageable s’il présentait des caractéristiques montrant qu’il constituait une pratique fiscale dommageable même en l’absence d’évaluation globale de tous les facteurs à prendre en compte pour déterminer si ce régime était effectivement dommageable. En conséquence, un régime était considéré comme potentiellement dommageable si par exemple, la question du caractère effectif du dommage dépendait de l’application du régime dans des circonstances spécifiques ou si le régime présentait des aspects préoccupants au regard des critères de régime préférentiel sans que la question de savoir s’il était ou non effectivement dommageable ait été tranchée. Les régimes de sociétés holding et les régimes fiscaux préférentiels similaires ont également fait l’objet d’une évaluation, mais n’ont pas été identifiés en 2000 comme des régimes préférentiels potentiellement dommageables compte tenu du fait qu’une analyse plus approfondie des effets de ces régimes était nécessaire en raison des problèmes complexes qu’ils posaient.

7. Le Comité a reconnu que de nouveaux travaux étaient nécessaires pour interpréter la manière dont les critères des régimes préférentiels devraient s’appliquer. Par conséquent, des orientations, appelées « notes d’application », ont été élaborées pour aider les pays Membres à déterminer les régimes potentiellement dommageables qui l’étaient effectivement ou qui pouvaient être appliqués de manière à l’être et à déterminer les moyens de mettre fin aux aspects dommageables. Des notes d’application ont été établies sur la transparence et les échanges de renseignements, le cantonnement, les prix de transfert, les décisions anticipées, les sociétés de portefeuille, la gestion de fonds et les transports maritimes.

Les différentes notes individuelles ont été rassemblées en une seule Note d’application de synthèse (disponible sur le site Internet de l’OCDE à l’adresse http://www.oecd.org/ctp).

8. Le Comité a reconnu la nécessité de faire participer les milieux d’affaires à l’élaboration de la Note d’application de synthèse. Pour cette raison, il a régulièrement consulté le Comité consultatif économique et industriel (BIAC) pour connaître ses vues. En outre, la Note d’application de synthèse a été diffusée auprès de 59 économies non membres de l’OCDE et de dix organisations internationales ou régionales pour qu’elles fassent part de leurs commentaires, et elle a été examinée lors d’une réunion de septembre 2002 du Forum mondial. Des commentaires ont été reçus et insérés dans la Note.

9. Le chapitre de la Note d’application de synthèse consacré à la transparence et à l’échange de renseignements reprend les principes du Modèle d’accord sur l’échange de renseignements en matière fiscale (examiné de manière plus approfondie ci-dessous) et donne des indications sur les types de renseignements et de pratiques requis en vertu du critère de transparence pour que des informations pertinentes et fiables puissent être communiquées en réponse à une demande de renseignements.

Le chapitre sur le cantonnement clarifie le critère et donne des exemples spécifiques pour illustrer ce concept. Le chapitre sur les prix de transfert décrit d’une façon générale la manière dont les pratiques en matière de prix de transfert peuvent entrer en ligne de compte dans l’application des critères des régimes préférentiels ; il ne remplace ni ne modifie d’une manière ou d’une autre les Principes de 1995 de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert. Comme un grand nombre de régimes préférentiels des pays Membres ont été mis en place par le biais des pratiques de décisions anticipées, le chapitre sur les décisions anticipées donne des indications sur les caractéristiques des pratiques suivies dans ce domaine qui risquent d’avoir des conséquences dommageables sur le plan fiscal. Les chapitres sur les sociétés holding, la gestion de fonds et les transports maritimes traitent de l’application des critères des régimes préférentiels dans le contexte des caractéristiques spécifiques de ces types de régimes.

10. Il a été demandé à chaque pays Membre de l’OCDE d’utiliser les indications figurant dans la Note d’application de synthèse pour procéder à une nouvelle auto-évaluation de ses régimes préférentiels identifiés en 2000, ainsi que de tout régime potentiellement dommageable instauré depuis l’identification des 47 régimes potentiellement dommageables. Tous les pays Membres ont participé au processus d’examen. Ces examens comprenaient la fourniture de descriptions mises à jour des régimes, dans la mesure où beaucoup de régimes avaient déjà été amendés, ainsi qu’une auto-évaluation de chaque régime au regard des critères caractérisant un régime préférentiel. Après l’achèvement des auto-évaluations, un nouveau processus d’examen mutuel a été entrepris pour chaque régime. Au cours de ces examens, il a été demandé aux pays Membres de faire connaître leurs évaluations des régimes des autres pays Membres au regard des critères de régime préférentiel, et de déterminer si ces régimes étaient dommageables sur la base d’une évaluation d’ensemble de tous les facteurs significatifs, ainsi que, le cas échéant, des considérations économiques correspondantes.

11. Les conclusions qui ont été tirées concernant les régimes identifiés comme potentiellement dommageables en 2000 sont résumées dans le tableau ci-dessous.

Tableau des conclusions concernant les régimes potentiellement dommageables identifiés en 2000


 

 


 


 

 

12. Comme le montre le tableau ci-dessus, 18 régimes ont été abolis ou sont sur le point de l’être, 14 ont été modifiés de façon à ce que leurs aspects potentiellement dommageables soient supprimés et 13 ont été jugés non dommageables après une analyse plus approfondie. Le Comité a décidé que lorsqu’un régime était en cours de suppression, il devait être indiqué comme supprimé dans le tableau ci-dessus si (1) aucun nouvel adhérent au régime n’est accepté, si (2) une date précise a été annoncée pour la suppression totale du régime et si (3) le régime est transparent et prévoit des échanges effectifs de renseignements. En conséquence, les régimes concernant les réserves pour risque en matière de financement des groupes aux Pays-Bas, le centre d’activités internationales de Madère au Portugal, les centres de coordination en Belgique et les centres de commerce international en Islande ont été considérés comme supprimés.

13. Le régime des centres bancaires extraterritoriaux en Australie et celui des centres bancaires internationaux au Canada ont suscité quelques préoccupations au regard du critère de cantonnement. Dans son évaluation d’ensemble, le Comité a estimé que ces régimes potentiellement dommageables ne l’étaient cependant pas réellement, dans la mesure où il n’apparaît pas qu’ils aient occasionné des effets dommageables. Cette conclusion s’est fondée sur les caractéristiques spécifiques de ces régimes, à savoir leur nature actuellement limitée et leur champ d’application réduit. Le fait que les pays en question appliquent des critères très stricts en matière de transparence et d’échange de renseignements à des fins fiscales a joué un rôle essentiel dans cette conclusion.

14. Les régimes de transports maritimes identifiés comme potentiellement dommageables en 2000 ont été considérés comme non dommageables sur la base des nouvelles indications figurant dans la note d’application sur les transports maritimes. La note d’application revient en effet de manière plus détaillée sur les critères des régimes préférentiels en tenant compte des particularités du secteur des transports maritimes. Par exemple, le critère de cantonnement n’est pertinent qu’en cas d’application d’un traitement fiscal différent à des activités identiques ou à des activités similaires. La note donne des indications qui facilitent la détermination des cas dans lesquels des activités de transport maritime sont comparables (par exemple des navires de pêche et des navires affectés au transport de passagers ou de marchandises ne sont pas comparables). Aucun de ces régimes ne posait de problèmes concernant la transparence et l’échange de renseignements.

15. Un certain nombre de régimes de sociétés holding ainsi que des régimes préférentiels similaires ont été présentés au Forum dans le cadre du processus initial d’examen qui a abouti au Rapport 2000.

Le Forum a examiné plus particulièrement les régimes de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Belgique, du Danemark, de l’Espagne, de la France, de la Grèce, de l’Irlande, de l’Islande, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Portugal et de la Suisse. Comme on l’a indiqué précédemment, aucun régime de société holding ni aucun régime préférentiel similaire n’a été identifié en 2000 comme potentiellement dommageable parce que le Comité a estimé qu’étant donné la complexité de ces régimes, d’autres travaux étaient nécessaires pour interpréter la manière dont les critères de régime préférentiel devaient leur être appliqués. Le chapitre VI de la Note d’application de synthèse examine l’application des critères des régimes préférentiels aux sociétés holding et aux régimes préférentiels similaires. Il faut souligner que la Note d’application reconnaît que les régimes des sociétés holding et les régimes préférentiels similaires poursuivent un but légitime en autorisant le rapatriement des revenus de source étrangère sans que cela donne lieu à plusieurs niveaux d’imposition. Après avoir examiné ces régimes à la lumière des indications qui figurent dans le chapitre VI de la Note d’application de synthèse, il est apparu que tous répondaient au critère de départ d’une imposition faible ou nulle. Nonobstant son abstention rappelée dans la première note en bas de page, la Suisse est néanmoins prête à un accord sur l’échange effectif de renseignements, dans le contexte de ses conventions fiscales bilatérales, en ce qui concerne les sociétés holding. De plus, les régimes en vigueur en Allemagne, en Autriche [après modification], en Belgique, au Danemark, en Espagne, en France, en Grèce, en Irlande, en Islande, au Luxembourg (exonération des participations), aux Pays-Bas et du Portugal ont été considérés comme non dommageables. Le Luxembourg a déclaré avoir soumis à son Parlement des modifications de son régime des sociétés de holding de 1929 qui, en pleine conformité avec l’ECOFIN du 3 juin 2003 et les conclusions du Code de Conduite, supprimera les aspects dommageables de ce régime tel que défini dans le Code de conduite de l’Union européenne et convenu par l’ECOFIN. Le Comité reconnait les modifications du régime proposées mais demeure préoccupé que l’aspect dommageable de manque d’échange effectif de renseignements, tel que défini dans le Rapport de 1998, n’ait pas été adressé. Le Comité examinera ce point de façon plus approfondie.

16. Les Principes directeurs applicables au traitement des régimes fiscaux préférentiels dommageables donnent la possibilité à tout pays de demander au Forum d’examiner n’importe quelle mesure, qu’elle ait été prise par lui-même ou par un autre pays. Conformément à ces dispositions, le Forum a également entrepris l’examen d’un certain nombre de nouveaux régimes qui ont été instaurés depuis l’identification des régimes préférentiels potentiellement dommageables en 2000. En particulier, un certain nombre de régimes de taxe au tonnage pour les activités de transport maritime qui ont été instaurés depuis 2000 par la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Irlande et le Royaume-Uni ont été examinés. Par ailleurs, le dispositif d’accord préalable en matière de prix/d’agrément fiscal préalable mis en place aux Pays-Bas et le dispositif d’agrément fiscal préalable en vigueur en Belgique ont été également examinés. Ces régimes ne sont pas considérés par le Forum comme constituant des pratiques fiscales dommageables.

17. Comme l’indique la partie V du présent rapport, les travaux futurs consisteront notamment à assurer le suivi des régimes fiscaux préférentiels qui sont maintenus et de ceux qui ont été récemment instaurés, y compris les régimes adoptés à titre de remplacement d’un autre. Cela permettra à tout pays Membre de demander un nouvel examen des régimes existants dans le cas où il considérerait que la nature du régime, que son champ d’application ou que son mode d’utilisation ont changé, de telle manière qu’il pourrait sembler réellement dommageable, ou de demander un examen de tous régimes fiscaux préférentiels récemment instaurés, dans la mesure où ces régimes posent des problèmes au regard des critères des régimes préférentiels.

18. La conclusion qu’un régime n’est pas réellement dommageable au regard des critères des régimes préférentiels n’implique aucun jugement des pays membres de l’OCDE sur la politique des autorités qui appliquent ce régime. En outre, la conclusion selon laquelle un régime n’est pas dommageable n’empêche en aucune façon un pays d’appliquer une mesure interne quelle qu’elle soit (par exemple dispositions relatives aux sociétés étrangères contrôlées, aux fonds étrangers d’investissement, ou toute autre disposition anti-abus) à ce régime ou à tout autre régime.

 

 

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