ANALYSE DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE DU GOUVERNEMENT FRANCAIS POUR 1998


Article publié dans la Revue « Fiscalité Européenne et Droit International des Affaires » 1997/4

Pierre FONTANEAU

Henri FONTANA

Professeur Agrégé des Facultés

Avocat au Barreau de Nice

de Droit et de Sciences Economiques

Ancien Assistant à la Faculté

Avocat à la Cour d’Appel de Paris

 

Depuis la présentation du projet de Loi de Finances pour 1998 par le Gouvernement français, dont nous avons rendu compte dans le précédent numéro de cette revue, des événements importants se sont produits, tant en France que dans le Monde. Ces événements n’ont semble-t-il en rien troublé la sérénité du Gouvernement et de son Ministre des Finances, qui se déclarent de plus en plus convaincus que les objectifs de croissance économique et de déficit budgétaire pour 1998 seront atteints, et même plus facilement qu’ils ne le pensaient à l’origine.

Cet optimisme peut peut-être s’appuyer sur des enquêtes d’opinions qui révèlent un regain de confiance chez les consommateurs et surtout, montrent que les chefs d’entreprises s’attendent à une augmentation de la demande s’adressant à leurs produits.

Ainsi, alors que le moteur de l’exportation continuerait à tourner, celui de la consommation redémarrerait et, par voie de conséquence, l’investissement et la formation des stocks seraient aussi relancés. Tous les éléments d’une croissance plus forte et plus équilibrée se mettraient en place.


UN CONTEXTE ECONOMIQUE ET SOCIAL QUI DEVIENT PLUS DIFFICILE


Cependant, il apparaît que les événements qui se sont produits depuis le début d’octobre sont loin d’être favorables à une accélération de la croissance et donc à de meilleures rentrées fiscales et à une réduction du déficit budgétaire.

LES RETOMBEES DE LA CRISE ASIATIQUE

La France ne peut ignorer les effets de la crise économique et financière venue d’Asie, qui semble s’étendre aujourd’hui à l’Amérique du Sud et à l’ensemble des économies émergentes, et qui par ricochet affecte, dans un premier temps sur le plan financier, mais probablement ensuite sur le plan économique, les pays développés à commencer par le Japon qui est en première ligne et dont la situation était déjà très mauvaise.

Des secteurs particulièrement touchés

Bien sur, on a dit et répété que les exportations françaises vers les pays du sud-est asiatique ne représentent qu’une part marginale de nos exportations. Qu’ainsi, à de rares exceptions près (l’industrie du luxe), les entreprises françaises ne devraient guère être touchées par l’appauvrissement de ces pays.

C’est sans doute oublier un peu vite que les entreprises les plus concernées comptent parmi les fleurons de l’économie française et notamment, du secteur agro-alimentaire, de celui des parfums et de l’habillement de luxe, etc. et que la crise touchera donc, tout particulièrement, des secteurs dans lesquels la France a toujours gardé une position dominante et qui constituent traditionnellement ses plus beaux atouts à l’exportation.

De plus, les banques françaises paraissent très engagées en Asie du Sud-Est, et notamment en Corée, et sont ainsi exposées à devoir lourdement provisionner ce risque.

Une concurrence accrue

De plus, les pays les plus touchés par la crise, qui voient leurs débouchés intérieurs réduits, leurs monnaies dévaluées et qui disposent ainsi de capacités de production inemployées et d’une meilleure compétitivité vont se tourner encore davantage vers l’exportation et seront des concurrents encore plus redoutables. Et ils enverront en Europe moins de touristes, avec moins de pouvoir d’achat.

Surtout, il ne faut pas oublier l’interdépendance de plus en plus marquée entre les économies. Certes, si la crise économique se limitait à quelques pays émergents, ce ne serait pas bien grave pour la France. Mais, déjà, la crise s’étend au Japon qui est le principal fournisseur des pays les premiers touchés. Les Etats-Unis, qui ont en Asie, en Amérique du Sud, et au Japon, des marchés essentiels, ne manqueront pas à leur tour d’être atteints. Déjà, les prévisions de croissance pour 1998 aux Etats-Unis sont révisées en baisse d’environ 0,5 points

La crise ne peut donc que se propager mais peut-être de manière atténuée à l’Europe et la croissance française n’en sortira pas indemne. Tout le problème est de savoir de combien elle sera affectée.

Un effet négatif sur la croissance

Perdra-t-on seulement 0,1 à 0,2 points de croissance comme le pensent des optimistes ou beaucoup plus ? Il est sans doute trop tôt pour répondre à cette question. Cependant les prévisions de croissance de la France pour 1998 sont en train d’être remises en cause par bien des observateurs, et souvent d’au moins 0,5 points. Il est vrai que la crise asiatique n’est pas la seule cause de ces révisions.

Les effets pour la France dépendront beaucoup des gains de compétitivité pour les pays concernés et donc de la perte de compétitivité pour l’économie française qui résulteront de l’effondrement des monnaies de nombreux pays du Sud-Est Asiatique et du net affaiblissement du Yen. Certains secteurs de l’économie française seront ainsi exposés à une concurrence étrangère accrue, l’automobile, les semi-conducteurs par exemple, alors qu’ils devront supporter des coûts supplémentaires liés à la diminution programmée de la durée du travail. Les activités liées au tourisme risquent également d’être affectées.

Des incertitudes sur les taux d’intérêt et le dollar

En outre, la crise aura des conséquences financières et monétaires dans les pays développés. Sans doute certains commentateurs, pensant qu’à quelque chose malheur est bon, trouvent à la crise boursière un effet positif : calmer l’exubérance des marchés, rendre inutile l’augmentation des taux d’intérêts et il est vrai qu’après une chute brutale mais courte, la plupart des grandes Bourses mondiales hors Asie se sont ressaisies tout en connaissant depuis une évolution très heurtée et tendent même, début 98, à rejoindre leur record historique.

Cependant, des tensions inflationnistes peuvent subsister dans certains pays et rendre nécessaire un durcissement de la politique monétaire. La crise boursière n’a pas empêché la Banque d’Angleterre d’augmenter son taux d’escompte. Si la Réserve Fédérale n’a pas suivi, il semble qu’une augmentation de ses taux ne soit que différée.

S’il est vrai qu’en Europe Continentale il n’existe pas de tension inflationniste, il est vraisemblable que la convergence entre les taux d’intérêts des pays devant faire partie de l’Euro ne se fera pas au niveau le plus bas, mais à un niveau moyen, ce qui obligera les banques centrales dont les taux sont les plus bas, notamment celle de la France, à les augmenter quelque peu.

Des capitaux importants ont été engloutis dans la crise boursière. C’est donc un élément de croissance qui disparaît. Mais la principale crainte est que les investisseurs asiatiques qui ont subi des pertes importantes sur leur marché local ne retirent leurs fonds placés à l’étranger, surtout aux Etats-Unis.

Il en résulterait une baisse du marché obligataire américain qui, pour le moment, a servi de refuge et, par conséquent, une hausse des taux d’intérêt qui se propagerait à l’Europe. Surtout, le dollar en serait affecté.

Ainsi, si à court terme la crise asiatique profite plutôt au dollar et pèse sur le niveau des taux d’intérêt, à moyen terme la tendance pourrait être contraire si les mesures actuellement prises pour rétablir la situation financière des pays les plus touchés ne réussissaient pas..

Or, les hypothèses de croissance pour la France reposent sur l’idée de taux d’intérêts très bas et d’un dollar cher qui rend l’économie américaine moins compétitive et les économies européennes, notamment l’économie française, davantage compétitives.

LES CONFLITS SOCIAUX

Sur le plan franco-français, l’automne a été marqué par la très dure grève des routiers.

Si la crise a été résolue assez rapidement grâce, notamment, à l’habileté et à la diplomatie du Gouvernement, il faut bien voir que l’Etat, et donc le contribuable, fera largement les frais de l’accord intervenu. En effet, les entreprises de transports qui connaissent bien des difficultés face à leurs concurrents étrangers et dont la rentabilité est faible, n’ont pu satisfaire les revendications salariales que parce que l’Etat leur a consenti une aide importante.

Le conflit des routiers n’a pas fait tâche d’huile mais cela sera-t-il toujours le cas ? La politique qui consiste à désamorcer les conflits sociaux par une intervention active de l’Etat, par des aides publiques et par des avantages fiscaux accordés aux entreprises en contrepartie des efforts faits en faveur des salariés risque de connaître ses limites dans un pays où il faut réduire le déficit budgétaire, alors que les prélèvements obligatoires sont déjà excessifs.

Le chômage tend à s’institutionnaliser, et certaines catégories de chômeurs manifestent de plus en plus leur impatience, ce qui provoque une forme de conflit social encore inédite et oblige l’Etat à mettre encore la main à la poche.

De plus, le dialogue social paraît en panne, et le sommet social dont certains attendaient beaucoup a tourné court, car à la suite de l’annonce de la décision du Gouvernement d’imposer par voie législative la réduction de la durée hebdomadaire du travail à 35 heures, sans attendre un accord entre les partenaires sociaux, le Patronat a quitté la table des négociations et ses dirigeants ont annoncé qu’ils ne participeraient plus à des discussions au niveau national.


LE BUDGET 1998 DEVANT LE PARLEMENT


Le projet de Loi de Finances vient d’être voté par le Parlement, l’adoption en deuxième lecture par l’Assemblée Nationale permettant de passer outre l’opposition du Sénat. Les amendements d’origine parlementaire n’ont corrigé le projet gouvernemental que sur des points de détail, sans en modifier l’esprit qui est de tabler sur une forte croissance économique et sur l’augmentation des impôts pour réduire le déficit budgétaire sans diminuer, voire dans certains cas en augmentant, les dépenses publiques. L’alourdissement de la fiscalité de l’épargne et, sur certains points, des entreprises a donc été approuvé par les Députés.

Certaines dispositions ont toutefois été annulées par le Conseil Constitutionnel.

Nous examinerons donc les dispositions nouvelles par rapport au projet initial et celles qui ont fait l’objet de modifications ou de précisions en cours de débats parlementaires

LA FISCALITE DES MENAGES PLUS LOURDE POUR LES ASSUJETTIS A L’IMPOT SUR LE REVENU

La mesure la plus significative pour l’ensemble des contribuables est l’abandon de la baisse de l’impôt sur le revenu qui avait été programmée sur plusieurs années par la Loi de Finances pour 1996. La baisse intervenue en 1996 n’est pas remise en cause, mais on n’ira pas plus loin.

La C.S.G. partiellement déductible

Comme prévu, un amendement du Gouvernement prévoit la déductibilité de la C.S.G. à hauteur de la part affectée au financement des régimes obligatoires d’assurance maladie, soit à concurrence de 5,1 points pour les revenus d’activité et les revenus du capital et 3,8 points pour les revenus de remplacement. Cette déductibilité allait de soi, puisque la majoration de C.S.G. se substitue à une cotisation qui était elle-même déductible.

Toutefois, en ce qui concerne les revenus du capital, la déductibilité de la C.S.G. ne concerne que ceux qui sont soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu et non ceux qui subissent un taux d’imposition spécifique.

les déductions supplémentaires pour frais professionnels à nouveau sur la sellette

Les Députés avaient, dans un premier temps, rétabli la suppression progressive des déductions supplémentaires pour frais professionnels qui figurait dans la Loi de Finances pour 1997, mais qui avait été suspendue par le projet de budget pour 1998.

Ainsi, le plafond de déduction devait être ramené à 30.000 Francs pour l’imposition des revenus de 1997, 20.000 Francs pour 1998 et 10.000 Francs pour 1999. Cet avantage devait être totalement supprimé à compter de l’imposition des revenus de 2000.

Cependant, le Gouvernement, pour ne pas mécontenter les journalistes qui sont parmi les principaux bénéficiaires de cet avantage fiscal, a proposé de surseoir d’un an à la suppression de cette déduction. Il a finalement été suivi par les Assemblées.

Une amélioration pour les personnes seules ayant élevé un enfant

Le plafond de la réduction d’impôt résultant de la demi-part supplémentaire dont bénéficient les personnes seules ayant élevé au moins un enfant a été portée à 6.100 Francs au lieu de 3.000 Francs dans le projet initial.

De plus, cette limitation ne s’appliquera que si le dernier enfant du contribuable est âgé d’au moins 27 ans.

Une augmentation du crédit d’impôt pour les dépenses d’entretien de l’habitation principale

L’Assemblée a décidé de relever de 4.000 Francs à 5.000 Francs pour les personnes seules et de 8.000 Francs à 10.000 Francs pour les couples mariés le plafond des dépenses ouvrant droit aux nouveaux crédits d’impôt pour les dépenses d’entretien de l’habitation principale. Elle a également prévu une majoration de ce plafond égale à 500 Francs par personne à charge, à 750 Francs pour le second enfant et à 1.000 Francs à partir du troisième.

Allégement de la Taxe d’Habitation pour les ménages à faible revenu

Les redevables dont le montant des revenus de l’année précédente ne dépasse pas certaines limites peuvent bénéficier d’un dégrèvement d’office de la fraction de leur cotisation de taxe d’habitation qui excède 3,4 % de leur revenu. Pour les impositions établies à compter de 1998, le revenu de référence à prendre en compte pour l’octroi de cet avantage serait sensiblement réévalué.

Majoration des droits de timbre et des droits sur l’essence et les tabacs

Pour compenser les pertes de recettes fiscales engendrées par certaines des nouvelles mesures, les  » recettes de poche  » ont été mises à contribution. En plus de la traditionnelle augmentation des droits sur l’essence, les droits de timbres sur la délivrance des documents administratifs les plus importants seront sensiblement majorés à compter du 15 janvier 1998.

En outre, de nouvelles augmentations de droits sur les tabacs ont été adoptées. Bien que les raisons avancées pour ces mesures soient des raisons qui touchent à la santé publique, l’intérêt pour le Trésor n’en sera pas négligeable.

LE DURCISSEMENT DE LA FISCALITE DE L’EPARGNE APROUVE PAR LES DEPUTES

La nouvelle fiscalité de l’assurance vie

La nouvelle fiscalité de l’assurance vie a été précisée et amendée dans un sens légèrement plus favorable aux assurés que le texte initial. Il en résulte des dispositions extrêmement complexes et qui soulèveront sans doute des difficultés d’application.

Ainsi, concernant les retraits partiels, l’Assemblée Nationale a adopté un amendement visant à maintenir le régime fiscal actuel, l’épargnant étant réputé appréhender simultanément une quote-part des primes versées et des intérêts capitalisés.

Les Députés ont décidé que la modification du régime fiscal prévoyant d’assujettir au prélèvement libératoire de 7,5 % les produits acquis ou constatés à compter du 1er janvier 1998 sur les contrats d’assurance-vie s’appliquerait aux nouveaux contrats souscrits après le 25 septembre 1997 au lieu du 15 septembre.

Un amendement de dernière minute proposé par le Gouvernement a exonéré du prélèvement libératoire de 7,5 % les contrats d’assurance vie.

Pour les contrats existants, les produits acquis ou constatés à compter du 1er janvier 1998 seraient exonérés, dès lors qu’ils sont afférents à des primes versées antérieurement à la date du 28 septembre 1997 (au lieu du 15 septembre 1997).

Seraient, en outre, exonérés, les produits acquis ou constatés à compter du 1er janvier 1998 sur les contrats souscrits avant le 26 septembre 1997 et afférents :

– aux primes versées sur les contrats à primes périodiques, dans la mesure où leur montant n’excède pas celui initialement prévu au contrat,

– aux versements programmés effectués du 26 septembre au 31 décembre 1997 en exécution d’un engagement antérieur au 26 septembre 1997 prévoyant la périodicité et le montant des versements,

– aux versements exceptionnels effectués du 26 septembre au 31 décembre 1997, sous réserve que le total de ces versements n’excède pas 200.000 Francs par souscripteur.

Afin de bien dissocier les versements antérieurs au 1er janvier 1998 et ceux qui seraient postérieurs à cette date, il serait institué une gestion séparée de contrats.

Il serait appliqué, pour l’ensemble des bons ou contrats d’une durée égale ou supérieure à 6 ans (bons ou contrats souscrits de 1983 à 1989) ou d’une durée égale ou supérieure à 8 ans (contrats ou bons souscrits depuis 1990) détenus par un contribuable, un abattement fixé chaque année à 30.000F (célibataire, veuf ou divorcé) ou 60.000 Francs (couple marié soumis à imposition commune).

Un amendement de dernière minute du Gouvernement a enfin prévu que seraient exonérés du prélèvement de 7,5 % (mais non de la CSG, de la C.R.D.S. et du prélèvement social) les contrats investis principalement en actions.

Pour cela l’actif de référence de l’organisme de placement collectif doit être constitué pour 50 % au moins d’actions cotées et titres assimilés, et pour 5 % au moins de parts de fonds communs de placements à risque ou de fonds communs de placements dans l’innovation, d’actions de sociétés de capital risque ou de sociétés financières d’innovation, d’actions émises par des sociétés soumises à l’I.S. qui exercent une activité autre que bancaire, financière, d’assurance, de gestion ou de location d’immeubles, et dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur des marchés réglementés et des titres admis aux négociations sur le nouveau marché.

Il sera possible de transformer un contrat d’assurance vie existant en contrat investi précédemment en actions, sans que cela entraîne une imposition si la transformation intervient avant le 31 décembre 1998.

La Loi PONS rendue plus restrictive

Les Députés ont adopté le dispositif amendé concernant les investissements Outre-Mer (Loi PONS) mais ont écarté la possibilité d’imputer sur leur revenu global les déficits B.I.C. non professionnels résultant de l’exploitation des investissements. En outre, la déduction pour investissements Outre-Mer ne viendra plus en diminution du revenu net pris en compte pour le plafonnement de l’I.S.

Le Conseil Constitutionnel annule les limites apportées à la restitution de l’avoir fiscal

Les Députés avaient adopté le dispositif limitant la restitution de l’avoir fiscal. Le Secrétaire d’Etat au Budget avait précisé que le plafonnement de la restitution ne s’appliquerait pas au plan d’épargne en actions et qu’il présenterait un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité Sociale pour 1998 afin d’exclure de la base des prélèvements sociaux additionnels l’avoir fiscal non restitué .

Cette mesure avait pourtant soulevé de nombreuses protestations parmi les épargnants qui, à juste titre, ont fait valoir qu’elle allait toucher non pas seulement quelques dizaines de très gros actionnaires qui utilisaient la restitution de l’avoir fiscal comme un moyen d’évasion fiscale, ce qui a été avancé pour justifier la mesure, mais des centaines de milliers de petits épargnants aux faibles revenus et qui, justement parce qu’ils ont de faibles revenus, ne paient pas ou peu l’impôt et ne peuvent donc imputer l’avoir fiscal sur celui ci.

Ces petits épargnants, qui sont souvent aussi de petits retraités, ne pouvaient donc plus bénéficier du remboursement de l’avoir fiscal au delà d’une limite dérisoire (500 F pour une personne seule, 1.000 F pour un couple marié). Le Sénat avait porté ces seuil à respectivement 10.000 F et 20.000 F pour les redevables à faible revenu, mais il y n’avait pas été suivi par l’Assemblée.

Toutefois, le Conseil Constitutionnel a déclaré cette mesure non conforme à la Constitution, et elle devra donc être retirée de la loi. En effet, le Conseil a jugé qu’elle entraînait une rupture de l’égalité des contribuables devant l’impôt, plus précisément une différence de traitement entre les bénéficiaires de l’avoir fiscal, sans que celle-ci soit justifiée par une différence de situation en rapport avec l’objet de l’article 158 bis du C.G.I., alors que la loi donne à l’avoir fiscal le caractère d’un revenu imposable. La disposition censurée a donc été retirée du texte législatif.

En revanche, un amendement du Gouvernement prévoit la suppression, à compter des revenus de 1998, de la contribution de 1 % au profit de l’Etat qui frappe les revenus mobiliers soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu (en effet, cette contribution faisait double emploi avec la nouvelle contribution supplémentaire de 2 %).

Les plus-values imposées au-delà du seuil annuel de 50.000 F de ventes à compter de 1998

Un amendement adopté par l’Assemblée Nationale avec l’accord du Gouvernement va encore dans le sens de l’alourdissement de la fiscalité de l’épargne puisqu’il prévoit l’abaissement de 100.000 Francs à 50.000 Francs à compter de 1998, du seuil annuel de cession au-delà duquel les plus-values de cessions de valeurs mobilières sont taxables. Il ne sera donc plus possible à un épargnant, même modeste, d’échapper à la taxation, sauf à renoncer à une gestion tant soit peu active de son portefeuille, ce qui ne saurait être conseillé. Les plus-values sur les titres d’O.P.C.V.M. monétaires ou obligataires de capitalisation demeurent imposables quel que soit le montant des cessions.

Il aurait été certainement plus judicieux de remplacer ce seuil de vente, qui à un niveau aussi bas n’a plus de sens, par un abattement annuel sur le montant des plus-values imposables.

L’actualisation du barème de l’I.S.F. rejetée

Les Députés de la majorité, sans doute déçus par l’absence dans le projet de Loi de Finances de mesures tendant à élargir ou alourdir l’impôt sur la fortune, dans l’attente de la réforme globale de la fiscalité du patrimoine envisagée pour l’année prochaine, ont repoussé la revalorisation du barème d’imposition en fonction de l’indice des prix prévue par le projet de loi initial.

Pour 1998, l’I.S.F. serait donc calculé sur le barème fixé pour 1997, ce qui aboutira à une augmentation du prélèvement réel du fait de la non prise en compte de la dépréciation monétaire.

Une disposition en faveur de la transmission anticipée du patrimoine prorogée d’un an

En revanche, afin de favoriser la transmission anticipée du patrimoine, notamment lorsqu’elle est nécessaire pour garantir la pérennité d’une entreprise, les Députés ont prorogé d’un an le dispositif temporaire de majoration de la réduction de droits qui devait prendre fin le 31 décembre 1997.

Ainsi, pour les donations effectuées jusqu’au 31 décembre 1998, le taux de réduction sera toujours de 35 % pour les donations-partages et les donations enfant unique, et de 25 % pour les autres donations, dès lors que le donateur est âgé de moins de 75 ans.

LA FISCALITE DES ENTREPRISES

La non déductibilité des provisions pour licenciements économiques

En ce qui concerne la fiscalité des entreprises, les Députés ont voté une mesure nouvelle qui, outre le supplément d’imposition qu’elle entraînera, à une portée très symbolique. Ils ont décidé que les provisions constituées pour faire face aux charges liées au licenciement pour motif économique deviendraient non déductibles du point de vue fiscal pour les exercices clos à compter du 15 octobre 1997.

Une entreprise qui comptabilise de telles provisions en application des règles comptables devrait, d’une part, procéder à la réintégration dans le résultat fiscal des dotations effectuées au cours de l’exercice clos à compter du 15 octobre 1997. Elle devrait, d’autre part, rapporter au résultat imposable, les provisions inscrites au bilan à l’ouverture du premier exercice clos à compter du 15 octobre 1997.

Et des provisions pour fluctuation de cours

En ce qui concerne les provisions pour fluctuation de cours, l’Assemblée Nationale a assoupli le projet initial qui ne permettait plus de constituer de telles provisions pour les exercices clos à compter du 31 décembre 1997. Cet assouplissement ne concerne toutefois que la provision inscrite au bilan d’ouverture du premier exercice clos à compter du 31 décembre 1997.

Majoration de l’imposition forfaitaire annuelle

Un article additionnel a prévu un relèvement du montant de l’imposition forfaitaire annuelle sur les sociétés correspondant aux trois dernières tranches du barème. L’I.F.A. serait fixé à 50.000 Francs au lieu de 35.000 Francs pour les personnes morales dont le chiffre d’affaires est compris entre 50 et 10 millions de Francs, à 75.000 Francs au lieu de 50.000 Francs pour celles dont le chiffre d’affaires est compris entre 100 et 500 millions de Francs et à 150.000 Francs au lieu de 100.000 Francs pour celles dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 500 millions de Francs.

Cette imposition forfaitaire est destinée à atteindre les entreprises qui ne réalisent pas de bénéfice imposable.

Une nouvelle taxe sur certaines dépenses de publicité

Une nouvelle taxe est créée sur certaines dépenses de publicité : tout redevable de la T.V.A. relevant de plein droit du régime normal d’imposition devrait acquitter, à compter du 1er janvier 1998, une taxe calculée sur les dépenses engagées au cours de l’année civile précédente et qui ont pour objet :

– l’édition ou la distribution d’imprimés publicitaires, à l’exception de publications touristiques,

– les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à la disposition du public.

Cette taxe, dont le taux serait fixé à 1 % du montant hors T.V.A. de ces dépenses devrait être déclarée sur l’annexe de la déclaration CA3 du mois de mars de l’année suivante et acquittée lors du dépôt de cette déclaration.

Cette nouvelle taxe est supposée constituer une aide indirecte à la presse, dans la mesure où elle pénaliserait les formes de publicité écrite qui ne passent pas par la presse payante. Mais, elle est à double tranchant, puisque bon nombre de groupes de presse éditent à la fois des journaux vendus au public et des journaux mis gratuitement à sa disposition.

Majoration des droits d’enregistrement pour les sociétés

En matière d’Enregistrement, le droit fixe des sociétés est majoré de manière très importante. En effet, le droit fixe de 500 Francs qui est dû notamment en cas d’apport, de dissolution ou de prorogation de sociétés et celui de 1.220 Francs qui est dû notamment en cas de fusion seraient porté à 1.500 Francs à compter de 1998, ce qui, dans le premier cas, correspond à un triplement.

La taxe sur les voitures de sociétés fait également l’objet d’un relèvement sensible.

Quelques dispositions en faveur des créateurs d’entreprises

Le texte qui prévoit un régime de taxation favorable des bons de souscription des parts de créateurs d’entreprises a fait l’objet de trois amendements avec l’accord du Gouvernement : la condition d’ancienneté des sociétés pouvant émettre ces bons a été portée de cinq à sept ans et la durée de présence dans l’entreprise des bénéficiaires du régime a été portée de deux à trois ans.

Le régime de report d’imposition des plus-values de cession de droits sociaux prévu par la Loi de Finances en cas de réinvestissement dans une jeune entreprise a été aménagé par des amendements d’origine gouvernementale.

Le champ d’application du report ne viserait plus les plus-values de cession de participations supérieures à 25 % mais le report serait subordonné à la condition qu’à la date de la cession, les droits détenus directement par le foyer fiscal du cédant excèdent 10 % des bénéfices sociaux de la société dont les titres sont cédés.

Le réinvestissement pourrait intervenir jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle de la cession. Enfin, la société bénéficiaire de l’apport devra être créée depuis moins de sept ans au lieu de cinq ans dans le texte initial.

Un crédit d’impôt pour la création d’emploi

Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés dont l’effectif connaîtra un accroissement net d’ici l’an 2.000 bénéficieront d’un crédit d’impôt de 10.000 F. par emploi nouveau créé au cours des années 1998, 1999 et 2000, dans une limite annuelle de 500.000 F. Ce crédit sera imputable uniquement sur la contribution de 10 % sur l’impôt sur les sociétés et ne pourra pas être remboursé.

Ces limites réduisent singulièrement la portée de ce crédit d’impôt, dont il faut noter en outre que les entreprises individuelles ne pourront pas bénéficier.

LE SENAT VOTE POUR LA DIMINUTION DES IMPOTS ET DES DEPENSES PUBLIQUES

La Loi de Finances pour 1998 a été également discutée devant le Sénat.

La Haute Assemblée a tenté d’y apporter de profondes modifications. Ainsi, la Commission des Finances du Sénat s’était déjà prononcée pour le maintien de la réduction d’impôt sur le revenu pour 1998 qui était prévue l’année dernière, mais qui est supprimée par le nouveau projet de loi.

Le Sénat, prenant le contre-pied de l’Assemblée Nationale, avait décidé que la réduction du déficit budgétaire devait se faire par diminution des dépenses et non par l’augmentation des impôts. Il avait ainsi diminué de vingt millions de francs les prélèvements fiscaux (notamment en matière d’impôt sur le revenu) et décidé de réduire d’un même montant les dépenses, en épargnant toutefois les budgets régaliens tels celui de la Justice ou de la Police.

Cependant, les contribuables ne bénéficient pas de cette réduction d’impôt, car l’Assemblée Nationale n’a pas suivi le Sénat. Or, en cas de désaccord entre les deux Assemblées à l’issue de la  » navette parlementaire « , le Budget peut être adopté par le seul vote de l’Assemblée Nationale où les partisans de la dépense publique sont plus nombreux que ceux de l’allégement de la fiscalité directe. C’est ce qui s’est passé.


LA LOI SUR LA SECURITE SOCIALE ADOPTEE MALGRE LE SENAT


Le projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale est à un stade plus avancé de la procédure parlementaire puisqu’il est déjà venu deux fois devant les deux Chambres.

L’ASSEMBLEE NATIONALE POUR LE TRANSFERT SUR LA C.S.G DE LA COTISATION D’ASSURANCE MALADIE DES SALARIES

Devant l’Assemblée Nationale, le transfert de la cotisation maladie des salariés sur la C.S.G. a été confirmé et quelques précisions ont été apportées au texte. En ce qui concerne, notamment, les non salariés non agricoles, il a été prévu qu’en compensation de l’augmentation de 4,1 % de la C.S.G., la cotisation applicable à la fraction du revenu ne dépassant pas le plafond de Sécurité Sociale sera diminuée de 5,5 points, ce qui la ramènera à 5,9 % alors que la cotisation applicable à la part du revenu dépassant le plafond de Sécurité Sociale, sans excéder cinq fois ledit plafond, sera abaissée de 3,65 points seulement, ce qui la ramènera à 5,35 %.

Pour les artisans en activité, les taux de 5,9 % et de 5,35 % sont à majorer de 0,5 % au titre du financement des indemnités journalières.

Cette modulation de la diminution de la cotisation d’assurance-maladie est censée favoriser ceux des travailleurs indépendants dont les revenus sont les plus faibles. En revanche, il pénalisera les autres, notamment les professions libérales.

Les travailleurs indépendants seront donc la seule catégorie professionnelle dont un nombre important de membres subira un alourdissement de ses cotisations du fait du transfert de la cotisation d’assurance-maladie sur la C.S.G.

LA CONDITION DE RESSOURCES POUR LES ALLOCATIONS FAMILIALES CONFIRMEE

L’Assemblée Nationale a été quelque peu sensible aux protestations des familles en ce qui concerne la mise en place d’une condition de ressources pour l’octroi des allocations familiales et la réduction de moitié de l’allocation de garde d’enfants à domicile. Cependant, elle n’a apporté que des modifications limitées ou de principe au texte gouvernemental. Ainsi, un amendement a tendu à conférer un caractère provisoire à la condition de ressources, dans l’attente d’une réforme d’ensemble des prestations et des aides fiscales aux familles. Il est toutefois probable que cette réforme aille dans le même sens, voire accentue les dispositions actuelles, c’est-à-dire qu’elle tende à lier de plus en plus les prestations sociales à des conditions de revenu et à réduire les avantages fiscaux pour les familles, du moins pour celles qui sont déjà les plus imposées..

En réalité, deux logiques s’affrontent :

La première, qui était appliquée jusqu’à présent, est que la naissance d’enfants ne doit pas entraîner de baisse sensible du niveau de vie de la famille, quel que soit ce niveau en valeur absolue. Cette logique repose aussi sur le principe d’égalité selon lequel tout paiement de cotisation doit ouvrir droit aux prestations correspondantes.

La seconde, qui est celle de la nouvelle majorité, est que les aides à la famille doivent être de plus en plus réservées aux familles modestes, ce qui suppose qu’il n’y ait plus de lien entre le paiement de cotisations et le droit aux prestations, ce qui est déjà le cas pour de nombreuses prestations non contributives. Mais une telle conception dénature la notion de cotisation sociale et transforme celles ci en impôts, ce qui d’ailleurs correspond bien à l’état d’esprit de la nouvelle majorité parlementaire.

Une étude de la Confédération Générale des Cadres fait apparaître que, si pour un travailleur payé au SMIC, les allocations familiales et autres aides sociales permettaient de maintenir le revenu par tête à peu près à un niveau constant, quel que soit le nombre d’enfants, par contre, pour une famille de cadres moyens, le revenu par tête baisse de 40 %. Cette situation, que la réforme d’ensemble envisagée ne pourra qu’accentuer, risque d’être un frein à la natalité pour les catégories sociales touchées et inquiète cette Confédération qui vient de susciter la création d’une association pour la défense des catégories sociales moyennes qui paraissent en effet pénalisées par la nouvelle politique tant fiscale que sociale

Enfin, la réduction de moitié du montant de l’allocation de garde d’enfants à domicile a été modulée. Pour les ménages dont les revenus nets annuels sont inférieurs à un plafond de 300.000 Francs, le taux de prise en charge sera ainsi fixé à 75 %, alors qu’il sera de 50 % au-delà de ce plafond pour un enfant de moins de trois ans.

Il était précisé, cependant, qu’il ne s’agissait là que d’une mesure provisoire et qu’en 1999; la réduction serait de 50 % pour tout le monde.

LE SENAT S’OPPOSE A CES DEUX MESURES, MAIS PROBABLEMENT EN VAIN

Le Sénat avait profondément bouleversé le texte, en supprimant le transfert sur la C.S.G. et la cotisation d’assurance-maladie et en supprimant la soumission à condition de ressources des allocations familiales et la réduction de l’ A.G.E.D. Mais, en seconde lecture, l’Assemblée Nationale a repris entièrement son texte initial. Le Sénat est également, en seconde lecture, resté sur ses positions, certains Sénateurs soulignant d’ailleurs que la constitutionnalité du texte est très discutable. Le dernier mot appartenant à l’Assemblée Nationale, le projet gouvernemental a été, en fin de compte, adopté.

Il faut noter que le Conseil Constitutionnel l’a déclaré conforme à la Constitution.


UNE POLITIQUE RESOLUE MAIS DES PARIS DIFFICILES


DES ORIENTATIONS CLAIREMENT AFFIRMEES ET POURSUIVIES

La nouvelle politique budgétaire se caractérise en effet par des mesures à la fois symboliques et lourdes de conséquences sur le plan budgétaires:

– La volonté de réduire le déficit budgétaire, mais sans réduire la dépense publique, et au contraire en accroissant les interventions de l’Etat dans le domaine économique et social.

– L’augmentation des impôts sur le revenu et sur le capital et l’accent mis sur le rôle positif de la dépense publique. Le Ministre des Finances ne vient t’il pas de déclarer que, si il y avait en France trop d’impôt sur la consommation, il n’y avait pas assez d’impôt sur le revenu, ce qui surprendra sans doute les français, il est vrai minoritaires, que cet impôt met largement à contribution et qui peuvent envier les anglais, les américains ou même les allemands, dont les taux les plus élevés du tarif d’imposition sont bien plus faibles que les nôtres, ou les belges qui ne connaissent pas l’impôt sur les plus-values ou sur la fortune

– L’augmentation du nombre des emplois publics ou subventionnés par l’Etat.

– L’accentuation de l’aspect redistributif des impôts et des cotisations sociales, d’une part, des dépenses publiques et des prestations sociales, d’autre part.

Sur tout ces points, il semble que le Gouvernement n’ait plus peur que sa politique, notamment fiscale, pousse les épargnants à délocaliser leur épargne, les entreprises à délocaliser des emplois et les français les plus fortunés ou les plus dynamiques à chercher ailleurs des cieux plus cléments. De même il ne paraît plus craindre la contradiction entre cette politique et une construction européenne d’inspiration libérale. Il espère même entraîner les partenaires de la France sur la même voie et veut donner le ton en Europe en matière de création d’emplois publics de diminution de la durée du travail et de durcissement de la fiscalité de l’épargne.

Ne peut-on pas considérer pourtant, comme vient de le faire un ancien Directeur Général des Impôts, Monsieur de la MARTINIERE, que promouvoir la dépense publique, alors que les prélèvements obligatoires atteignent 46 % du P.I.B, et qu’il faut sans cesse augmenter la pression fiscale pour simplement maintenir les recettes, est une hérésie.

UN PARI DE PLUS EN PLUS DIFFICILE SUR LES 3% DE CROISSANCE POUR 1998

Les dernières prévisions moins optimistes pour 1998

La réussite de cette politique suppose en tout cas une forte croissance de l’économie française en 1998, égale au moins à 3 % comme le prévoyait le Gouvernement. A défaut, le déficit budgétaire dépasserait les 3% du P.I.B et l’économie française se trouverait enfermée dans un cercle vicieux. Or, les prévisions de croissance des Instituts de conjoncture sont actuellement à la baisse. Certains d’entre eux tablent maintenant sur une croissance comprise entre 2,5 et 2,8 % et le plus pessimiste, Rexecode, proche du Patronat prévoit plutôt entre 2,2 %.et 2,5 %. Le panel d’économistes consulté par Reuters anticipe en moyenne 2,75 %, alors que des experts du Crédit Lyonnais et de la Caisse des Dépôts et Consignations voient une croissance de 2,5 %, ce qui est la moyenne des prévisions actuelles. L’indicateur avancé de la Caisse des dépôts préfigure même un ralentissement de la croissance. Après la forte reprise du troisième trimestre 97 (+0.9 %), l’activité ne progresserait que de 0,6 % au 4éme trimestre 97 et 0,5 % au premier trimestre 98. Encore plus pessimistes, les économistes de l’Expansion prévoient une croissance de 2 %.

En revanche, l’O.C.D.E. prévoit encore une croissance de 2,9 %, mais il semble que cette prévision soit conditionnelle. Le Ministre des Finances fait la même prévision, mais en supposant que la consommation intérieure et l’investissement prendront le relais des exportations.

L’investissement toujours en panne

Alors que tout le monde est d’accord pour estimer qu’une croissance économique satisfaisante suppose une forte relance de l’investissement, les dernières statistiques montrent que l’investissement des entreprises sera stable en 1997 comparé à 1996, alors qu’en début d’année, on prévoyait une croissance de 3 %. Pour 1998, une croissance de 3 % de l’investissements est également espérée. Si l’on considère que l’investissement part d’un niveau historiquement bas, il n’y pas là de quoi susciter une forte relance de l’économie.

La morosité des chefs d’entreprises

Enfin, le dernier baromètre européen des affaires réalisé par l’Institut Louis Harris auprès des grandes entreprises montre que la France n’arrive qu’en sixième position pour les perspectives de croissance en Europe et que son image se dégrade avec 15 % d’opinions favorables contre 30 % l’an dernier. Les chefs d’entreprises français affichent le moral le plus bas parmi les patrons européens et anticipent la plus forte réduction d’effectifs pour l’année prochaine avec les allemands.

Plus récemment encore, une enquête du journal « L’Usine Nouvelle’ indique que si les chefs d’entreprise sont en majorité optimistes pour leur propre entreprise pour les six prochains mois, ils sont beaucoup moins optimistes pour l’économie française dans son ensemble. Ils gardent une confiance inébranlable dans leurs exportations, mais ne croient pas du tout à une augmentation de la demande interne.

A moyen terme l’incertitude et le pessimisme dominent, nourris par le véritable traumatisme qu’a constitué l’annonce de la loi sur les 35 heures. Dans ces conditions, la majorité des chefs d’entreprises n’envisagent ni d’amélioration de l’emploi, ni d’augmentation des investissements, ni d’accroissement des salaires. Il n’y a pas à s’étonner, dans ces conditions, qu’ils ne tablent pas sur la demande interne, mais ils risquent ainsi d’être enfermés, comme l’économie française, dans un véritable cercle vicieux.

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A l’heure où nous écrivons ces lignes, rien n’est encore certain pour 1998. Un optimisme de court terme, qui se nourrit des bons résultats du commerce extérieur, de la stabilisation du chômage, de l’amélioration des carnets de commande de l’industrie et de la bonne tenue des marchés financiers contraste avec des prévisions à moyen terme diverses et nuancées, voire quelquefois franchement pessimistes.

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